Richelieu ou la quête d'Europe
partie. Les Habsbourg ne cessent d’étendre leur domination en Europe . Richelieu se forge une vive conscience de cet état de fait. Louis XIII, en comparaison, paraît dépassé par des querelles intestines qui monopolisent énergie et crédits. Mais il a la sagesse de tenir compte de l’avis exprimé par Marie de Médicis et par son conseiller. Il convainc Philippe IV de négocier. Le 25 avril 1621, est signé le traité de Madrid : les Grisons sont rétablis dans la suzeraineté de la Valteline ; les Espagnols s’engagent à évacuer les positions dont ils se sont emparés et obtiennent en échange des garanties concernant l’exercice du culte catholique.
Sur le terrain, l’application des accords est une tout autre affaire. Le duc de Feria poursuit sans vergogne l’occupation de la Valteline . Dès la fin de l’été, les Grisons reprennent les armes. Battus par les Espagnols, ils sont contraints de se défendre sur leurs propres terres. La supériorité militaire écrasante du gouverneur de Milan abrège les combats. En janvier 1622, les Ligues grises doivent accepter de nouvelles conditions de paix, beaucoup moins favorables que les précédentes : le traité de Milan annule purement et simplement les dispositions du traité de Madrid . Les Grisons renoncent à la suzeraineté sur la Valteline , dont le protestantisme est banni. Ils s’obligent à une alliance avec le roi catholique.
Pour la seconde fois, la diplomatie française subit une véritable humiliation. Grégoire XV lui-même, souverain pontife récemment désigné, craint que le prestige de Louis XIII ne soit à jamais terni et que les Habsbourg ne parviennent à imposer à l’ Europe entière leur hégémonie. Le roi très chrétien, dans l’immédiat, est dans l’incapacité de redresser la position de la France au plan international.
Le cardinalat, le traité de Paris , encore la Valteline ,
la Hollande et le Saint Empire !
Après l’échec des armées royales devant Montauban , les protestants s’agitent de plus belle. Encouragé par Condé, Louis XIII ne pense qu’à se venger. Contre toute attente, Marie de Médicis, toujours à la suggestion de Richelieu, préconise d’ajourner la lutte contre les huguenots. Il lui paraît plus urgent de contraindre les Espagnols à respecter les engagements pris lors du traité de Madrid : la France , en proie aux guerres civiles, pourrait perdre tout prestige et toute autorité aux yeux de Philippe IV. Mais aucun argument n’efface l’humiliation infligée à Montauban une nouvelle expédition dans le Midi est décidée.
Le roi repart en campagne en mars 1622. Sa mère l’accompagne. Elle tient à être présente aux côtés de son fils dans l’espoir de l’influencer, mais reste finalement à Nantes . Courant juin, Louis XIII s’empare de Nègrepelisse, de Tonneins, puis se rend en Languedoc . Les protestants ont rassemblé leurs forces à Montpellier , le duc de Rohan à leur tête. Des négociations s’engagent et aboutissent, le 18 octobre, à la signature d’un accord : l’édit de Nantes est renouvelé, l’interdiction des assemblées politiques est réitérée, les protestants ne conservent que deux places fortes, La Rochelle et Montauban . En contrepartie, les chefs du parti huguenot sont grassement indemnisés. Les assemblées protestantes à caractère politique sont interdites, mais les synodes et les réunions ecclésiastiques sont permis, sans autorisation préalable. Les actes de guerre commis en 1621-1622 font l’objet d’une amnistie. Les constitutions et franchises des cités révoltées sont maintenues. Le duc de Rohan est nommé gouverneur des trois villes de Castres , Nîmes et Uzès . Une compensation financière importante lui est accordée pour les gouvernements de Poitou et de Saint-Jean-d’Angély qui lui sont retirés. Dans l’entourage de la famille royale, les catholiques les plus zélés, qui forment autour de Bérulle le parti dévot, parlent d’une paix honteuse.
Richelieu, même si son avis n’a pas été suivi, ne peut que se féliciter, car il voit enfin ses ambitions, ses efforts et sa contribution aux affaires d’État récompensés. Le roi est intervenu auprès du pape : le 5 septembre, la promotion de l’évêque de Luçon au cardinalat est officielle. Sans perdre une minute, le prélat rejoint Louis XIII à Tarascon . Il est urgent de redorer le blason de la royauté. La cour n’a pas le loisir de s’attarder.
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