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Potion pour une veuve

Potion pour une veuve

Titel: Potion pour une veuve Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Caroline Roe
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Écoutez, il nous faut une pièce à l’écart et des rafraîchissements. Je dois parler en privé à ces deux-là, répondit-il en désignant Mundina et Clara qui se tenaient en retrait.
    — Une servante et un moinillon ? murmura le jeune homme. Oliver, vous avez là les plus étranges amis que je connaisse. Dites-moi pourquoi, je vous en prie, ou j’en mourrai de curiosité.
    — Je vous expliquerai tout, dit Oliver, je vous le jure. Mais je n’en ai pas le temps à présent, ajouta-t-il en menant Mundina et Clara dans un petit salon.
    — Fort bien.
    Du vin, de l’eau, des noix, des olives et des fruits leur furent apportés, puis ils demeurèrent seuls.
    — Clara, dit Oliver en la vouvoyant pour la première fois, je dois savoir qui vous êtes.
    Il parlait d’une voix calme, détachée, comme un médecin qui se fût enquis de sa santé.
    — Vous connaissez déjà tout de moi. Je suis une orpheline. J’ai été élevée par les sœurs. Je suis sans le sou. Rien de plus.
    — Quel âge aviez-vous quand elles vous ont recueillie ?
    — Je ne m’en souviens plus, répondit-elle très vite. Je n’étais pas très vieille, en tout cas.
    — Admettons.
    Il ne la croyait pas mais estimait qu’il valait mieux ne pas insister sur ce point.
    — Combien de temps avez-vous travaillé pour cette femme ?
    — Oh, ça, je m’en souviens très bien. Près de trois ans.
    Elle se tut et contempla ses mains, encore rougies par le labeur.
    — Et pendant tout ce temps, j’ai été payée une misère. Le peu que je gagnais devait grossir le reste de mon argent pour former ma dot. Une petite dot, mais suffisante pour m’empêcher de vivre dans la rue, ajouta-t-elle avec amertume.
    — Vous aviez de l’argent en arrivant au couvent ?
    Elle hésita, comme si sa réponse pouvait être compromettante.
    — Pas grand-chose. Quelques sous. Mais je ne peux pas les récupérer. Ma maîtresse sera allée directement au couvent pour se plaindre de ma désertion.
    — Je vous comprends, Clara. Je ne vous demande pas d’y retourner. Mais dites-moi, on était censé vous payer combien ? demanda-t-il, animé d’une certaine curiosité.
    — Rien la première année. Ensuite, trois livres l’an. Les filles de cuisine n’ont pas beaucoup de valeur.
    — Et combien de temps deviez-vous rester auprès de cette maîtresse ?
    — Sept ans.
    — Dix-huit livres, fit Oliver en secouant la tête. Me direz-vous le nom de votre père, Clara ? demanda-t-il sans transition.
    Le visage de la jeune fille perdit toute couleur.
    — Je ne le puis, murmura-t-elle.
    Ses épaules se crispèrent et ses mains, posées sur ses cuisses ainsi qu’on le lui avait enseigné au couvent, se mirent à trembler. Elle s’empressa de les dissimuler dans les amples manches de son habit de moine.
    — Je ne le sais pas, ajouta-t-elle d’un ton qui se voulait normal.
    — Et celui de votre mère ?
    Elle fit non de la tête.
    Pendant tout ce temps, Mundina l’avait regardée avec plus d’impatience que de compassion.
    — Ça a été dur pour bien des familles, dit-elle. Il y a eu tant de morts. Tu te rappelles ton grand-père ?
    Elle parlait doucement, d’une voix grave et agréable, qui s’écoulait comme un fleuve paisible.
    — J’étais très jeune quand le mien est mort, mais je me souviens de lui, je l’appelais Petit Papa. C’était un petit homme, pas aussi grand que mon père…, reprit-elle.
    — Mon grand-père ? fit la jeune fille.
    Elle se détendait, maintenant que la conversation ne portait plus sur ses parents. Elle tourna la tête du côté de la fenêtre et posa sur les arbres un regard vague, mélancolique.
    — Oui, je m’en souviens. Je l’appelais Aimi. Il m’apportait des friandises et de jolies robes, et puis il est mort quand tout le monde est mort autour de lui.
    Elle releva la tête. Des larmes coulaient sur son visage. Elle les essuya du revers de sa manche et rejeta en arrière ses cheveux coupés à la diable.
    — Mais c’était il y a si longtemps. Je n’ai plus beaucoup de souvenirs…
    — Pourquoi Aimi ? demanda Mundina.
    — Sûrement parce que je n’arrivais pas à dire grand-papa Aimeric.
    Oliver se leva et s’approcha de la fenêtre. Il y demeura un certain temps, en silence, puis se retourna, le sourire aux lèvres.
    — L’endroit le plus propice pour séjourner quelques jours, vous et Mundina, c’est chez les sœurs, mais je ne veux pas commettre l’erreur fatale

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