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Prophétie

Prophétie

Titel: Prophétie Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Christopher John Sansom , Georges-Michel Sarotte
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vieillard. Avant qu’il ne prenne ses jambes à son cou, j’eus le temps d’apercevoir une barbe grise, des cheveux hirsutes et des yeux brillants dans un visage crasseux.
    Barak lui sauta dessus, l’agrippant par son col déchiré. La plupart des hommes seraient tombés à la renverse, mais lui resta debout et, attrapant le bras de Barak, l’empêcha de porter la main à son épée. Orr saisit la barbe grise, qui se détacha, ou plutôt s’arracha en laissant une profonde entaille sanguinolente dans la joue de l’individu, qui n’en eut cure, et lança son genou entre les jambes de Barak, lequel, le souffle coupé, se plia en deux de douleur. Le colporteur se précipita pour plonger la main dans le fond de son barda, en retira une grande épée, projetant une pluie d’objets de verroterie bon marché, et se plaqua contre le chariot, cerné par Orr et moi, épées au clair. Je me rendis soudain compte que nous étions entourés d’une foule de badauds qui contemplaient la scène à une prudente distance.
    Je scrutai les traits du colporteur, mais la masse de cheveux gris lui cachait le front et du sang coulait de la blessure à la joue, causée parl’arrachement de la barbe jusqu’au col. La couleur de son long nez me parut bizarre et je compris qu’il était faux comme sa barbe et que ce que j’avais pris pour de la crasse était en fait un épais maquillage de comédien. Seuls les yeux bleus, étincelant de fébrilité et de haine, étaient réels.
    Il fit un mouvement brusque et essaya de me porter une botte. Plus par chance que par habileté, je réussis à esquiver le coup. Livide de douleur, Barak me rejoignit d’un bond et s’apprêtait à repousser le bras du colporteur, quand un hurlement lancé depuis le bas-côté lui fit rater sa cible.
    « Arrêtez cette échauffourée ! » nous criait l’intendant Rowland comme si nous étions une bande d’étudiants chahuteurs, ce qui nous désorienta quelques instants, distraction que le colporteur mit à profit pour attaquer Barak, lui écorchant l’avant-bras et lui faisant lâcher son épée. Puis, exécutant un bond de côté, il courut vers un jeune homme au milieu de la foule, un étudiant en droit qui, descendu de cheval pour regarder la scène, tenait sa monture par la bride. Le colporteur lui zébra la joue de son épée, avant de lâcher son arme, tandis que le jeune homme hurlait et portait les mains à son visage. Il se mit en selle d’un bond, éperonna violemment la bête des talons et remonta Chancery Lane à bride abattue en direction de Holborn. Le malheureux étudiant poussait des cris et se tordait sur le sol pendant que Barak jurait en tenant son bras ensanglanté. Je songeai à réquisitionner un cheval d’un des présents et prendre l’individu en chasse, mais le meurtrier serait déjà loin. Découragé, je revins à la carriole.
    Barak n’avait reçu qu’une blessure superficielle, mais le pauvre étudiant était salement blessé au nez et à la joue. L’estafilade lui laisserait une balafre à vie. C’était un vrai miracle que le coup n’eût pas atteint les yeux. L’intendant Rowland ordonna qu’on le ramène à Lincoln’s Inn. Puis il se tourna vers moi, furieux, exigeant de savoir pourquoi nous avions attaqué le colporteur. Lorsque je lui expliquai que c’était l’homme qui avait assassiné Roger Elliard, il resta coi.
    La foule se dispersa peu à peu. Barak, Orr et moi fouillâmes la carriole de fond en comble, mais elle ne contenait que des plateaux pleins de pacotille et de verroterie, des torchons, des chiffons à poussière, des flacons de vinaigre pour nettoyer l’argenterie.
    « C’est assez grand pour y cacher un cadavre », observa Barak. Il prit l’un des chiffons pour bander son bras et arrêter l’épanchement du sang qui coulait sur ses doigts.
    « C’est sous ce déguisement qu’il nous a suivis et a sans doute écouté nos conversations. Je ne me rappelle pas avoir remarqué un colporteur à barbe grise quand j’ai été blessé, mais il est possible qu’il change de déguisement.
    — Était-ce Goddard, monsieur ? demanda Orr.
    — Avec ce faux nez, cette perruque et du sang sur le visage, qui peut le dire ?
    — Je n’ai pas aperçu le moindre grain de beauté, dit Barak. S’il est aussi gros qu’on le prétend, ce serait difficile à cacher.
    — Que faisait-il dans les parages ? demanda Orr.
    — Peut-être surveillait-il les allées et venues. Ou voulait-il nous

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