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Retour à Soledad

Retour à Soledad

Titel: Retour à Soledad Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
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lisse.
     
    – C'est aimable à vous d'être venue me souhaiter bon voyage, balbutia-t-il, intrigué et ému.
     
    Brandissant son ombrelle comme s'il se fût agi d'une arme, Fish Lady paraissait courroucée.
     
    – Vieux fou qui voulez jouer au soldat à votre âge, après le mal que nous avons eu à vous réparer, Weston Clarke et moi ! Je ne suis pas venue vous souhaiter bon vent, mais vous prévenir de ce qui vous attend. Arrangez-vous pour vous faire tuer dans les Carolines, sinon, au retour, je répondrai oui à la demande en mariage que vous avez eu l'imprudence de m'adresser il y a trente-cinq ans ! lança Lamia à pleine voix.
     
    Elle remonta dans son sulky, tourna bride et disparut aussi vite qu'elle était apparue.
     
    – Eh bien, les bans sont publiés, ce me semble ! dit Tilloy.
     
    – Ça alors ! Que comprendre aux femmes ? Vous l'avez entendue ? Hein ! Vous l'avez entendue ? souffla Carver, décontenancé.
     
    Uncle Dave et Charles, que les vociférations de Fish Lady avaient attirés sur le pont, rejoignirent le major.
     
    – En somme, elle vous menace de mariage. La pire des peines qu'une femme puisse infliger à un homme ! ironisa David Kermor.
     
    – Mes amis ! mes amis ! Ce jour est le plus beau de ma vie, encore que cette déclaration publique de lady Lamia révèle, de sa part, un étonnant manque de retenue, commenta le major, encore abasourdi.
     
    – Nous sommes heureux pour vous, Edward. Nous veillerons à vous ramener intact pour la noce, plaisanta Charles.
     
    – Je crois qu'il serait plus charitable pour lady Lamia que je me fasse tuer, ainsi qu'elle l'a suggéré, conclut Edward Carver.
     
    Il affichait le sourire épanoui de l'homme qui n'a jamais eu autant de bonnes raisons de se cramponner à la vie.
     

    Peint en gris, cheminée tronquée, mâts rabattus, l' Arawak ressemblait plus à un aviso qu'au yacht d'un lord des îles. Les feuilles d'acanthe dorées, qui ornaient habituellement les capots des roues à aube, avaient été enlevées et la tête d'Indien de la figure de proue disparaissait sous une bâche. Dans les chambres autrefois confortablement meublées ne subsistaient que les lits. Même les tables de toilette, à cuvette de marbre et miroir orientable, avaient disparu. Edward Carver avait réussi à sauver de l'évacuation les fauteuils du salon. La provision d'eau douce ayant été réduite au profit du charbon, chacun devrait « se laver économiquement », avait précisé le capitaine Tilloy. Il pensait réellement que son bateau, ainsi délesté, filerait plus de quatorze nœuds.
     
    L'essai de vitesse effectué dès le départ entre Soledad et New Providence fut concluant. Cependant, les vibrations imposées à la coque de fer par les machines tournant à plein régime et par les chaudières à la limite de la surchauffe inquiétèrent, sans qu'il le laissât paraître, le commandant Colson.
     
    L'escale à Nassau ne fut que d'une journée au cours de laquelle Edward Carver obtint du représentant officiel de la Confédération des États du Sud 3 un laissez-passer valable auprès des autorités des Carolines. La ville regorgeait de marchandises apportées par les transatlantiques britanniques et destinées au commerce des blockade runners . Michael Hocker n'eut aucune dificulté à trouver médicaments, chaussures, thé, café, châles, bas de soie et de fil, rubans, aiguilles à tricoter, brosses et paniers, produits et objets qui faisaient cruellement défaut aux Sudistes. Pour faire bonne mesure, on embarqua d'office, à l'intention des dames et demoiselles de Wilmington, des corsets achetés et entreposés quelques mois plus tôt par Malcolm Murray dans l'attente d'une hausse des prix ! Suivant le conseil de lord Simon, Carver fit ajouter quelques caisses de champagne, de sherry 4 et de porto.
     
    De l'avis de tous les forceurs de blocus interrogés, on ne pouvait entrer dans Cape Fear River et atteindre le port de Wilmington, situé à dix-huit miles de la mer, sur la rive gauche du fleuve, sans un bon pilote. Or, un pilote demandait de six cents à huit cents dollars pour une traversée Nassau-Wilmington. Mark Tilloy voulut le meilleur et, pour huit cent cinquante dollars, recruta un quinquagénaire dont la barbiche blanche retenait les brins de tabac à priser que ses larges narines n'aspiraient pas. L'homme répondait au nom de Peter Dorsett.
     
    Suivant les calculs de Tilloy, vérifiés par le commandant Colson

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