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Retour à Soledad

Retour à Soledad

Titel: Retour à Soledad Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
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Jamaïque pour rejoindre son époux, les femmes ne pouvant être admises sur un navire de la Royal Navy.
     
    – Je l'aimais bien, cette petite, soupira lord Simon.
     
    – C'est vous qui l'avez mariée, et bien mariée ce me semble ! commenta Ottilia.
     

    En mai, les journaux débordèrent de l'exultation des Américains après la jonction, le 10 du mois, à Promontory Point, dans l'Utah, de la voie ferrée de l'Union Pacific Railroad, étirée sur 1 086 miles, à partir de Omaha, dans le Nebraska, avec celle du Central Pacific Railroad, qui courait sur 689 miles à partir de Sacramento, en Californie.
     
    La nouvelle parvint à Cornfield Manor le 21 mai, jour où l'on célébrait par une garden-party, dans le parc du manoir, le cinquantième anniversaire de Sa Très Gracieuse Majesté la reine Victoria.
     
    – J'aurais bien voulu voir le président du Central Pacific, ce vieux grigou de Leland Stanford, enfoncer le clou d'or qui a réuni les deux rails, devant les machines à vapeur face à face, commenta lord Simon, heureux actionnaire des deux compagnies.
     
    Les photographies de l'achèvement de la ligne du chemin de fer transcontinental, qui avait coûté cent dix-huit millions de dollars, circulèrent parmi les invités, et tous reconnurent que les Américains avaient accompli là un exploit.
     
    – Ils se montrent plus discrets sur les guerres qu'ils mènent contre les Indiens. Depuis des années, les militaires massacrent Cheyenne, Apache, Peaux-Rouges et autres nations ou tribus. Les colons prennent leurs bonnes terres, et les administrateurs de Washington les parquent comme du bétail sur d'étroits territoires qu'ils appellent réserves, fit observer Maoti-Mata, venu en famille rendre hommage à Victoria.
     
    – Vous avez raison : les seuls vrais Américains sont les Indiens. Tous les Blancs aujourd'hui présents en Amérique sont des descendants d'Européens, comme dans nos îles, terres des Guahani, des Taino et des Arawak, reconnut lord Simon.
     
    Le cacique se tut. Il évitait toujours de rappeler à son vieil ami Simon Leonard que les Arawak, après avoir échappé aux Carib, avaient été déportés à Cuba par les Espagnols. Par comparaison, les Anglais s'étaient mieux conduits et continuaient, comme lord Simon, à respecter leurs biens, leurs croyances et leurs coutumes. Et de cela, Maoti-Mata, homme d'honneur, était reconnaissant. Réaliste, il savait cependant que le temps viendrait où le sang des Arawak se mêlant au sang des Blancs, peut-être même au sang des Noirs, sa tribu cesserait d'exister. En épousant un ingénieur américain, Viola, sa petite-fille, participait à l'anéantissement des derniers Arawak bahamiens.
     
    1 De l'espagnol apoyar , soutenir, apoyo , soutien.
     
    2 En 2004, Susan Hockfield a été élue seizième président du MIT, qui avait jusque-là formé plus de cinquante prix Nobel.
     
    3 Gens de couleur.
     
    4 Ce surnom, donné aux Noirs au XIX e  siècle et étendu aux gens de couleur, a pour origine une chanson qui accompagnait la danse d'un gamin de couleur : « Saute, Jim Crow, saute. »
     
    5 1788-1827. Créateur de l'optique cristalline, mise en œuvre pour la première fois au phare de Cordouan, en 1823.
     
    6 On dirait aujourd'hui un déambulateur.
     

7.
     
    Le mariage de Mark Tilloy avec Ann déplut à lord Simon. S'il accepta d'être le témoin de la fille de Jeffrey, tandis que Charles Desteyrac assistait le capitaine, ce fut sans enthousiasme. Pour le maître de l'île, cette union, célébrée sans cérémonie par le pasteur Russell, n'était qu'un nouvel avatar dans la vie du marin. Il considérait avoir fait sa carrière insulaire, l'avait admis dans le cercle des familiers et le voyait avec agacement entrer, presque par effraction, dans la famille Cornfield. Au cours d'une brève réception au manoir, il offrit aux mariés un bol à punch, les traitant ainsi comme Lowell et Viola, honorés du même cadeau.
     
    Le désapointement du lord devait redoubler quand, en octobre, en réponse à la lettre de sa fille lui annonçant que son ex-fiancé était devenu son mari, Jeffrey révéla la ruine de ses affaires. Ann s'empressa de montrer la missive de son père à Simon Leonard tout en le prévenant de ce qu'il allait découvrir.
     
    – Mon père est au bord du désespoir. Il est ruiné ! Et mon frère a fort mal géré mes affaires de Chicago, dit-elle en tendant la lettre.
     
    – Ruiné ! Une fois de plus !

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