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Retour à Soledad

Retour à Soledad

Titel: Retour à Soledad Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
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mort le 8 novembre dernier pour avoir, en août 1860, embarqué, pour le compte de planteurs sudistes, plus de huit cents esclaves à Cuba, observa Murray.
     
    – Lincoln a voulu un exemple, surtout depuis les décisions espagnoles concernant l'émancipation des esclaves, expliqua le major Carver.
     
    – Ce qui nous vaut, dans l'archipel, un afflux de nègres fuyant Cuba, trop souvent sur des embarcations de fortune qui font naufrage avant d'atteindre Inagua ou Crooked, les îles les plus proches des côtes cubaines, dit David Kermor.
     
    – Bon nombre de ces pauvres gens ne trouvent la liberté que dans la mort, soupira lady Lamia.
     
    Fish Lady ne manquait jamais d'accueillir les fuyards chanceux, jetés encore vivants sur les rives de Buena Vista.
     
    Profitant d'un instant de silence, tandis que le maître d'hôtel passait les desserts, Dorothy Weston Clarke aborda un sujet plus mondain. Les considérations sur la guerre entre les États américains, dont elle préférait ne rien savoir, l'ennuyaient prodigieusement.
     
    – Savez-vous que nous avons eu, en décembre dernier, à Nassau, la visite du prince Alfred 1 , deuxième fils de notre reine Victoria ? Dire qu'il était parmi nous à s'amuser pendant que son père, le regretté prince Albert, se mourait à Windsor ! rapporta-t-elle.
     
    – Lors de son passage aux États-Unis, les journaux américains ont présenté Alfred comme un beau garçon, joyeux compagnon, rapporta Ann.
     
    – Nous l'avons rencontré autrefois à Londres, intervint Malcolm. Dans les lieux où l'on s'amuse... Cet adolescent désœuvré se faisait appeler Affie, sobriquet ridicule. Il a été envoyé dans la marine parce que la reine a compris qu'on ne pourrait rien en faire. Elle-même le dit « immoral, égoïste et grossier ». On lui connaît maintenant pour maîtresse Constance Grosvenor, épouse du duc de Westminster, son aînée de douze ans et fille de la meilleure amie de Victoria, la duchesse de Sutherland, commenta Murray, grand amateur des potins londoniens rapportés par Punch .
     
    – Il vient tout de même en deuxième position dans la ligne de succession, après le prince de Galles qui, lui aussi, a visité les États-Unis et le Canada il y a deux ans, rappela Carver.
     
    – Nous avions participé, Kurt et moi, à sa réception à Chicago. J'ai même dansé avec lui. C'était début septembre. Le lendemain, nous embarquions sur le Lady Elgin , mon mari et moi, soupira Ann, la lèvre trémulante d'émotion au souvenir du tragique naufrage.
     
    À la fin du repas, lord Simon entraîna ses amis au fumoir. Le porto servi, les cigares allumés, il s'adressa aux deux médecins présents, Weston Clarke et Uncle Dave.
     
    – Cette petite Ann, jolie comme un cœur, me fait pitié. N'a-t-on vraiment aucun espoir de la voir un jour tenir sur ses jambes et marcher comme tout le monde ?
     
    – D'après le diagnostic des éminents praticiens qui l'ont soignée à New York, sa paralysie des membres inférieurs est irréversible. C'est aussi mon avis, répondit Weston Clarke, péremptoire.
     
    – Mon cher, cette fille est, si j'ose dire, en bonne santé. Ces Cornfield sont robustes et je voudrais tenter un traitement de ma façon qui a plusieurs fois réussi sur des marins paralysés d'un membre, à la suite d'un coup d'espar à la colonne vertébrale, risqua David Kermor.
     
    – Il ne faut pas lui donner de faux espoirs, David. Je connais vos exercices et massages dans l'eau de mer chauffée. Dans le cas de miss Ann Cornfield, ils seront inopérants et vous ne ferez que lui causer fatigue et déception.
     
    – Pourquoi ne pas essayer tout de même ? insista Cornfield, mettant d'autorité fin à la querelle entre les deux médecins avant de quitter son siège pour sonner Pibia.
     
    – Portez-nous des verres, du gin et de l'Angostura bitters, ordonna-t-il au majordome.
     
    Lisant une interrogation dans les regards, il tira une bouffée de son cigare et satisfit la curiosité des invités.
     
    – J'ai demandé au commandant Colson et aux capitaines Rodney et Tilloy de nous rejoindre, révéla-t-il.
     
    – Ça m'a tout l'air d'un conseil de guerre, souffla Murray à Charles.
     
    Le mot n'était pas trop fort et quand apparurent les trois officiers, Desteyrac prit conscience du sérieux de la réunion. Exigeant d'un geste de la main l'attention de tous, lord Simon, le visage empreint de gravité, s'éclaircit la gorge puis

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