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Pour les plaisirs du Roi

Pour les plaisirs du Roi

Titel: Pour les plaisirs du Roi Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Philippe Hugon
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hésitation lors de la seconde, en se retirant, mais nul ne le nota.
    De ce moment, Mme du Barry pouvait figurer à la Cour sans qu'elle ne fût obligée de se dissimuler. La cérémonie de la présentation prévoyait d'ailleurs qu'elle devait également une visite au Dauphin ainsi qu'à Mesdames. Jeanne s'en tira fort bien et les filles du monarque ne purent en faire un nouvel argument contre elle.
    Ce soir-là, un petit souper s'improvisa dans l'appartement de Jeanne, auquel j'assistai, en compagnie de M. de Richelieu, de M. d'Aiguillon et de quelques autres, dont M. de Maupeou, qui avait bien œuvré pour arranger nos affaires avec Mme de Béarn. Le roi se montra fort tard, plutôt content de ce que la présentation était maintenant passée. Le lendemain, enfin, Jeanne s'installa à la place de Mme de Pompadour lors de la messe à la chapelle royale. Elle était vêtue d'une robe d'apparat, et portait encore au cou les magnifiques diamants prêtés par le roi pour la cérémonie de la veille. Choisis dans la collection de pierres précieuses de la Couronne, ils valaient deux cent mille livres au bas mot. Le roi n'eut pas le cœur de les lui réclamer.
    26 Les révélations des Mémoires du comte sur l'attitude du prince de Conti à l'égard de Mme du Barry ne sont pas pour autant la preuve qu'il ait commandité la tentative d'enlèvement de la maîtresse du roi. Ce fait me semble même hautement improbable. À cette époque, le prince est certes en farouche opposition avec son cousin, mais il est douteux qu'il se soit abaissé à une telle manœuvre. Le comte précise d'ailleurs que le duc de Richelieu n'y croyait pas non plus. Reste l'hypothèse de l'initiative de M. de Kallenberg, agent du Secret et habitué des coups de main de ce genre. Elle semble la plus probable.

 
    Chapitre XXXVI
    A u mois de mai suivant, Jeanne fit le voyage à Marly, où le roi avait ses habitudes pour la Pentecôte. Chon et Bischi suivirent, avec M. de Richelieu, qui brûlait de commencer à retirer quelques bénéfices de ses assiduités. Quant à moi, je restai bien sagement à Paris, d'abord parce que je n'étais pas admis à suivre le roi à Marly – cela est réservé à des courtisans du premier cercle, et c'est tant mieux car Marly m'ennuie encore plus que Versailles –, ensuite parce qu'il me fallait régler quelques affaires avec Nallut.
    Je n'ai pas eu le temps de vous en parler, mais sachez que Jeanne était retournée plaider la cause de Nallut dans les bureaux de M. Foullon – à ma demande, bien sûr. Cette fois, elle apportait avec elle un simple mot signé du roi où il était écrit : « Vous vous rendrez agréable en arrangeant les affaires de la personne qui vous donnera à lire ce billet. » M. Foulon jouait habituellement les sévères, mais il savait également se composer la mine du servile. À la lecture du billet royal, il opta pour cette figure-là, et fit un bel accueil à Jeanne, qui lui demanda sans façon de rendre à Nallut son brevet de commissaire aux Subsistances pour la Corse. Cette province appartenant désormais à la France, un grand nombre de régiments y cantonnaient. M. de Foullon s'exécuta dans l'heure – bien qu'il tordît le nez, me racontera Jeanne. Je réglai donc avec Nallut la reprise de notre négoce, en même temps qu'il me parut nécessaire de faire exécuter quelques travaux dans ma maison. Je fis venir les meilleurs artisans de Paris, à qui je commandai de vastes réfections, les priant de faire passer leurs créances à la comtesse du Barry, sise château de Versailles. J'occupai ainsi bien utilement mon mois de mai jusqu'au retour de la Cour à Versailles.
    À Marly, tout n'avait pas été pour le mieux. Le parti de la duchesse de Grammont ne baissait pas les armes. Jeanne y avait subi de petites vexations, rien de trop grave, mais la répétition de ces tourments finit par lui gâter l'humeur. Un jour, telle marquise la regardait passer sans la saluer ; un autre, une duchesse s'asseyait ostensiblement à son passage ; ou bien encore, un duc se retirait de la table de jeu lorsqu'elle y prenait place. Jeanne, je ne le dirai jamais assez, ne connaissait pas le ressentiment. Et il fallut qu'on dépassât les bornes pour qu'elle montrât ouvertement de l'impatience. Le roi, qui la savait si douce, s'émut d'ailleurs de la voir nerveuse. Pour la première fois, elle lui en avoua la cause. Elle ne cita aucun nom, mais s'épancha dans des sanglots sur les méchantes manières

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