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Prophétie

Prophétie

Titel: Prophétie Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Christopher John Sansom , Georges-Michel Sarotte
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tremblant, intercepta mon regard. Tendant la main, il cria : « Aidez un ancien moine de Glastonbury, monsieur. On a pendu mon maître, l’abbé ! » Je lui lançai une pièce de six pence sur laquelle il se précipita avec une vitesse inattendue, avant que les autres puissent l’attraper.
    Il y avait tant de gens sans feu ni lieu ! Depuis la dissolution des monastères, quand on vivait à Londres, il fallait s’habituer à tomber partout sur d’attristants spectacles. Un grand nombre de passants s’empressaient de détourner le regard pour chasser ces malheureux de leur vue. De nombreux gueux étaient d’anciens serviteurs des monastères, d’autres de pauvres hères montés des campagnes, suite à la destruction de leur village, maintes terres étant encloses pour y faire paître les moutons. Et les malades qui avaient jadis pu trouver un abri, ne serait-ce que temporaire, dans les hôpitaux monastiques, vivaient désormais dans la rue et y mouraient souvent. Je vais aider Roger à mener à bien son projet d’hôpital, me dis-je. Ainsi j’apporterai au moins ma contribution.
    Je me dirigeai vers Bishopsgate Street. L’hospice se trouvait hors les murs, où d’année en année les terrains étaient envahis de nouvelles maisons. La veille, j’étais retourné à Lincoln’s Inn pour lire à la bibliothèque ce que j’avais pu trouver sur Bedlam. Fondation monastique, elle avait survécu parce que certains patients venaient de familles fortunées et qu’elle représentait potentiellement, par conséquent, une source de profits. Le roi nommait le directeur – à ce moment-là un courtisan appelé Metwys –, qui nommait à son tour un chef gardien à plein temps. C’était l’homme, selon les parents d’Adam, qui espérait que leur fils mourrait.
     
     
    Je fus arrêté près de Bishopsgate par le cortège funéraire d’un homme fortuné : chevaux noirs, voitures noires précédant des hommes pauvres vêtus de noir qui chantaient des psaumes. Un vieillard à l’allure digne marchait à la tête de la procession en brandissant le bâton blanc. Il s’agissait de l’intendant de la maisonnée. Il portait l’emblème du poste officiel du notable qu’il briserait et jetterait dans la tombe. Vu l’impressionnante taille du bâton, je devinai qu’il s’agissait des funérailles de lord Latimer. C’était sur sa veuve que le roi avait, semblait-il, des visées. J’ôtai mon bonnet. Un grand carrosse, dont les volets étaient ouverts, passa devant moi. Une femme, coiffée d’un capuchon noir de jais qui lui encadrait la figure, regarda par la fenêtre. Âgée d’une trentaine d’années, elle avait un visage qui aurait pu être joli et n’était qu’intéressant, à cause d’un menton fuyant et d’une toute petite bouche. Les grands yeux – où se lisait une certaine peur – fixaient la foule sans la voir. Le carrosse passa devant moi en cahotant et lady Catherine Parr sortit de mon champ de vision.
     
     
    À Bishopsgate, je franchis à nouveau le mur de Londres. Un peu plus loin, j’arrivai devant un grand portail en bois. Les deux vantaux étant ouverts, je pénétrai dans une vaste cour au sol de terre moucheté de neige et au milieu de laquelle se trouvait une chapelle. La cour était fermée sur trois côtés par la façade arrière de plusieurs maisons, tandis que sur le quatrième se dressaient des bâtiments à deux étages en grès de teinte grise qui paraissaient très anciens et dont certains volets en bois blanc étaient ouverts. Des gens traversaient la cour en tout sens et j’aperçus deux passages étroits entre les maisons. Bedlam n’était donc pas une prison close. Et je n’entendis ni cris ni bruits de chaînes.
    Je me dirigeai à cheval vers une grande porte située à l’une des extrémités de la cour. Un homme râblé, doté d’un visage à l’air dur et sardonique, portant une blouse grise sale, un gros trousseau de clefs accroché à sa ceinture crasseuse, répondit au coup que je frappai à la porte.
    « Je suis messire Shardlake, dis-je. Je dois voir Adam Kite.
    — Vous êtes avocat, monsieur ? demanda l’homme en regardant ma robe.
    — En effet. Êtes-vous le chef gardien Shawms ?
    — Non, monsieur. Il est sorti, mais il sera bientôt de retour. Je suis l’un des gardiens, Hob Gebons.
    — Les parents du jeune Kite sont-ils arrivés ?
    — Pas encore.
    — Alors je vais les attendre. »
    Il s’écarta pour me laisser passer.

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