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Romandie

Romandie

Titel: Romandie Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
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l’asepsie, de ne pas craindre le savon
et la brosse à ongles chaque fois qu’elles se trouvaient en présence d’une
accouchée [52]  ».
Cela, pour éviter la fièvre puerpérale. Elles devaient, aussi, posséder des
notions d’anatomie.
    Les vieilles matrones qui, depuis le Moyen Âge, présidaient
aux naissances par tradition pastorale, avaient vu sans plaisir les jeunes
professionnelles diplômées prendre leur place, tandis que les autorités
poursuivaient en justice les empiristes qui s’obstinaient à prolonger une
activité devenue délit de droit commun. Équipées d’une trousse médicale
complète, offerte par leur commune, et percevant des honoraires, les
sages-femmes patentées avaient déjà conservé à la vie de nombreux bébés et
plusieurs mères, que les matrones eussent abandonnés au trépas.
    Quand le docteur Vuippens se présenta, trempé comme un barbet,
la sage-femme se préparait à lier puis à couper le cordon ombilical d’un long
bébé brun, qu’Élise avait mis au monde sans une plainte.
    Le médecin prit l’enfant par les pieds, lui donna une tape
sur les fesses pour provoquer le premier cri de l’entrée dans la vie. Il
félicita Élise, baisa son front moite et sortit de la chambre pour appeler le
nouveau père qui, à la demande de la sage-femme, attendait dans le couloir que
tout fût accompli.
    — Eh ! je suis arrivé un peu tard, mon vieux !
Te voilà papa d’un garçon qui a l’air d’un chat écorché mais qui a tout ce qu’il
faut pour faire un homme. Viens le voir, dit-il à Axel.
    Ce dernier, une fois de plus, étonna la sage-femme en s’agenouillant
près du lit pour embrasser sa femme, la remercier du don qu’elle venait de lui
faire, avant de jeter un bref regard au bébé dans l’attente de sa première toilette.
    — Voici votre fils, monsieur. Je puis vous dire qu’il
sera grand et fort, voyez ses pieds et ses mains. Et ce duvet brun fait espérer
une belle chevelure, dit la sage-femme, flatteuse.
    — Peut-être aura-t-il aussi le regard vairon. Mais nous
ne le saurons que plus tard, n’est-ce pas ? dit Axel d’un ton détaché en
se tournant vers Vuippens.
    — Pas avant six ou huit semaines en tout cas. Si l’on
en croit les sommités en ophtalmologie, cette anomalie est héréditaire – tu
en sais quelque chose – mais seul le premier enfant d’un couple dont un
membre est affligé de ce qu’on nomme savamment une hétérochromie, peut
présenter à son tour ce regard bicolore… qui fait ton charme ! commenta
Vuippens.
    — Bon. Mais Élise ne court-elle aucun danger ? L’épidémie
de dysenterie de cet été n’est, paraît-il, pas terminée. Ça ressemble tellement
au choléra, remarqua Axel.
    Il conservait un douloureux souvenir de l’épidémie de 1832
qui avait emporté, avec dix-huit mille Parisiens, Juliane Laviron et son frère.
    — Le peuple est ignare et fait là une confusion
alarmante et stupide. Si la propagation de la dysenterie est aussi une affaire d’hygiène,
physique et alimentaire, par temps de forte chaleur, elle se soigne, s’enraie
aisément et ne tue que rarement. Je soigne encore quelques cas dans le vignoble
de Lavaux mais ce sont les derniers. Nous avons compté jusqu’à mille trois
cents dysentériques en août et c’est pourquoi je vous obligeais à manger des
légumes verts et des fruits, même s’ils étaient rares et chers à cause de la
sécheresse. C’est actuellement le meilleur palliatif.
    — Bon. Mais j’ai entendu parler d’autres maux qui
menacent les accouchées, reprit Métaz inquiet.
    Vuippens saisit le bras de son ami et sourit à la sage-femme
qui, bien qu’occupée aux soins du nouveau-né, suivait la conversation.
    — Élise va très bien. Pas d’hémorragie, pas de risque d’éclampsie,
ce que nous craignons toujours chez les primipares d’une nervosité excessive. Avec
une bonne hygiène, et notre sage-femme s’y entend, Élise est sur pied dans
trois ou quatre jours. En attendant, laissons la maman se reposer. Qu’on lui
donne de la tisane de tilleul, dit le médecin.
    — Descendons boire un verre à la santé de mon garçon et
toi, viens te sécher, proposa Axel, tandis que l’orage redoublait et que les
grêlons cinglaient les persiennes.
    Après que le médecin eut confié ses vêtements mouillés à
Lazlo, les deux amis s’installèrent au salon, près de la cheminée où flambaient
en crépitant des sarments de vigne.
    — Fichu temps ! Ton

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