Richelieu ou la quête d'Europe
Richelieu et Luynes n’ont trouvé d’éphémères accords que poussés par la nécessité politique. Le favori ne parvient pas à taire la défiance qui l’anime. Malgré les engagements souscrits par le roi, il tente encore tout ce qui est en son pouvoir pour empêcher la nomination de l’évêque de Luçon au cardinalat. Il convoque le nonce apostolique, Bentivoglio, et n’hésite pas à lui déclarer que le roi souhaite empêcher la nomination par le Saint-Siège ! La proposition faite de l’évêque de Luçon pour le chapeau de cardinal ne serait que de pure forme. Le représentant du pape doute d’autant plus volontiers de la légitimité de la candidature de Richelieu que Puisieux lui tient le même discours. À titre personnel, Bentivoglio estime d’ailleurs l’attitude de la reine mère inacceptable et les ambitions de l’évêque de Luçon excessivement dangereuses.
Au mois de novembre 1620, Luynes dépêche à Rome M. de Marsillac, d’une part afin de remercier Paul V des félicitations adressées à Louis XIII pour son intervention en Béarn , d’autre part pour remettre au souverain pontife une lettre confidentielle. Luynes y insiste pour que Richelieu n’obtienne pas le cardinalat. C’est dans ces circonstances qu’est célébré le mariage d’Antoine de Combalet et de Marie de Pont-Courlay. Le favori de Louis XIII se perd alors en contradictions : il écrit à Marsillac de ne plus faire obstacle à la promotion de l’évêque de Luçon , puis refusant toute explication à Bentivoglio, il se borne à lui adresser Puisieux et le duc de Montbazon pour répéter l’opposition du gouvernement à la nomination de Richelieu.
À Rome , l’administration pontificale ne sait évidemment plus à quel saint se vouer ! Richelieu, quant à lui, semble informé des tractations en cours. Pour défendre sa cause, il envoie à son tour à la Curie un de ses amis, l’évêque d’ Orléans . Le 11 janvier 1621, la promotion au cardinalat est rendue publique. Conformément à la demande de Louis XIII expédiée deux ans plus tôt, l’archevêque de Toulouse est inscrit sur la liste, tout comme Bentivoglio. La duplicité de Luynes ne fait plus aucun doute.
Profitant des troubles confessionnels qui agitent le royaume, Richelieu contre-attaque en mettant tout en oeuvre pour discréditer le gouvernement du favori. L’évêque de Luçon mobilise d’abord la reine mère : Marie de Médicis réclame son retour au Conseil et exprime son inquiétude face aux problèmes religieux auxquels son fils doit faire face. Prônant la modération et la prudence en politique intérieure, elle dénonce avec habileté l’immobilisme de la politique extérieure pratiquée par le gouvernement. Richelieu organise aussi une violente campagne de pamphlets contre le favori ; l’opinion publique est inondée des libelles les plus critiques.
L’échec de Louis XIII devant Montauban semble donner raison à l’évêque de Luçon et la mort de Luynes déstabilise l’équilibre émotionnel fragile du souverain. Louis de Marillac est dépêché auprès de lui pour évaluer son état d’esprit. Indice de bon augure : le meilleur accueil lui est réservé. À cet instant, Louis XIII se trouve encore parmi ses troupes, et déclare même son impatience de regagner Paris pour y retrouver sa mère.
Pour Richelieu subsiste une difficulté de taille : les ambitions du prince de Condé, de Sillery et de Puisieux. Le prélat n’a qu’un but, le retour au pouvoir. La confiance de Louis XIII reste à gagner. La seule véritable alliée dont il dispose est Marie de Médicis, aux ambitions à la mesure des siennes. Richelieu est fermement décidé à ne pas se séparer de la veuve d’Henri IV. Dans l’immédiat, il sait qu’il doit faire preuve de patience et dissimuler ses objectifs trop personnels. Les péripéties de la première phase de la guerre de Trente Ans lui apportent alors matière à réflexion. Les événements le conduisent à élaborer un vaste projet de politique étrangère à la gloire de l’État et de la monarchie Bourbon, alors même que la voie prise par Luynes achève de mener la France et son roi au désastre diplomatique le plus complet.
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