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Retour à Soledad

Retour à Soledad

Titel: Retour à Soledad Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
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pour l'abolition de l'esclavage », fit remarquer Carver.
     
    – J'ai surtout entendu dire ça par des Sudistes, intervint Ottilia.
     
    Oubliant qu'elle voulait ignorer la présence de l'espionne, Varina, se laissant emporter par l'indignation, exhala sa colère.
     
    – Et, ne vous en déplaise, nous avons raison ! Tous les arguments sont bons pour ce « grossier paysan », comme l'a appelé votre ami Richard Lyons, que le gouvernement anglais avait envoyé à Washington pour régler l'affaire du Trent . Lincoln et les affairistes yankee veulent d'abord la fin de la société aristocratique du Sud cotonnier, modèle de civilisation agraire et raffinée ! s'écria-t-elle.
     
    – Quel modèle, ma fille ! Votre horizon a toujours été limité par les bornes de vos plantations, par vos salons et vos clubs de Charleston et de New Orleans. Vos barons du coton n'ont rien vu ni rien compris de la marche du monde et des idées, dit lord Simon, s'animant soudain pour répliquer à la place de l'interpellée.
     
    – Nos Cavaliers, autrement dit nos gentlemen, cousin, sont avant tout attachés à ce qui manque aux Yankees et à certains autres des deux sexes : ce que nous nommons le point d'honneur.
     
    – La belle affaire ! Vos Cavaliers, dites-vous, sont attachés au point d'honneur. Mais ils s'en inspirent seulement quand il s'agit de se battre en duel sous les chênes, pour les beaux yeux d'une dame. Ce qui est acceptable, je vous le concède, encore qu'aucune femme ne vaille qu'un homme perde la vie pour elle, n'est-ce pas, Malcolm ? rétorqua Cornfield, faisant allusion à un fait encore ignoré de la plupart des convives.
     
    – Oh ! Vous dites des horreurs ! s'écria Varina, ce qui amusa tout le monde.
     
    Sans tenir compte de l'interruption, Cornfield reprit :
     
    – Où est le point d'honneur pour celui qui oblige des nègres à travailler du lever au coucher du soleil, qui leur interdit d'apprendre à lire et à écrire, qui mutile ceux qui tentent d'échapper au bagne ? Où est l'honneur du planteur qui couche avec ses négresses pour son plaisir, mais aussi pour augmenter, sans débourser un cent, la population servile ?
     
    – Cessez de dire de telles méchancetés, Simon, je vous en prie. Bertie n'a jamais maltraité ses esclaves ; ils sont bien nourris et nous avons même une infirmerie pour les soigner quand ils sont malades, précisa Varina, rageuse.
     
    – Quel altruisme ! Nous savons tous qu'un planteur a intérêt à ce que ses nègres soient en bonne santé jusqu'à la revente. Un nègre adulte vaut plus de mille dollars, m'at-on dit.
     
    – Nous avons payé Champagne, notre maître d'hôtel, mille huit cents dollars, révéla naïvement l'épouse de Bertie, à qui Murray tentait, du regard, d'imposer silence.
     
    – Comment voulez-vous, ma chère Varina, repritCornfield, soudain radouci, que les nations civilisées, qui ont aboli l'esclavage en 1834, approuvent et même tolèrent que se perpétue votre institution particulière ? Si, dès la dissolution de l'Union, décidée par le Sud, vos politiciens s'étaient engagés à supprimer l'esclavage dans un délai convenable, la Confédération eût été reconnue par toutes les puissances européennes comme une nation indépendante. La guerre eût tourné court et beaucoup de vies eussent été épargnées, au Nord comme au Sud. Ne croyez-vous pas, mes amis ? conclut le lord, prenant l'assemblée à témoin de son dire.
     
    – Illusion, généreuse illusion de votre part ! Le mois dernier, à Washington, alors que l'armée fédérale connaissait d'inquiétants revers, le secrétaire d'État, William Seward, a répété : « Nous n'accepterons jamais la division de l'Union, et cela à aucun prix. Il n'y a donc pas de compromis possible », cita Malcolm.
     
    – C'est sans doute pourquoi Nordistes et Sudistes ont rejeté, d'une même voix, la nouvelle offre de médiation faite par l'empereur Napoléon III aux deux parties, rappela Carver.
     
    – Une lettre de ma mère m'a appris ces jours-ci que l'empereur et l'impératrice avaient assisté en février à une représentation de la Case de l'oncle Tom , et que le livre d'Harriet Beecher-Stowe, dont est tirée la pièce, avait déjà connu en France dix éditions successives, ajouta Desteyrac.
     
    Pour détendre l'atmosphère, Malcolm tira de sa poche un billet de banque qui circula autour de la table.
     
    – Ce papier-monnaie, émis par

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