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Rive-Reine

Rive-Reine

Titel: Rive-Reine Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
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orgueilleuse. Cela ajoute à mon regret de n’avoir pas su forcer son apparente indifférence.
     
    – Elle parlait toujours de vous avec admiration, crut bon d’ajouter Axel.
     
    Blaise demeura un instant pensif, puis posa sa main sur l’épaule de son fils.
     
    – Oui, peut-être. Mais vous, Axel, elle vous aimait.
     
    – Nous nous aimions, rectifia Axel.
     
    Trévotte, annonçant le dîner, interrompit opportunément ces confidences.
     

    Axel mit plusieurs semaines avant de retrouver le sommeil, puis, pris par la préparation des vendanges, il convint que Chantenoz finirait par avoir raison. Au soir du ressat, auquel il n’avait pas, cette année, convié les Laviron – l’attitude du banquier refusant un prêt qu’il eût accordé assorti de la main de sa fille lui avait déplu – il osa le dire, à sa manière, à Martin :
     
    – C’est la première fois, depuis notre rencontre à Venise, en 1820, que je suis sûr qu’Adrienne ne court plus aucun danger. J’ai honte de le dire, mais j’ai l’étrange sentiment, en accord avec ma conscience, qu’elle m’appartient plus et exclusivement. Curieux réflexe d’égoïsme, non ?
     
    – Le cœur a sa logique, qui n’est pas celle de l’esprit, Axel. Maintenant, tu vas pouvoir regarder les vivantes sans avoir le sentiment de trahir la morte. Au printemps, ton cœur entrera en convalescence, répondit le professeur en levant son verre.
     
    Ce soir-là, Axel Métaz trouva plaisir au bonheur de sa marraine. Depuis que Flora Baldini était devenue comtesse Ribeyre de Béran par son mariage avec le général, elle semblait rajeunie de vingt ans. Cette femme de cinquante-cinq ans, qui n’avait jamais fait d’effort de toilette, n’en ayant ni le goût ni les moyens, portait maintenant avec aisance des vêtements élégants. Son union avec Claude avait été célébrée discrètement, à Paris, et Flora avait rapporté de la capitale française une garde-robe nouvelle, que Charlotte admirait.
     
    Après avoir dansé avec elle, sous les girandoles de la Grand-Place, où se retrouvaient tous les vignerons et leurs invités après les repas offerts par les propriétaires du vignoble, Axel entraîna sa marraine à l’écart.
     
    – Comment imaginer, Flora, qu’un jour, toi, l’irascible adversaire de la Révolution française, tu épouserais un noble, passé dans les rangs révolutionnaires et devenu général de ce Bonaparte que tu détestais au point d’espionner pour le compte de ses ennemis ? Dis-moi. Comment en es-tu venue à cette extrémité… matrimoniale, stupéfiante pour qui te connaît ?
     
    Flora prit la main de son filleul, baissa les yeux et se pencha pour lui parler à l’oreille.
     
    – Si la vieille femme que je suis te dit la raison, la raison vraie, la seule raison qui contient toutes les autres, au moins tu ne te moqueras pas de moi, promis ?
     
    – Promis, juré, dit Axel sur le même ton.
     
    – Je l’aime, c’est tout !
     
    Axel, ému, embrassa tendrement l’Italienne et sentit une larme sur sa joue. Alors qu’elle prononçait l’aveu, Flora avait fugitivement retrouvé, dans la pénombre, la grâce éblouie d’une jeune fille grisée par son premier amour.
     
    – M’accorderez-vous encore une danse, Madame la Comtesse ? dit-il pour rompre l’attendrissement.
     
    Elle consentit. Ils dansèrent. Puis Axel reconduisit sa cavalière à la table familiale et s’assit près de Chantenoz.
     
    Le professeur se livrait, avec Blaise et Claude, aux spéculations en cours, aussi bien à Genève chez les grognards du café Papon que dans les salons bonapartistes. Ribeyre de Béran avait appris, à Paris, que le maréchal Marmont, duc de Raguse, était à Vienne, près du duc de Reichstadt. Le maréchal avait dû s’exiler pour n’avoir pas su défendre le trône de Charles X, ce que lui reprochait Louis-Philippe en rappelant, avec la défection de Waterloo, que l’ancien aide de camp de Bonaparte ne se trouvait jamais là où l’on avait besoin de lui.
     
    – Avec l’approbation de Metternich, Marmont a, deux ou trois fois par semaine, des entretiens avec le roi de Rome. Bien que le fils de l’empereur ait lu le Mémorial de Sainte-Hélène , il ne semble pas tenir rigueur au maréchal de l’affaire de Waterloo et le questionne avec avidité sur son père. D’après ce que nous savons, le duc aurait un véritable culte pour Napoléon, dont il veut connaître la vie, mais aussi

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