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Rive-Reine

Rive-Reine

Titel: Rive-Reine Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
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se révélait « aimable comme sa mère et volontaire comme son père ».
     
    À la fin du banquet, quand on se mit en place pour la farandole du picoulet, Axel entendit la plus conformiste des dames d’œuvres glisser à Élise Ruty en parlant de « l’Américain » :
     
    – En somme, Métaz a bien su saisir le bon prétexte pour quitter sa femme, partir courir l’aventure en Amérique et épouser une jeunette, probablement pleine d’argent !
     
    – Voulez-vous dire que son malheur conjugal l’a servi ? dit la femme du notaire avec humour.
     
    – Oh ! je ne dis rien, ma bonne. Mais je constate ce qu’il est advenu. Notre Charlotte avait bien fauté, certes, mais d’autres dames couchèrent avec des Français en 1801, n’est-ce pas. Nous en connaissons, vous et moi ! Et puis, n’avait-elle pas des excuses, notre Charlotte ? Ces mariages d’intérêt, arrangés par les parents, ne résistent pas au passage de l’amour. D’ailleurs, il a bien bonne façon, ce général, et Axel, qui lui ressemble tant, pas que des yeux, lui va mieux qu’à Guillaume, pas vrai ?
     
    À l’issue de la fête, Blaise et sa femme s’en furent dormir chez les Ruty. Les commères, qui guettaient leur départ en se demandant si Charlotte ne mettrait pas son nouveau mari dans le lit de l’ancien, en furent pour leurs mauvaises pensées.
     
    En accompagnant ceux qu’il pouvait maintenant, comme l’avait constaté M. Laviron, appeler ses parents, Axel fut heureux d’entendre Blaise se réjouir de la bonne soirée veveysanne et regretter, seulement, que son ami Ribeyre n’eût pas été de la fête.
     
    – Et je crois ne pas être le seul à le regretter. J’ai le sentiment que votre marraine, Flora, aurait bien aimé danser le picoulet avec lui, ce soir ! Mais il m’a écrit de Paris pour me dire qu’il viendra passer Noël avec nous. Il m’a aussi annoncé une mort qui me peine plus que celle de Louis XVIII.
     
    – Un parent ? demanda Charlotte.
     
    – Non, un ami très cher, un homme exceptionnel : André-Jacques Garnerin, un aéronaute qui construisit de ses mains sa première montgolfière et y monta seul, en 1790. Je l’ai connu commissaire aux armées et j’ai su comment il tenta de s’évader de la forteresse de Magdebourg, en s’inspirant d’une invention de Léonard de Vinci, au moyen d’un parachute de sa fabrication. D’ailleurs, sauter dans le vide semblait être son grand plaisir. Comme beaucoup d’autres Parisiens, je l’ai vu, le 22 octobre 1797, au parc Mousseaux 3 , se laisser choir d’un ballon, à plus de mille mètres d’altitude, attaché par un faisceau de cordes fines à une sorte de parasol.
     
    – De parasol ! s’exclama Charlotte.
     
    – Oui, une coupole, si vous préférez, formée d’étroits lés de taffetas, cousus ensemble et réunis, au centre, par une rondelle de bois. Le miracle fut qu’il arriva au sol sans dommage. Depuis, il a perfectionné son parachute et fait cent descentes dangereuses, tout cela pour mourir dans son lit, à cinquante-quatre ans !
     
    Tard dans la nuit, Axel se retrouva tête à tête avec Martin Chantenoz, dans le salon de Rive-Reine.
     
    – Tu as de quoi être satisfait, Axel. Tu as réussi ce qui paraissait inimaginable il y a encore un an. Ta mère heureuse, dotée d’une respectabilité retrouvée… avec la bénédiction des deux Églises ! Peut-être serait-il temps que tu penses à te distraire un peu, dit le professeur, qui avait une proposition à faire.
     
    – Oh ! moi ! J’ai, pour l’instant, de quoi m’occuper. Je crains bien que cette mauvaise vendange ne m’empêche de faire développer l’extraction aux carrières de Meillerie et, surtout, d’améliorer le transport des pierres. L’ingénieur Dufour projette, m’a dit M. Laviron, la construction de grands quais dallés à Genève. Il va donc falloir fournir au meilleur prix et avec régularité, car la concurrence sera rude avec les transporteurs genevois. Deux barques de plus me paraissent indispensables pour tirer parti de tels chantiers. Or l’argent manque, Martin, pour les construire, et les autres se font vieilles.
     
    – Emprunte à Guillaume ! Il est maintenant bien à l’aise.
     
    – Me prêter ! Il demande à Laviron ce qui lui revient chaque année, à lui et à Blandine, des affaires d’ici, avec une ponctualité de comptable. Ils investissent tout dans l’Ouest américain, dit Axel, d’un ton où

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