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Révolution française Tome 2

Révolution française Tome 2

Titel: Révolution française Tome 2 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Max Gallo
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débats ».
    On craint ces « forcenés ». On leur lit le verdict
entre les deux guichets de la Conciergerie.
    Camille Desmoulins pleure.
    Danton tonitrue :
    « Ton jugement, je m’en fous. »
    On coupe le col de la chemise des condamnés et leurs cheveux
afin de dénuder leurs nuques.
    C’est le 16 germinal an II (5 avril 1794).
    Il fait beau.
     
    « Danton monta le premier dans la première des trois
charrettes qui devaient conduire cette bande à la place Louis-XV dite de la
Révolution, raconte un témoin.
    « Il fut obligé d’attendre que ces trois charrettes
fussent chargées pour marcher tous ensemble au supplice.
    « Ce chargement dura plus d’une heure parce que Camille
Desmoulins se débattit longtemps. Il ne voulait pas se laisser lier les mains, se
laisser couper les cheveux.
    « Les gendarmes furent, dit-on, obligés de prêter
main-forte à l’exécuteur pour vaincre la résistance de Camille.
    « Pendant ce temps, Danton riait dans la charrette :
    « “Ce qui me dépite, lançait-il au peuple qui bordait
les voitures près de la grille de la cour du Palais, c’est de mourir six
semaines avant Robespierre.”
    « Camille parut enfin dans la charrette. Sa chemise
était en lambeaux et lui tout essoufflé, furieux, maudissant Robespierre et le
Comité de salut public et l’infâme Tribunal aux ordres de ces monstres.
    « Puis Camille pleurait, murmurant le nom de sa femme
Lucile et de leur fils, Horace.
    « Fabre d’Églantine se plaignait qu’on eût volé chez
lui un manuscrit qui allait être pillé, et ses vers étaient si beaux.
    « “Des vers, s’exclama Danton, avant huit jours tu en
auras fait des milliers.”
    « Danton, dont l’énorme tête ronde fixait
orgueilleusement la foule, entendit une femme crier “Qu’il est laid”.
    « “Ce n’est pas la peine de me le reprocher en ce
moment je ne le serai plus pour longtemps”, répondit-il.
    « Il avait en effet la figure taillée en tête de lion, comme
Robespierre l’a en tête de chat ou de tigre. »
    Il répète, plusieurs fois, tout au long de l’interminable
trajet, accompli au milieu d’une foule immense mais silencieuse : « “J’entraîne
Robespierre ! Robespierre me suit.” »
    Il voit le peintre David qui, assis à une terrasse de café, croque
le condamné : « Valet ! » crie Danton, à celui qui fut son
ami.
    Il monte à l’échafaud le dernier, vers cinq heures et demie
ou six heures ce 16 germinal an II.
    « À mon tour », dit-il, en gravissant vite le « fatal
escalier ».
    « Ce n’est qu’un coup de sabre », ajoute-t-il, cependant
qu’on le lie à la planche.
    « Allons Danton pas de faiblesse », bougonne-t-il
après avoir murmuré : « Ma bien-aimée, je ne te verrai donc plus… »
    Puis forçant la voix, il dit à Samson :
    « N’oublie pas surtout, tu montreras ma tête au peuple,
elle en vaut la peine. »
     
    Samson s’exécuta.
    « La seule tête de Danton fut montrée au peuple. »
    Il était donc bien le principal accusé de ce procès et Fabre
d’Églantine seulement un paravent placé devant les citoyens pour masquer l’élimination
des Indulgents, des tenants d’une autre politique, et faire d’eux des corrompus,
des fripons, des conspirateurs, œuvrant pour la famille d’Orléans.
    « En voyant la tête sanglante de Danton, le peuple crie :
“Vive la République !”
    « Les sourcils de cette tête se mouvaient fortement, les
yeux étaient vifs et pleins de lumière, tandis que l’exécuteur la promenait
autour de l’échafaud.
    « Elle paraissait voir et respirer encore, entendre les
cris de la multitude, tant le corps qu’elle venait de quitter était robuste et
vigoureux. »

     
     
    13.
    La tête de Danton, enfouie dans un sac, et celles des autres
suppliciés, et tous leurs corps mutilés ont été d’abord déposés dans un enclos
proche du cimetière de la Madeleine, puis, la nuit tombée, ils ont été
ensevelis dans le charnier des Errancis, non loin de là.
    Et le cadavre décapité de Lucile Desmoulins, l’« adorable
petite blonde », la jeune mère de vingt-trois ans, celle dont Robespierre
avait été le témoin de mariage, en même temps que Pétion et Brissot, et il
avait songé à épouser la sœur de Lucile, et peut-être même Lucile, ce corps-là
tant aimé par Camille, une semaine plus tard jour pour jour, le 24 germinal an
II (13 avril 1794), fut jeté dans le même charnier des

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