Richelieu ou la quête d'Europe
novembre, le roi de France a l’habileté de se ménager une alliance avec le duc Charles-Emmanuel de Savoie en accordant la main de sa fille aînée, Élisabeth, à l’héritier du duc, Victor-Amédée. Un autre projet de mariage voit le jour à la même date : celui du prince de Galles avec la seconde fille du roi de France, Henriette. L’ Angleterre ne tarde d’ailleurs pas à rejoindre la coalition formée par la France, le Danemark et la Suède .
Au printemps 1610, la position du monarque français paraît considérablement affermie. Le 25 avril, le traité de Brussol achève de détacher la Savoie du camp espagnol et impérial. Charles-Emmanuel accepte une ligue offensive et défensive avec la France contre l’ Espagne . Henri IV récupère les territoires stratégiques perdus lors de la cession du marquisat de Saluces , en particulier le passage en Italie . L’influence des Habsbourg régresse, tandis que les duchés de Lorraine et de Bar trouvent un équilibre précaire entre les grandes puissances qui les entourent.
Il n’en demeure pas moins que l’alliance avec les protestants semble scandaleuse à bon nombre de catholiques intransigeants français. Plus grave, le pape et le clergé de France sont loin d’être convaincus du bien-fondé des choix du souverain Bourbon. Au moment où Richelieu décide de se porter candidat pour les élections à l’assemblée du clergé de France, l’agitation est à son comble. L’évêque de Luçon écrit à l’archevêque de Bordeaux , Monseigneur de Sourdis, afin de lui annoncer son intention de se soumettre aux suffrages de ses pairs et de représenter la province ecclésiastique. L’élection doit se dérouler dans la cité archiépiscopale. Armand Jean y dépêche un homme de confiance, l’abbé Bouthillier de La Cochère : c’est Monseigneur de Sourdis qui est finalement désigné. L’échec est cuisant, mais le cardinal du Perron conserve toute son estime au jeune prélat.
Richelieu est également, dès cette époque, en contact avec le confesseur du roi, le père Cotton. Sans céder au découragement, il envoie le fidèle abbé de La Cochère à Paris pour suivre les débats de l’assemblée du clergé. Par lui, Richelieu apprend l’assassinat d’Henri IV le 14 mai 1610. En vue de l’intervention dans la succession de Clèves et de Juliers , et par précaution, Marie de Médicis a été sacrée à Reims la veille. Henri IV lui-même l’ayant prévu, la reine devient souveraine.
La régence de Marie de Médicis : la loyauté de l’évêque de Luçon et les ambitions des Grands
Au soir du 14 mai, malgré l’opposition de Charles de Bourbon, comte de Soissons (et cousin de Condé), la régence est concédée à Marie de Médicis par le parlement de Paris , au couvent des Augustins. Henri IV n’a pas laissé de testament, mais le duc d’Épernon rapporte la volonté orale du roi, qu’au cas où il décéderait prématurément, la reine serait investie du pouvoir. Colonel général de l’infanterie, le duc d’Épernon garantit aussi à l’assemblée la fidélité et le soutien de l’armée.
Le lendemain, fait sans précédent, les magistrats se réunissent en lit de justice et inaugurent le nouveau règne en procédant à la proclamation officielle de la régence devant Louis XIII. Contre tous les usages, l’héritier de la couronne fait une apparition publique entre le décès et les obsèques de son père, et est intronisé avant le sacre. Les parlementaires profitent de la minorité de Louis XIII pour s’arroger la considérable prérogative de statuer de la légitimité royale, avant toute cérémonie religieuse et investiture spirituelle.
À Paris , le calme a succédé à l’émotion suscitée par l’assassinat d’Henri IV. Marie de Médicis maintient en fonction les ministres du roi défunt : le duc de Sully, surintendant des finances ; Villeroy, âgé de soixante et onze ans, secrétaire d’État depuis le règne de Charles IX, en charge des Affaires étrangères ; Nicolas Brulart, marquis de Sillery, formé par Villeroy, chancelier de France ; le président Jeannin. En province, en revanche, l’agitation demeure. Les dispositions les plus urgentes sont prises par le duc d’Épernon et par le gouvernement : par crainte des affrontements religieux, les places fortes sont mises en défense. Le 22 mai, pour apaiser les esprits, Marie de Médicis confirme l’édit de Nantes . Quelques jours plus tard,
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