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Prophétie

Prophétie

Titel: Prophétie Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Christopher John Sansom , Georges-Michel Sarotte
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l’ancienne manière, au centre de la pièce. J’appréciai sa chaleur après le long trajet dans le froid.
    Un homme âgé d’une soixantaine d’années était assis à l’une des tables, une carte tracée à la main posée devant lui. Il se leva pour nous accueillir et se présenta comme William Goodridge. Le teint bistre, des yeux tristes au regard pénétrant, il avait l’air d’un magistrat de province compétent et expérimenté.
    « Quel est le plan ? » demanda Harsnet.
    Le magistrat nous invita à nous asseoir et, indiquant la carte, déclara : « Voici le manoir. Il se trouve à un mille du village. Sur chaque côté, il y a une pelouse envahie par les hautes herbes car le gazon n’a pas été tondu depuis pas mal de temps. Plus loin, des bois cernent la maison.
    — C’est la disposition idéale pour placer des guetteurs, se réjouit Russell.
    — La maison paraît fort grande, dis-je. Combien comporte-t-elle de pièces ?
    — Une douzaine, me semble-t-il. Le vieux Neville Goddard était très hospitalier. Je me rappelle y avoir assisté à des réceptions et à des fêtes dans ma jeunesse. Mais il était trop porté sur la boisson. Et sa femme, une véritable mégère, n’était pas gentille avec lui.
    — Vous vous souvenez de Goddard jeune homme ?
    — Oui. Comme d’un garçon maussade, revêche. Il était intelligent mais il avait… Comment dire ? Un côté veule. Il prenait de grands airs pour quelqu’un dont le père était perclus de dettes à cause de son ivrognerie. Rien d’étonnant à ce qu’il se soit fait moine après la mort de son père, plutôt que de rester avec sa virago de mère. Entre-temps, toutes leurs terres étaient tombées entre les mains des créanciers. Quand la vieille est morte et que Lancelot Goddard a reparu, nous avons espéré qu’il allait restaurer le manoir qu’elle avait laissé aller à vau-l’eau. Mais il va et vient, sans parler à personne.
    — Est-il rentré hier ?
    — Je n’en suis pas certain. Mais de la fumée sortait de la cheminée lorsque maître Russell et moi sommes aller y jeter un coup d’œil hier soir.
    — Il ne vient jamais au village ? Assiste-t-il aux offices religieux ?
    — Non. Ici, dans l’ensemble, nous sommes plutôt desréformateurs… Peut-être ne trouve-t-il pas nos rituels assez papistes. Beaucoup de ragots circulent à son sujet, comme vous pouvez l’imaginer, il met mal à l’aise les villageois.
    — L’homme que nous recherchons pratique une religion toute personnelle, déclarai-je d’un ton sombre.
    — Vous êtes certain qu’il est toujours là ? demanda Harsnet.
    — Oh oui ! L’homme qui guette pour moi m’a envoyé un message il y a une heure pour m’informer qu’une fenêtre était éclairée. »
    Russell se leva. « J’entends un bruit de sabots. On vient. »
    Nous nous tournâmes tous vers la porte qui s’ouvrit pour laisser entrer sir Thomas, suivi de quatre serviteurs armés supplémentaires, ainsi que du doyen Benson, abattu et apeuré, emmitouflé dans un lourd manteau de couleur sombre pour se protéger du froid. Si, comme ceux de Russell, les hommes de sir Thomas étaient eux aussi très sobrement vêtus, sir Thomas lui-même portait un bonnet au plumet rouge, un pourpoint incrusté de petites perles et des gants de soie.
    « Eh bien, fit-il en souriant à la compagnie, nous voici désormais au complet ! Nous avons eu un certain mal à persuader le doyen de nous accompagner, mais il est là… Peut-être pouvons-nous vous promettre un brin d’action », ajouta-t-il en le gratifiant d’un salut moqueur. Le doyen resta coi, se contentant de lui lancer un regard noir. Sir Thomas éclata de rire, puis se dirigea à grands pas vers la carte qu’il étudia d’un œil professionnel. L’intendant expliqua la disposition de la maison de Goddard. Sir Thomas réfléchit quelques instants, avant de s’adresser aux présents. « Nous investirons les lieux dès le lever du jour. Nous disposons de seize hommes maintenant. C’est un nombre suffisant… Êtes-vous prêts à investir la citadelle de ce vaurien ? lança-t-il.
    — Oui, sir Thomas ! » répondirent tous les hommes en chœur. Harsnet et moi échangeâmes un regard. Ces hommes ne se rendaient pas compte de ce qu’ils risquaient de devoir affronter.
    Le magistrat appela l’aubergiste et le pria de préparer le petit déjeuner. Il n’y avait que du pain et du fromage, mais nous les appréciâmes

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