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Romandie

Romandie

Titel: Romandie Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
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qu’aurait
fait toute femme soucieuse de sa dignité, y compris la moins prude. Les femmes,
Axel, ne fonctionnent pas physiologiquement comme nous. Chez elles, sexe, cœur,
esprit, c’est tout un ! Ne fais pas cette tête ! Ce soir, je t’emmène
à Lausanne dans une maison où les filles sont saines, gaies, adroites, jolies
et prendraient pour raillerie outrageante toute déclaration enamourée, car
elles ont le cœur ailleurs que dans leur lit, dit le médecin.
    Axel accepta la proposition d’un hochement de tête puis, se souvenant
que son ami et Zélia semblaient avoir établi des relations plutôt tendres, il l’interrogea.
    — Mais, toi, où en es-tu avec Zélia ?
    — Une sorte d’amitié amoureuse, mon vieux. Je me suis
juré de n’y toucher que le jour où elle sera ma femme légitime.
    Axel haussa les sourcils.
    — Je sais. Pour toi qui connais la Tsigane, la chose te
semble un peu cocasse. Mais je tiens à ce que Zélia, justement parce qu’elle appartient
à une caste méprisée de nos bons citoyens suisses, ait une position morale et
sociale évidente. En faire ma maîtresse, ce qui ne manquerait pas de se savoir,
serait ajouter à l’ostracisme dont les Tsiganes sont l’objet chez nous.
    — Lui as-tu proposé le mariage ?
    — Certes, plusieurs fois, Axel. Elle refuse toujours. Cependant
je sais qu’elle a pour moi un attachement authentique et profond, une tendresse
presque animale, mais elle dit : « Je ne suis pas épousable. Si vous
m’épousiez, les miens diraient que c’est par charité, et ce serait insultant, les
vôtres vous montreraient du doigt. »
    Le visage du médecin s’assombrit, il prit le bras de son ami.
    — Bien qu’elle soit assez libre et dénuée de préjugés
pour devenir ma maîtresse au moindre signe, le seul moyen que j’aie encore de
lui prouver la sincérité de mes sentiments est de la respecter. Alors, comme
toi, je dois aller contenter la bête ailleurs, mon vieux !
    Axel, qui connaissait l’absolue droiture de Louis, lui
envoya une bourrade, manifestation d’émotion contenue.
    — Martin Chantenoz verrait, dans les condamnés que nous
sommes aux étreintes vénales et à l’amour platonique, un sujet pour Eschyle, dit
Axel.
    — Ou pour Aristophane ! rétorqua Louis Vuippens en
riant.
     
    À la fin de l’été, Axel Métaz était guéri de la honte née de
sa mésaventure d’Yverdon et se souciait peu de rechercher Marthe Bovey. Charlotte
lui confia un jour que la belle veuve, qui fréquentait le Cercle des Dames de
la rue de Bourg, figurait parmi ses auditrices lors de la conférence qu’elle
avait donnée sur le couronnement de la reine Victoria, événement intellectuel
et mondain dont les journaux s’étaient fait l’écho.
    — Marthe Bovey m’a demandé de tes nouvelles et voudrait
savoir si tu accepterais de louer ton yacht Ugo avec un bon équipage, pour
une promenade d’une journée, sur le Léman. Elle veut offrir une croisière à
quelques orphelins, dont elle s’occupe, je dois le dire, avec un dévouement édifiant.
Elle-même n’ayant pas eu d’enfant et, d’après ce que j’ai cru comprendre, étant
dans l’incapacité d’en mettre au monde, ce pourquoi semble-t-il elle ne se
remarie pas, trouve grande satisfaction à distraire ces malheureux petits.
    — Chère mère, mon Ugo n’est pas un bateau conçu
pour embarquer un groupe d’enfants probablement turbulents. Nous risquerions l’accident,
peut-être le drame. Dites à M me  Bovey qu’elle s’adresse plutôt
à la société nautique d’Ouchy, dont les bateaux sont équipés pour la sécurité
des promeneurs. Dites-lui aussi mon regret sincère de ne pouvoir satisfaire son
désir et transmettez-lui mes hommages respectueux, dit Axel avec sérieux.
    Ainsi, la belle rousse tentait, par un biais astucieux, de
lui faire savoir qu’elle pardonnait l’offense d’Yverdon, qu’elle était prête à
renouer des relations que lui-même ne désirait plus. De surcroît, si M me  de Fontsalte
n’avait pas, comme souvent, mal interprété une confidence, la dame entendait
faire connaître à l’amant éventuel l’absence du risque de conséquences de
relations intimes avec elle.
    Le soir même, Axel révéla à Louis Vuippens l’offensive de la
belle rousse.
    — Que comptes-tu faire ? demanda le médecin.
    — Lui laisser, à jamais, un souvenir éblouissant et le
regret de n’avoir pas capitulé à Yverdon, dit M. Métaz.

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    Les

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