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Retour à Soledad

Retour à Soledad

Titel: Retour à Soledad Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
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entendues là-dessus. Gertrude, fort heureusement, n'est pas grosse et peut donc reprendre sa liberté comme elle le souhaite, dit le médecin.
     
    – Comme cela est triste, Uncle Dave ! C'est l'amour par tous bafoué, constata Desteyrac, amer.
     
    – N'en est-il pas souvent ainsi, mon ami ? Lord Byron, expert en complications amoureuses, a écrit ces phrases que, célibataire convaincu, j'ai retenu comme antidote personnel. Écoutez : « Hélas ! l'amour des femmes, on le sait, est une chose à la fois charmante et redoutable ; toute leur destinée est placée sur cette carte unique ; si elles perdent, la vie n'a plus à leur offrir que le spectacle dérisoire du passé, et leur vengeance est comme le bond du tigre, mortelle, prompte, écrasante ; elles ressentent de leur côté des tortures non moins réelles : ce qu'elles infligent, elles l'éprouvent 7  », cita David Kermor.
     
    Les deux hommes sortirent sur le pont que le brûlant soleil de juin avait séché. Sous voiles de manœuvre, le Phoenix approchait du quai, seigneur des mers tout blanc et or. Charles distingua, sous son ombrelle, Ounca Lou qui tenait Pacal par la main. Il ôta son panama et l'agita dans leur direction.
     
    – L'amour est aussi simple que ça, dit Uncle Dave.
     
    – Je suis attendu, murmura Charles, radieux.
     
    – Vous êtes désiré, corrigea le médecin.
     
    1 Le Pèlerinage de Childe Harold , chant I. Œuvres complètes de lord Byron , traduction de Benjamin Laroche, Charpentier, Paris, 1838.
     
    2 Leur correspondance passionnée fut publiée, en Allemagne, par Bettina d'Arnim, en 1835, deux ans après la mort de Goethe. L'édition française, dans une traduction de Sébastien Albin, parut en 1843, au Comptoir des Imprimeurs unis, Paris.
     
    3 En argot américain : jeune fille jolie, agréable à regarder.
     
    4 Nom familier donné par les marins au sifflet du maître d'équipage.
     
    5 Poisson du golfe du Mexique, qui n'existe pas en Europe.
     
    6 Juron : sapristi, nom de Dieu.
     
    7 Don Juan , chant II. Œuvres complètes de lord Byron , traduction de Benjamin Laroche, Charpentier, Paris, 1838.
     

6.
     
    En retrouvant Ounca Lou et Soledad, l'une et l'autre au plein éclat de leur beauté, Charles Desteyrac voulut se croire au plus près du bonheur. En cet été triomphant de l'année 1862, l'île et la femme lui parurent consubstantielles.
     
    Parcelle d'Éden flottant sur des eaux émeraude au soleil des tropiques, seule Soledad pouvait offrir une telle harmonie entre la nature et les êtres. Partout, femmes-fleurs ou fleurs devenues femmes, les jolies descendantes des Arawak animaient de leur grâce mobile la gracieuse immobilité des buissons d'hibiscus et de poincianias. Sous leurs pieds nus, de l'aube au crépuscule, les pennes argentées des palmiers royaux dessinaient d'immatériels tapis, faits de laies alternées d'ombre et de lumière.
     
    Après les heures chagrines passées à Clarendon House et à Charleston, les aléas du blocus et le suicide raté de Gertrude Lanterbach, l'aimable indolence et la naïve gaieté des insulaires, l'inconsciente certitude – qu'ils entretenaient – de voir demain identique à aujourd'hui offraient le bien-être de la sérénité.
     
    Heureux, Charles eût voulu que tous le fussent et il sut convaincre Ounca Lou d'accueillir Mlle Lanterbach à Valmy en l'absence d'Ottilia.
     
    L'Alsacienne s'empressa de dire que son séjour serait bref : le temps de rassembler vêtements et objets personnels qui se trouvaient encore à Exile House, avant de prendre le bateau pour New York, via Nassau.
     
    Surprise par une si prompte décision, Ounca Lou allait manifester son étonnement quand Charles lui imposa silence d'un regard appuyé. Pendant que la maîtresse de maison donnait des ordres pour l'installation de Mlle Lanterbach et la préparation du dîner, il eut un aparté avec Gertrude.
     
    – Je compte que vous direz à mon épouse la véritable raison de votre départ, qui n'est pas celle que vous nous avez donnée à bord du Phoenix avant de vous montrer plus sincère avec le docteur Kermor.
     
    – Je ne cacherai rien à Ounca Lou qui, j'imagine, était, comme vous-même, au courant de mes relations particulières avec Malcolm. Je vais, de ce pas, lui parler, dit Gertrude en s'éloignant.
     
    Tandis que Pacal montrait fièrement à son père les tortues qu'il avait dessinées avec l'aide de son amie Ann, puis chantait une comptine locale

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