Qui étaient nos ancêtres ?
des guerres d’Italie et dite « à l’italienne », aux manches collantes. Cette dernière, en remportant la victoire, va préparer le terrain à la mode du fameux vertugade , aussi appelé vertugadin , mot qui venait d’un terme espagnol signifiant « baguette » et n’avait donc en fait rien à voir avec la vertu.
Souvent raidi par une baguette, ce jupon empesé destiné à faire bouffer la jupe à la manière d’une cloche et à mettre la taille en valeur va trois siècles durant livrer la taille des femmes à des paniers en tout genre et à de complexes armatures, dont les crinolines du Second Empire seront la dernière et sans doute la plus impressionnante expression. Pourtant, la masse de ces étoffes, aussi amples que lourdes, entrave considérablement la marche et les déplacements. Nos grandes dames ne sortent donc pas autrefois sans leur troussoir, sorte de canne-crochet leur permettant de soulever le tout lorsqu’elles montent un escalier, et plus encore lorsqu’elles doivent « slalomer » entre les saletés dont est jonché le pavé des villes.
Ces modes s’accompagneront surtout de couleurs, qui avaient si longtemps fait défaut au décor quotidien de nos ancêtres. Si, au Moyen Âge, les façades des cathédrales comme celles des maisons étaient peintes dans les teintes les plus vives, la couleur n’avait pas eu sa place dans les intérieurs modestes. Sauf, peut-être, au XVIII e siècle, pour les rideaux que l’on ajouta aux lits, et qui apportèrent une touche « jaune citron », « rouge cramoisi » ou « vert grenouille » à cet univers à la fois sombre et terne. Quelques uniformes – ceux des soldats ou des maîtres de postes – venaient donner un éclat presque incongru à cet univers triste et incolore. Incolore, certes, mais pas toujours inodore…
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Sales ou parfumés ?
Deux derniers traits caractérisent le monde d’autrefois et le différencient profondément du nôtre : l’univers de nos ancêtres est à la fois sombre et malpropre. En sont absentes la lumière électrique et l’eau courante, aussi bien chaude que froide. Ces deux constatations, que l’on a aujourd’hui du mal à apprécier, expliquent notre tableau particulièrement terne, mais qui ne nous en réserve pas moins quelques dernières surprises.
Villes et fermes au même régime :
noir de nuit ou noir de crasse ?
Il nous est difficile d’imaginer un monde sans électricité, et plus encore sans lumière ! Pourtant, de façon générale, le décor est obscur.
Nos aïeux sont mal équipés pour percer les ténèbres de la nuit. Les rues des villes sont sombres. Celles de Lille ne seront équipées de becs de gaz qu’en 1837. Celles des bourgs et des villages ruraux attendront la seconde moitié du XX e siècle pour profiter des bienfaits de l’électrification. Les chandelles étant chères et les chats « ne pissant pas d’huile », à la maison, on économise au maximum les sources d’éclairage. Les intérieurs campagnards sont sombres, y compris en plein jour : les ouvertures sont peu nombreuses, pour limiter les déperditions de chaleur, et les vitres, chères, restent longtemps remplacées par du papier huilé. De nuit, le flamboiement des bûches dans l’âtre suffit pour partie à fournir le minimum d’éclairage nécessaire, nulle occupation ne nécessitant de forte lumière, pas plus l’émondage des noix que la consommation de la soupe.
Quand les chats ne pissaient pas d’huile
Longtemps, l’éclairage coûta très cher à nos ancêtres, comme le prouvent encore nos « économies de bouts de chandelles », expression née lorsque ces dernières étaient utilisées concurremment aux lampes à huile, tout aussi onéreuses. Qui oubliait d’éteindre une lampe s’entendait généralement rappeler que « les chats ne pissaient pas d’huile », autrement dit que cette huile d’éclairage n’était pas gratuite… Une expression qui se maintint parfois plusieurs décennies après l’apparition de l’électricité…
La fée électricité fut sans nul doute une des révolutions techniques qui eut le plus de conséquences sur la vie quotidienne de nos ancêtres, auxquels elle fit une impression que l’on a aujourd’hui du mal à imaginer, et que je vous laisse le soin de découvrir sous la plume d’Annette Blain. Ancienne « pupille de l’État » élevée dans un village reculé du Morvan, elle a raconté dans ses Mémoires comment
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