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Romandie

Romandie

Titel: Romandie Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
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marchant
toujours sur les traces de vos aînés et en continuant à maintenir dans vos
rangs cette bonne discipline qui est le nerf de nos armées et qui fait gagner
les batailles. » Ces rodomontades, destinées à impressionner ceux que le
général français nommait « ses turbulents voisins », irrita fort les
Genevois. Bien que peu enclins, dans leur majorité, à soutenir Louis Napoléon, dont
M. James Fazy, qui tenait le neveu de Napoléon pour un vrai républicain, avait
été l’actif complice dans l’affaire de Strasbourg, les membres du Conseil d’État
et les syndics répondirent par une proclamation de refus et la mobilisation de
la milice. Le canton de Vaud ne fut pas en reste et deux brigades vaudoises, commandées
par le colonel Guiger de Prangins, se préparèrent à gagner Genève et la
frontière française. On vit quelques foudres de guerre parader à Vevey.
    Le lieutenant Métaz, rappelé avec l’élite, rencontra, rue de
Lausanne, des citoyens en armes qui se rendaient chez le coutelier François
Mayor pour faire affûter leur sabre. Il vit aussi des épouses en larmes
escorter les mousquetaires de la première compagnie, en route pour Lausanne, tandis
que d’autres miliciens, sans doute moins pressés d’en découdre, buvaient le
coup de l’étrier place du Marché, en attendant l’ordre de départ.
    Les Veveysans ignoraient encore la vanité de cette agitation
guerrière. Dès le 20 septembre, en effet, le prince Louis Napoléon avait
adressé une lettre au Petit Conseil et au Conseil d’État de Thurgovie, dans
laquelle il déclarait qu’il quitterait de son propre mouvement le territoire de
la Confédération, dès qu’il aurait reçu ses passeports pour l’Angleterre, via l’Allemagne.
Cela, afin de prévenir des collisions qui pourraient résulter de la demande de
son renvoi adressée à la Suisse par le gouvernement français. Le prince
concluait ainsi son message : « En quittant, aujourd’hui
volontairement, le seul pays où j’avais trouvé, en Europe, appui et protection,
en m’éloignant des lieux qui m’étaient devenus chers à tant de titres, j’espère
prouver au peuple suisse que j’étais digne des marques d’estime et d’affection
qu’il m’a prodiguées. Je n’oublierai jamais la noble conduite des cantons qui
se sont prononcés si courageusement en ma faveur et, surtout, la généreuse
protection que m’a accordée le canton de Thurgovie restera profondément gravée
dans mon cœur. »
    « Il semble, publia la Gazette de Lausanne du 2 octobre,
que ce qui a déterminé la décision du prince est l’information reçue de Paris
qu’en cas de refus d’accéder à la demande de la France, l’occupation immédiate
d’une partie de la Suisse était décidée et qu’à cet effet toutes les mesures
étaient prises, de concert avec toutes les puissances. »
    Le 5 octobre, le correspondant parisien de la Gazette rapportait : « Le Journal des débats s’empresse, ce matin, de
déclarer au nom du ministère que l’affaire suisse est terminée, que le cabinet
a obtenu ce qu’il demandait et que la retraite définitive de Louis Napoléon Bonaparte
lui suffit. »
    Ainsi, les miliciens helvètes regagnèrent leurs foyers, sans
avoir à tirer leur sabre du fourreau. Qu’importe, on s’était senti bien
ensemble, entre confédérés prêts à mourir pour Mère Helvétie, que la France
avait toujours été autorisée à courtiser, jamais à étreindre.
    La poussée de fièvre patriotique vécue par la Suisse au
cours de l’automne prit fin, à Vevey, dans le temps des vendanges. Pour Axel
Métaz, la récolte fut, cette année-là, médiocre, bien que ses vignes, comme la
plupart de celles de Lavaux, eussent été épargnées par le pourridié, jusque-là
contenu dans le vignoble de la Côte.
    Les vignerons savent que la vigne a parfois de ces
lassitudes, que n’expliquent pas toujours les fluctuations climatiques. Simon
Blanchod, le défunt parrain d’Axel, pieux huguenot, supposait que le Seigneur
entendait ainsi rappeler aux vignerons qu’en dépit de leurs soins, la nature, obéissant
à son créateur, se montrait tantôt généreuse et docile, tantôt parcimonieuse et
rétive. « Attention, la vigne est confuse », répétait Simon Blanchod,
citant le prophète Joël. Axel, en bon Vaudois, savait combien est aléatoire la
fortune du vigneron. Il admettait que la vigne, déjouant malicieusement les
prévisions des plus expérimentés,

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