Qui étaient nos ancêtres ?
et les miroitiers, à saint Cloud les cloutiers, comme à saint Simon les scieurs de long tout simplement à cause… de la « scie » de la première syllabe de son nom !
Par leur légende, nos saints sont enfin doués de vertus et de pouvoirs divers, tantôt d’ordre médical, guérissant de tels ou tels maux, tantôt d’ordre météorologique, les uns déclenchant les pluies, les autres les arrêtant. Tous ont de multiples cordes à leur arc. Ils apportent un message d’espoir : si saint Laurent a souffert le martyre du gril, il est aujourd’hui à la droite du Père. Les souffrances terrestres sont récompensées. « Heureux les assoiffés de justice, car ils seront rassasiés. Heureux les affligés, ils seront consolés… »
Par tous les saints : du testament au cimetière
L’application de tout cela va se trouver dans le testament de nos ancêtres, ce beau testament d’Ancien Régime qui commence invariablement par la prière et le salut : Au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit , continue par la belle et émouvante formule sachant qu’il n’est rien de plus certain que la mort ni de plus incertain que l’heure d’icelle , et enchaîne sur la recommandation de l’âme à Dieu et l’invocation des saints pour associer « toute la cour céleste ». La liste est souvent très longue : si avant que d’exprimer ses dernières volontés, la paysanne Marie-Élisabeth Tassin, testant à Haveluy en 1730, ne cite guère que sainte Élisabeth, sa patronne, et saint Martin, patron de la chapelle de son hameau, Oudard Coquault, bourgeois de Reims, qui a peut-être une culture religieuse plus développée, va, lui, en 1669, prier « la bienheureuse d’entre toutes les femmes la Vierge Marie, mère de Dieu, Sainct Michel et tous les Saincts anges qui louent et bénissent le Seigneur, les saincts patriarches et prophettes, le grand saint Jehan précurseur du Seigneur, les bienheureux apostres saint Pierre et saint Paul, et tous les douze auquelz le Seigneur a donné toutte puissance de lier et deslier et lesquelz, assis, jugeront les douze tributz, le bienheureux saint Étienne, premier martir, et tous les sainctz et sainctes qui sont en la fasse du Seigneur, qu’il leur plaise prier ce seul Médiateur du genre humain, Jésus-Christ ».
Ce n’est qu’une fois ces formalités accomplies que l’on en vient au vif du sujet et que le testateur va proprement dicter au notaire son testament. Si, à Génat, dans l’Ariège, Peirounet Marty le fait, en mai 1545, « estant assis sur ung banc dans la salle de sa mayson et habitation, sain de corps par la grâce de Dieu, en sa bonne forme et valide mémoire, bien parlant et considérant rien n’estre si certain que la mort », l’homme (ou la femme) qui teste est le plus souvent montré « gisant dans son lict » et parfois précisé « malade de corps mais néanmoins sain d’esprit et de jugement ».
Mais les volontés exprimées dans ces testaments surprendront davantage, en ce qu’elles n’ont quasiment rien à voir avec celles des testateurs d’aujourd’hui.
Cet acte, pour nos ancêtres, n’a en effet nullement pour but d’assurer le sort de leurs biens matériels, et s’attache uniquement à celui de leur âme. La majeure partie de leurs textes consistera donc à fonder des messes (messes basses, neuvaines, messe à perpétuité…), qui seront dites pour son repos, et payées par avance au clergé par une suite de legs pieux, parfois en très grand nombre, legs proportionnés à la fortune, ou peut-être parfois aux fautes et aux péchés… Certains semblent raisonnables. Messire François Reynal de la Tissonnière, testant en 1765, en Auvergne, à l’âge de quarante-trois ans, se contente de demander que soient chantés, à l’église de son village de Cheylade, un De Profondis suivi d’un Requiem , chaque dimanche de l’année, ainsi qu’un Salve Regina chaque jour du Carême, sans toutefois préciser pendant combien d’années. Honorable Pierre Le Bastard, testant en 1665 à Kerlias, près de Callac, dans les Côtes-d’Armor, âgé d’environ soixante-huit ans, paie pour fonder à perpétuité deux services annuels, l’un au jour anniversaire de sa mort et l’autre « à chaque jour de fête de M. Saint Pierre », son patron. Chez d’autres, la surenchère est ouverte : en 1690, la Limougeaude Catherine Gallicher, âgée, il est vrai, de quatre-vingt-sept ans, et agissant tant pour le salut de son âme
Weitere Kostenlose Bücher