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Qui ose vaincra

Qui ose vaincra

Titel: Qui ose vaincra Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Paul Bonnecarrère
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le nom que vous portez, mais à vrai dire je n’y
    crois pas le moins du monde. La seconde me paraît beaucoup plus plausible :
    c’est que, choqué par l’insolence de votre démarche et de vos propos, le Vieux
    ait décidé de vous en faire baver.
    — Ai-je la
    possibilité de refuser, mon colonel ?
    — Certes pas. »
    La nouvelle se répand
    comme une traînée de poudre. Le bataillon en prend connaissance dans un mélange
    d’espoir et de franche rigolade. Cochin, Kérillis et Camaret se tordent carrément
    de rire. Et lorsqu’ils accompagnent leur compagnon à la gare, ils lui remettent
    un paquet contenant un cadeau, en prétendant s’être cotisés pour en faire l’acquisition.
    Dans le train La
    Grandière ouvre le paquet ; il contient une brosse à reluire, une boîte de
    cirage et un chiffon de velours.
    Le sous-lieutenant jette
    le tout par la fenêtre, sous le regard hostile et choqué des trois sujets
    britanniques qui partagent son compartiment. La Grandière se plonge alors dans
    de profondes réflexions. Il cherche à élaborer un système qui lui permettrait
    de se faire remercier sans encourir de sanction.
    Lorsque le train entre
    en gare de Waterloo, une foule d’idées lui sont venues, mais il a conclu qu’il
    faudrait improviser, agir selon les événements.
    Les rapports cordiaux et
    amicaux que La Grandière entretient d’emblée avec le lieutenant Guy vont lui
    permettre de concrétiser ses espoirs. Guy, sur le ton de la confidence, lui
    explique ce que le général attend de son officier d’ordonnance, l’attitude qu’il
    convient d’adopter. Dans un luxe de détails, il précise ce que de Gaulle
    apprécie, le comportement qu’il affectionne ; Guy apprend également au
    sous-lieutenant ce que le général réprouve, méprise, et exècre.
    À l’énoncé des phobies
    de son chef, La Grandière se montre particulièrement attentif.
    Dans la matinée de l’entrée
    en fonction du sous-lieutenant Roger de la Grandière, de Gaulle est en
    conférence avec trois officiers supérieurs canadiens. De temps à autre il
    réclame un dossier. La Grandière est alors censé se précipiter dans le bureau
    attenant où le lieutenant Guy doit lui remettre les documents qu’il reviendra
    poser sur le bureau du général. C’est en courant presque qu’il doit accomplir l’opération.
    À plusieurs reprises, La Grandière fait preuve d’une nonchalance
    je-m’en-foutiste. Poursuivant son entretien, de Gaulle semble ne pas s’en
    apercevoir.
    Les Canadiens prennent
    congé.
    Le lieutenant Guy avait
    précisé : « L’une des choses qui le mettent hors de lui est que l’on
    touche à quelque objet que ce soit sur son bureau. Déplacez une épingle ou un
    trombone, et vous déclencherez un concert de hurlements. »
    La porte à peine refermée
    sur les visiteurs, La Grandière, cérémonieux, précis, avec les gestes affectés
    d’un butler de grande maison se lance dans un éblouissant numéro de rangement
    de bureau qui lui permet de toucher à tout. De Gaulle le contemple, muet. Le
    sous-lieutenant vide alors les trois cendriers du bureau à la manière moins
    protocolaire d’un maître d’hôtel de boîte de nuit : se servant d’un
    cendrier vide, il couvre le plein, et renverse le tout d’un geste large.
    « Eh bien, La
    Grandière, tonne le général, vous comptez sans doute passer l’aspirateur après
    cela ! »
    Le sous-lieutenant feint
    la surprise.
    « Je vous demande
    pardon, mon général, je pensais bien faire.
    – Ne me prenez pas
    pour un imbécile, et sortez ! »
    À 13h30, de Gaulle
    quitte son bureau. La Grandière le suit, tenant à la main une épaisse
    serviette.
    Le lieutenant Guy avait
    expliqué : « Dans les escaliers, suivez le rythme et ne vous laissez
    pas surprendre. Il est rapide. Lorsqu’il arrive à la sixième marche avant le
    perron, vous le dépassez en courant, vous ouvrez la portière de gauche de la
    Rover. Il s’engouffre ; le moteur tourne. Vous refermez la portière, puis,
    toujours en courant, vous contournez la voiture par l’arrière. Elle démarre.
    Lorsque vous parvenez à la portière de droite, vous l’ouvrez et vous montez en
    marche. Vous vous installez à ses côtés, en refermant la porte. »
    « Je comprends
    parfaitement, avait raillé La Grandière, il y aura les reporters des Actualités,
    j’espère qu’on pourra recommencer la scène si je rate mon coup au premier essai.
    — Ne plaisantez pas,
    mon vieux, c’est

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