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Romandie

Romandie

Titel: Romandie Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
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épouse ne peut plus remplir !
On ne saurait être plus galant homme !
    Axel, conscient d’être allé trop loin, surtout trop vite, vida
son verre et attaqua, sans un mot, les filets de féra qu’on venait de servir. Marthe
Bovey finit par l’imiter et tous deux respectèrent un silence pénible, jusqu’à
ce que les assiettes soient nettes.
    Axel fit signe au sommelier de remplir les verres. Il but
posément, déclara l’yvorne de bon lignage et s’efforça au naturel.
    — Vous eussiez sans doute préféré que je débite des
fadaises rendant tout le repas, que je vous adresse demain une lettre sirupeuse,
que je vous assure de la pureté de mes sentiments, alors que nous savons, l’un
et l’autre, où en viennent toujours un homme et une femme, privés de saines
étreintes et qui se plaisent à être ensemble. Vous m’avez reproché tout à l’heure
de n’être pas charitable à votre égard ! Je le suis, au contraire, en
étant franc, loyal, direct. En vous disant, sans déclarations patelines à la
Tartufe : « Vous êtes belle, vous êtes désirable, vous êtes libre, nous
sommes l’un et l’autre sevrés des plaisirs de l’amour. Soyons amants, madame et… »
    — Et n’en parlons plus ! acheva Marthe, sèchement.
    Après une hésitation elle renonça à quitter la table par
crainte du scandale.
    — N’en parlons plus, en effet, puisque je ne suis pas
agréé ! Oubliez ma honteuse, ma triviale proposition de mâle en rut, mais
que cela ne vous empêche pas de commander une meringue glacée, spécialité de la
maison, conclut Axel, dont la désinvolture apparente cachait autant de gêne que
de colère.
    Le repas s’acheva dans la contrainte et M. Métaz
reconduisit M me  Bovey à son hôtel, sans qu’aucun des deux
prononçât une parole.
    Devant le perron, Axel, redevenu cérémonieux, baisa la main
de la veuve, avec un sourire plus ironique que contrit.
    — Je ne pense pas que nous ayons jamais l’occasion de
nous revoir tête à tête. Je quitterai Yverdon demain, madame.
    Désemparée par l’épilogue de cette soirée, qu’elle avait
imaginée romantique, car elle eût accepté une cour de bon aloi, sans préjuger
de l’avenir, elle demeura un instant les bras le long du corps. Puis, des
curistes approchant, elle se résolut à l’adieu :
    — Vous avez tout gâché, murmura-t-elle, les yeux embués
de larmes, avant de gravir le perron sans se retourner.
    Furieux contre lui-même, honteux, conscient de s’être
inutilement avili, il fouetta son cheval, traversa la ville au grand galop et
demanda au portier de l’hôtel de lui faire monter une bouteille de son meilleur
vin blanc et de le réveiller à l’aube. « C’est Vuippens qui a raison. Le
seul exutoire, dans mon cas, est l’amour vénal », conclut-il, dès le
troisième verre.
     
    C’est à Vuippens qu’il conta, trois jours plus tard, ce qu’il
nomma avec amertume la défaite d’Yverdon. Axel n’omit aucun détail et le
médecin se retint de rire.
    — Tu t’es conduit comme un imbécile et un goujat. Tu
devrais cependant connaître un peu mieux les femmes, Axel ! Même les plus
faciles, les plus dévergondées, les moins enclines à la romance, exigent que
nous enveloppions le désir d’un voile sentimental. Sans être dupes, elles
veulent entendre les mots qui subliment l’acte et font croire à l’engagement du
cœur. Pour certaines, l’étape obligée du conter fleurette, du marivaudage, même
hypocrite et niais, est la dernière expression de pudeurs défuntes. Elles ne
cèdent pas au mâle mais au soupirant. Et toi, tu vas avec la brutalité d’un
soudard, héritage du sang Fontsalte, sans doute, demander tout de go à une
veuve de la bonne société, dont tu supposes, sans preuves, qu’elle supporte
aussi mal que toi l’absence de copulation, de te livrer son corps comme tu lui
proposerais un travail dans tes vignes ! Une maîtresse ne s’embauche pas
comme une effeuilleuse, Axel.
    — La parade nuptiale n’est pas mon genre. Et puis, je
trouve que c’est tromper une femme que lui donner à penser qu’on est subitement
amoureux d’elle, qu’on est séduit par son intelligence, ses goûts littéraires
ou artistiques, sa distinction, alors qu’on ne souhaite que la mettre dans son
lit au plus tôt ! Elle devrait comprendre et dire, avec autant de
franchise, si elle accepte la partie ou non ! dit Axel, s’animant.
    — Apparemment, ta veuve rousse l’a refusée, ce

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