Révolution française Tome 1
parlementaires.
Calonne – bien que l’arrêt du Parlement ait été cassé -est
inquiet et décide de se réfugier en Angleterre : contraint à émigrer par
une assemblée de privilégiés, qui lui reprochent d’avoir au nom du roi voulu
réformer le royaume !
Accablé, le roi lit les rapports des « mouches », ces
informateurs du lieutenant général de police que traquent les clercs de la
basoche, qu’ils poursuivent et rouent de coups, sous les applaudissements d’une
foule de plusieurs milliers de personnes qui viennent acclamer les
parlementaires, chaque fois qu’ils dénoncent les édits comme contraires « aux
droits de la nation » ou décident d’annuler l’enregistrement de ces édits
en lit de justice.
Les manifestants crient : « Vive les pères du
peuple ! Point d’impôts ! »
Louis XVI est envahi par l’indignation.
Le Parlement doit plier, pense-t-il par saccades, et il écoute
Loménie de Brienne qui lui demande d’exiler les parlementaires à Troyes.
Puis le roi est saisi par le doute. Il craint les
conséquences de cette épreuve de force, et cependant toute sa conception de l’autorité
monarchique l’incite à agir.
Il est divisé et lui qui recherche l’effort physique pour se
rassurer, se sent tout à coup las, sans qu’il ait besoin de chevaucher ou de
forger. Il a l’impression que son corps puissant et lourd l’accable.
Il somnole pour fuir les maux de tête, les brûlures d’estomac,
tous ces symptômes qu’il ne connaissait pas. Il acquiesce, sans même pouvoir
examiner à nouveau toutes les suites de sa décision, à la proposition de
Brienne.
II signe les lettres de cachet aux parlementaires afin qu’ils
les reçoivent dans la nuit du 14 au 15 août.
Il ne sait pas que certains parlementaires ont menacé
Brienne, l’avertissant :
« Prenez garde, ce n’est plus une guerre parlementaire
que vous allumez, mais une guerre civile. »
Pourtant, les parlementaires quittent Paris, mais arrivés à
Troyes ils réaffirment qu’ils ne changeront pas d’avis.
« Seuls les États généraux peuvent sonder et guérir les
plaies de l’État et octroyer les impôts. »
Plus grave, Paris s’enflamme.
Le 17 août, le jour où les comtes d’Artois et de Provence se
rendent au Palais de Justice pour y faire enregistrer les édits, la foule
envahit les bâtiments, encercle les frères du roi criant : « À
Bicêtre ! À Bicêtre ! » et s’adressant au comte de Provence – hostile
aux choix de Louis XVI – lui lance : « Courage, Monsieur, vous êtes l’espoir
de la nation. »
La garde tire. Il y a des morts et des blessés.
Les magistrats de la Cour des aides – la salle où ils
délibèrent est occupée par les manifestants – déclarent, comme ceux de la
Chambre des comptes, qu’il faut réunir les États généraux.
Des bandes de jeunes gens parcourent les rues, envahissent
les boutiques, saccagent la maison d’un commissaire de police qui a arrêté deux
manifestants, rouent de coups les colporteurs qui crient le texte des édits, insultent
les gardes françaises.
On affiche des placards :
« Dans huit jours il nous faut le Parlement ou le feu. »
Le roi, la reine, le comte d’Artois sont insultés. On
distribue des pamphlets injurieux contre les souverains, et d’abord cette
Autrichienne, cette Madame Déficit .
Une estampe représente le couple royal à table avec cette
légende :
« Le roi boit, la reine mange, et le peuple crie ! »
En province, des manifestations ont lieu autour des
parlements, et les magistrats envoient des adresses au roi exigeant le « rappel
du Parlement ».
Louis veut échapper à ce cauchemar qui lui révèle un royaume
qu’il n’avait pas imaginé.
Il laisse d’abord Brienne rétablir l’ordre à Paris et faire
évacuer le Palais de Justice, mais en même temps il veut donner des signes d’apaisement,
séduire cette opinion éclairée, la détacher des parlements.
Un édit de tolérance rend leur état civil aux protestants. On
examine la situation des juifs du royaume et on envisage leur émancipation.
Mais chaque geste déclenche la réaction hostile d’une partie
de l’opinion : l’Assemblée du clergé de France adresse des remontrances au
roi.
Il faut donc négocier avec le Parlement de Paris, mettre fin
à son exil, retirer la subvention territoriale,
et promettre la convocation des États généraux, pour 1792.
Quant au Parlement, il
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