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Romandie

Romandie

Titel: Romandie Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
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demeurèrent un moment silencieux. Le médecin,
se rappelant l’épouvantable vision, admira le sang-froid avec lequel son ami accueillait
la stupéfiante révélation. Axel, se refusant à imaginer la laideur décrite par
le médecin, avait beaucoup de questions à poser.
    — Mais comment vit-elle ?
    — Elle ne manque de rien. Le peu que j’ai vu de sa
résidence m’a paru d’un luxe et d’un confort inouïs. Elle dispose, je crois, d’une
fortune considérable et reste la reine invisible d’un mystérieux royaume perdu
dans les Carpates. La diaspora tsigane, tu le sais mieux que moi, est répandue
à travers toute l’Europe. Adriana a succédé à sa mère, que tu as connue à
Koriska.
    — Oui. Zichy de Tilna, le Bulebassa.
    — C’est ça. Les Russes, qui avaient anéanti la province,
en ont été chassés et la forteresse incendiée, qui t’avait si fort impressionné,
est, depuis peu, reconstruite. Adriana va s’y retirer. Seuls, dit-elle, les
gens de sa tribu posséderaient, à l’entendre, le moyen, sinon de lui restituer
un visage, du moins de lui assurer une fin supportable. C’est à Koriska qu’elle
veut mourir. Et, à mon avis, elle n’aura pas longtemps à attendre. La magie
tsigane, foutaise d’un autre âge, n’en pourra pas plus pour elle que notre
science médicale. En attendant, elle est servie par d’étranges domestiques, vêtus
de bure, et gère des affaires dont nos banquiers genevois, affirme Zélia, ne
peuvent soupçonner l’importance. Et puis ta demi-sœur fait de la musique. J’ai
vu chez elle des orgues gigantesques, qu’envieraient toutes les cathédrales. J’ai
même cru comprendre qu’elle compose des hymnes pour une chorale à sa dévotion.
    — Et, tout cela, dans le Valais ? demanda Axel, incrédule.
    — Dans le Valais ou ailleurs ! J’ai voyagé les
yeux bandés et de nuit, sous bonne garde des amis de Zélia, qui ne sont guère
accommodants. J’ai pensé au Valais, non pas à cause de la durée du voyage, qui
m’a paru interminable, mais en devinant que la berline empruntait des routes
pentues, de mauvais chemins et, aussi, à cause de l’accent de quelques
personnes que j’ai vaguement entendues parler quand nous changions de chevaux aux
relais. J’ai compté une demi-douzaine de relais, c’est bien plus qu’il n’en
faut pour aller jusqu’au Grand-Saint-Bernard. Mais peut-être a-t-on voulu m’égarer.
    — Les Zigeuner sont de rusés compères, Louis. On a
aussi bien pu te conduire en Savoie, en Bourgogne ou sur le Salève, commenta
Axel.
    — Peut-être, mais la légèreté et la fraîcheur de l’air
m’ont rappelé le climat des montagnes où nous allons chasser le chamois. Si je
crois m’être trouvé dans un coin perdu du Valais, je n’en mettrais pas ma main
au feu, Axel. Et puis, j’ai décidé de ne pas chercher à en savoir plus. Cette
malheureuse a droit au silence et à l’oubli du monde.
    Une autre question, qu’Axel aurait d’abord posée s’il n’avait
été aussi troublé, vint aux lèvres du Vaudois :
    — Mais comment a-t-elle échappé à la pendaison, à
Londres, en 1831 ? Et qui avons-nous inhumé dans le caveau des Fontsalte, deux
ans plus tard ? demanda-t-il, prenant soudain conscience de l’énormité de
la tromperie dont Blaise et lui avaient été victimes.
    — C’est l’autre partie, la première, en fait, du
mystère de la survie d’Adriana. Tu as vu sa mère à Koriska, m’as-tu raconté
autrefois. Tu sais que Blaise est son père et le tien. Mais t’es-tu jamais
demandé qui était son grand-père ?
    — En vérité, la question ne m’est jamais venue à l’esprit,
reconnut Axel.
    — Eh bien, le vrai grand-père d’Adriana – pas le
mari gitan de la mère de Zichy – était un duc, apparenté à la famille
royale d’Angleterre. Un grand voyageur, sorte d’explorateur, m’a-t-on dit, qui,
dans les Carpates, avait rencontré une princesse tsigane, la mère de la
châtelaine de Koriska que tu as connue. Or, d’après Zélia, au cours du procès
en espionnage des Tsiganes, une copie de certains documents, irréfutables et compromettants,
fut remise aux descendants de ce gentleman, dont l’un appartenait alors au
cabinet britannique. Ces informations devaient être portées à la connaissance
du roi, de la cour et du public, si Adriana n’était pas laissée en vie et
rendue à la liberté, d’une façon ou de l’autre.
    — Mais Lazlo assista, libre et d’assez

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