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Retour à Soledad

Retour à Soledad

Titel: Retour à Soledad Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
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gémit-elle.
     
    – La meilleure solution serait de vous marier à un Anglais. Ici, les filles convolent dès l'âge de quinze ans. Et si les parents s'opposent à l'union, le gouverneur peut délivrer une dispense, proposa tout à trac Murray, témoin de la scène.
     
    – C'est une idée, reconnut lord Simon.
     
    – Mais je ne tiens pas à me marier ! Je n'épouserai qu'un homme que j'aimerai, s'insurgea Myra.
     
    – Voyons ! Ce serait un mariage de papier. Une formalité administrative qui vous libérerait de toute tutelle familiale, insista Malcolm.
     
    – Mais un mari a des droits, cousin. Si l'homme qui accepte de m'épouser sur le papier exige tout à coup de... de... de m'épouser vraiment ! bégaya Myra, ce qui fit sourire les habitués de Cornfield Manor, réunis sur la galerie.
     
    – Ma petite, nous choisirons un gentleman, et vous ne craindrez rien. Et, quand vous aurez rencontré celui que vous voudrez pour vrai mari, on vous divorcera. La loi anglaise a donné ce droit aux femmes il y a dix ans, précisa lord Simon.
     
    – Et qui me mariera, ici ?
     
    – Le forgeron, pardi ! C'est une vieille coutume écossaise, ironisa Murray.
     
    – N'écoutez pas Malcolm ! Nous ferons les choses dans les règles. Vous serez mariée à Nassau par le Registrar General . Il m'en coûtera deux ou trois livres sterling, et vous pourrez envoyer à votre frère copie d'une licence de mariage. Vous serez, dès lors, sujet de Sa Très Gracieuse Majesté la reine d'Angleterre. C'est simple, compléta Simon, enchanté de jouer un bon tour aux incorrigibles descendants de Bertie III.
     
    – Je ferai ce que vous voudrez, cousin. À condition que vous me gardiez près de vous. Je ne veux pas revoir les hommes de ma famille. Ils ne rêvent que revanche contre le Nord, comme si la mort de trois cent mille des nôtres ne suffisait pas 4  !
     
    – J'ai en effet appris par un banquier de Charleston qu'à peine rendus à la liberté, vos frères ont adhéré, avec d'anciens propriétaires d'esclaves, à une société secrète fondée le 24 décembre 1865 à Pulaski, dans le Tennessee, par le juge Thomas M. Jones et cinq de ses amis. Cette association d'anciens Confédérés, appelée Ku Klux Klan, s'est donnée pour mission de « préserver la pureté du sang blanc pour lui garder cette supériorité naturelle que Dieu lui a donnée », révéla lord Simon.
     
    – Ils tentent aussi de contrecarrer par tous les moyens les effets des Reconstruction Amendments 5 , dont Thaddeus Stevens, membre de la Chambre des représentants, dit qu'ils doivent « révolutionner les institutions du Sud, ses habitudes et ses manières », ajouta le major Carver.
     
    – Moins politiques que spectaculaires, les démonstrations des membres du Ku Klux Klan, déguisés en fantômes, montant des chevaux caparaçonnés de draps blancs et brandissant des flambeaux, consistent à se présenter comme des cavaliers de la mort pour effrayer les Noirs superstitieux, précisa Lewis Colson, informé par des marins.
     
    – Tant qu'ils en resteront à ces niaiseries de carnaval, ces gens-là ne seront pas dangereux, mais on m'a rapporté que les enragés de Pulaski ont molesté, puis jeté un nègre dans l'eau glacée parce qu'il avait accompagné à cheval une institutrice blanche ! De quoi déclencher une révolte générale des Noirs, jusque-là évitée de justesse, observa Cornfield.
     
    – En attendant, nous devons trouver un mari acceptable pour notre gentille petite cousine, dit Murray.
     
    Il invitait ainsi, d'un ton patelin, lord Simon et ses commensaux à réfléchir avant de proposer le nom de qui pourrait accepter un mariage blanc avec une Sudiste repentie.
     
    Malcolm appartenait à ce type d'Anglais blonds dont les cheveux bouclés ne blanchissent pas, mais virent filasse. Ce détail lui assurait, à trente-quatre ans, avec sa minceur élégante, son aisance de gestes, sa boiterie dissimulée par une démarche un peu dansante, une prolongation de vraie jeunesse. Plus séduisant et séducteur que jamais, il eût volontiers inscrit Myra sur la liste de ses conquêtes, mais la jeune fille, d'une maturité d'esprit rendue précoce par les malheurs vécus, l'intimidait. Il redoutait son ironie mordante comme ses moues dubitatives. Faire le paon devant elle eût provoqué d'acides moqueries. Bien qu'elle lui manifestât d'ordinaire autant de respect qu'à lord Simon, il soupçonnait une attitude plus

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