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Qui ose vaincra

Qui ose vaincra

Titel: Qui ose vaincra Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Paul Bonnecarrère
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grand Géorgien
    nonchalant s’agenouille auprès de Bouétard, constate les blessures sans
    ménagement. Puis, avec une stupéfiante indifférence, il dégaine un Parabellum, l’arme
    tranquillement sous les yeux du blessé et lui tire une balle à bout portant en
    plein front.
    Hass se précipite, frappe
    le Russe, vocifère sans se faire comprendre ni dans sa langue ni par son
    attitude. Plusieurs soldats rient grassement de l’incident.
    À grands coups de gueule,
    le sous-lieutenant allemand parvient cependant à rétablir son autorité. C’est
    grâce à lui que Jourdan, Sauvé et Etrich, ne sont pas exécutés sur place :
    ils seront emmenés et considérés comme prisonniers de guerre. Grâce à lui
    également, le caporal Bouétard recevra le lendemain des obsèques décentes.
    Le caporal Bouétard est
    mort le 6 juin à 0 h 25. Il est indéniablement la première victime
    alliée du débarquement : le soldat américain de la 101 e Airborne auquel fut décerné officiellement cet honneur posthume devait tomber
    une heure trente plus tard en Normandie.
     

14
    Lorsqu’ils perçurent la fusillade, Marienne, Krysik et Raufast se trouvaient seulement à quelques centaines de mètres. L’instinct primant sur la prudence et la logique militaires, ils rebroussèrent chemin pour tenter de venir en aide à leurs compagnons.
    Par chance, ils purent, sans être aperçus, évaluer le nombre des assaillants et admettre que leur intervention n’aurait aucun effet. Ils repartirent dans la nuit, le cœur broyé.
    Bien qu’elle soit muette et passive, Marienne perçoit pourtant la réticence de Krysik et Raufast. Sans ralentir sa marche, il chuchote :
    « Vous croyez que ça m’amuse d’abandonner nos camarades ? Nous n’y pouvons rien. On n’attend pas de nous des actes d’héroïsme gratuits, mais de l’efficacité et du bilan. Nous n’avons pas le droit de nous faire tuer, enfoncez-vous ça dans le crâne.
    — On n’a rien dit, mon lieutenant, marmonne Krysik. On vous suit. »
    Après une dernière heure de course folle, les trois parachutistes parviennent en bordure d’un cours d’eau.
    Marienne n’ose allumer la lampe qui lui permettrait de faire le point sur sa carte. Il pressent qu’il s’agit de la Claie. Mentalement il tente de faire le point. Une image vague de photo aérienne lui vient à l’esprit et il décide de traverser.
    La Claie n’est large que d’une dizaine de mètres, mais l’eau est glaciale. Elle monte jusqu’à la poitrine des trois hommes qui portent leurs armes et leurs sacs au-dessus de leurs têtes. Sur la rive opposée, ils reprennent leur course silencieuse, traversent un petit bois, gravissent un mamelon. Ils profitent d’un nuage qui masque la lune pour traverser en courant un champ cultivé, puis de nouveau c’est une pente boisée.
    Pendant trois heures ils montent sans échanger un mot, économisant leur souffle. Marienne se fie à son instinct ; les deux autres le suivent aveuglément, persuadés qu’il agit selon un plan établi.
    Il est moins de 5 heures, une lueur blême annonce la naissance du jour. Marienne se fige comme un chien à l’arrêt : à cinquante mètres en contrebas il vient d’apercevoir une ferme.
    C’est une longue bâtisse aux murs de terre, une maison sans style qui semble posée sur la boue. S’ils étaient arrivés cinquante mètres sur la gauche ou sur la droite, ils se trouvaient à découvert. Mais le point à partir duquel ils viennent d’apercevoir la bâtisse est boisé, touffu, leur permet de se dissimuler et d’observer.
    Le vent vient de la ferme ; ils peuvent chuchoter sans risquer d’être entendus. Marienne essuie ses jumelles et observe attentivement, guettant un mouvement. Krysik et Raufast collent à leur chef qui, après un instant, se retourne.
    « Il y a six chevaux dehors, attachés par des rênes. Ils ont des mors et des couvertures sur le dos, c’est étrange…
    — Qu’est-ce que vous trouvez d’étrange à ce qu’il y ait quatre chevaux dans une ferme, mon lieutenant ?
    — Ce ne sont pas des bêtes de trait : on dirait des chevaux de selle. C’est de toute façon bizarre qu’ils soient dehors à l’aube, et j’ai l’impression qu’ils sont en sueur.
    — La cavalerie allemande est motorisée, fait remarquer Raufast.
    — Je sais, mais il faut attendre. Ces chevaux m’intriguent. »
    Rien ne se passe jusqu’à 6 h 30. Il fait alors grand jour. Krysik, le premier, aperçoit des hommes qui

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