Quelque chose en nous de Michel Berger
tard, il retourne estimer la situation et se jette sur Luc très excité : « Ils sont là, il y a la queue, c’est génial. » Il faut dire que Michel a pris tous les risques. Avec Luc Plamondon, il assume la mise en scène. Et coproduit le spectacle à 30 %, à part égale avec Hachette et Gilbert Coullier. « C’est le seul artiste à m’avoir fait un chèque, dit aujourd’hui ce dernier, avec admiration. Il était équitable, simple, carré, honnête, clair. Il savait tout faire, il aurait pu être producteur. Il ne se trompait jamais. En 1988, nous étions allés voir Maurane au théâtre André-Malraux de Rueil-Malmaison. Au dernier moment, il sentait qu’il manquait quelque chose à la fin. Voilàqu’il veut un miroir qui explose. Il était coproducteur, donc conscient de ce que ça allait coûter. Mais il était sûr de lui. Il finit par me convaincre. Au final, on passe au noir, on lève le vrai miroir, et on en fait apparaître un autre, brisé, avant de rallumer. Le public se lève chaque soir, c’est un triomphe. Une fois de plus, il avait raison. »
À défaut de Céline Dion, que Luc veut dans le rôle de Marie-Jeanne, mais que sa maison de disques a décidé de lancer aux États-Unis, Starmania 88 révélera Maurane (puis Réjane Perry), et aussi Renaud Hantson, excellent chanteur pour lequel Michel et France garderont toujours une affection particulière. Ce sera finalement le grand succès espéré, qui assure la pérennité de l’aventure. Elle avait déjà connu un prolongement québécois à la Comédie nationale de Montréal l’année suivant sa création parisienne (Louise Forestier et Martine St-Clair y participaient), puis au festival de Joliette et au théâtre de Maisonneuve à Montréal de nouveau (cette fois avec Jean Leloup, qui connaîtra plus tard un énorme succès en France chez Fnac Music avec « 1990 »). Cette fois, Starmania se donne dans tout Paris (Marigny, le Zénith), part en tournée à travers la France, puis en Belgique, en Suisse, et en 1990 jusqu’à Moscou et Saint-Pétersbourg, qui vient de récupérer son nom historique.
Mais si la renaissance de Starmania est en fait sa résurrection, cela fait longtemps que Berger et Plamondon rêvent de poursuivre leur association. « Michel n’en avait pas le temps. Il me disait : “Il faut que je fasse un album de France tous les deux ans, c’est ça qui finance mes shows. Avec mes disques, je perds de l’argent, avec les siens j’en gagne.” » Entre-temps, Luc a donc écrit pour Barbara ( Lily passion ), Robert Charlebois (« J’t’aime comme un fou »), Julien Clerc(« Lili voulait aller danser », « Cœur de rockeur », « La fille aux bas nylon »), Richard Cocciante (« Question de feeling » – ils créeront plus tard ensemble Notre-Dame de Paris ), Diane Dufresne toujours (« Strip Tease », « Parc Belmont »), Françoise Hardy (« Flashback »), Catherine Lara (« Nuit magique », la comédie musicale Sand et les Romantiques ) et Ginette Reno (« J’ai besoin de parler »). Entre autres. Mais là, Michel est déterminé, plus pressé que jamais. Il a acquis et fait aménager une maison à Montréal, dans le quartier d’Outremont où se retrouvent les futurs bobos francophones, au pied du parc du Mont-Royal, sur la place à côté de chez Luc. Et, en même temps qu’ils relancent Starmania, ils s’attellent à un personnage qui les fascine tous les deux depuis toujours : James Dean. Ça n’est pas comme si la star fulgurante de La Fureur de vivre, icône gay numéro un dans le monde, n’avait jamais inspiré les auteurs de chansons. Parmi des centaines, les Eagles (« James Dean »), Bette Midler (« Come Back, Jimmy Dean »), Joan Baez (« Honest Lullaby »), John Mellencamp, qui comme lui s’était surnommé Little Bastard (« Jack and Diane »), Phil Ochs (et sans doute la plus belle de toutes, « Jim Dean of Indiana »), célèbrent le brise-cou – littéralement – de la route de Salinas, que tant d’autres se contentent de citer ou d’invoquer, de Lou Reed à Lady Gaga, de Bon Jovi à Madonna. Mais là, ce sont vingt-deux morceaux qui racontent La Légende de Jimmy, objet lui aussi d’une sacrée Starmania, spectacle signé Berger/Plamondon/Savary au théâtre Mogador, à partir du 22 septembre 1990. Cette fois-ci, pas de Bolchoï à la Starmania .
L’intrigue ne requiert en effet que quatre personnages. Jimmy, adolescent fasciné par son idole, et surnommé pareil, comme nous
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