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Sachso

Sachso

Titel: Sachso Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Amicale D'Oranienburg-Sachsenhausen
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bonnes places à Klinker comme à Sachsenhausen. Un Vorarbeiter à triangle rouge, Witzmann, un communiste allemand, qui porte un matricule à deux chiffres signifiant qu’il est détenu politique depuis 1933, s’adresse alors à Antoine Blelly. Il sait qu’il est Alsacien, qu’il parle l’allemand. « Sais-tu taper à la machine ? »
    — « Très peu » – « Cela ne fait rien. » Il y a une place libre au « service de la construction », le Bauabteilung Büro, et je ne veux pas qu’un “vert” la prenne ». La mort s’éloigne d’Antoine Blelly ce jour-là. Il dispose d’un bureau chauffé et tape à longueur de journée de monotones Frachtbriefe (lettres de camionnage). Ce poste lui sauve encore la vie le 10 avril 1945, lors du bombardement de Klinker. Au lieu d’être dans sa baraque, qui est anéantie, il sort vivant de la salle de tirage des calques, bétonnée et en sous-sol, où il s’est réfugié.
    Encore une contradiction paradoxale de Klinker : à Noël 1944, un sapin est dressé sur la place d’appel. Cet arbre, symbole de la paix entre les hommes, semble narguer les silhouettes mal réveillées, transies, qui se hâtent pour le rassemblement en traînant leurs socques de bois dans la neige, entourées par une nuit hostile bien loin de la « douce nuit » du chant de Noël. C’est au pied de ce sapin que se déroule un interminable appel provoqué par la tentative d’évasion de deux Russes travaillant au kommando de la forêt. C’est sous ses branches qu’ils subissent tous les deux la punition des vingt-cinq coups !
    Les détenus apprécient davantage le menu amélioré distribué pour Noël que l’arbre de l’ Appelplatz. Quelle aubaine que ce chou rouge, que cette gamelle de goulash accompagnée d’une autre de pommes de terre bouillies, que ce tonnelet de bière brune sucrée – la « bière caramel » – distribué dans chaque aile de block !
    Fin 1944, début 1945, les convois d’entrants se succèdent à Klinker. Ils viennent des camps de l’est repliés devant l’avance de l’armée rouge. Ce sont des juifs du ghetto de Budapest, parmi lesquels un personnage marquant échoue au block 2, un dessinateur de l’agence américaine Associated Press, qui a fait partie d’une expédition au Tibet. Pour une cigarette, il fait le portrait de chacun.
    Klinker, dont la mauvaise réputation n’est plus à faire, reçoit chaque jour, durant cet hiver 1944-1945, un détachement spécial du kommando Heinkel, composé de détenus repérés pour leur manque d’ardeur à l’ouvrage. Alex Le Bihan, Georges Roux, Roger Guérin, Armand Clusan, tous de la kolonne 6 du hall 2 de Heinkel, sont du nombre, avec bien d’autres pris dans les différents halls. À leurs douze heures de travail en équipe à Klinker, avec changement jour-nuit toutes les deux semaines, s’ajoutent désormais la durée et les contraintes quotidiennes du trajet Heinkel-Klinker-Heinkel. Les détenus, après un comptage supplémentaire, doivent monter au pas de course, par une passerelle, à trois cents par wagon, dans des voitures à voyageurs désaffectées dont tous les sièges sont enlevés, les ouvertures bouchées par des plaques de tôle et l’accès limité à une seule porte conservée en bout. Les Vorarbeiter se réservent l’unique lucarne grillagée par laquelle ils peuvent apercevoir, en passant, un camp de femmes. Les dix-sept kilomètres du trajet sont parcourus en une heure environ. Entre le 1 er  janvier 1945 et l’évacuation du 21 avril, pas une seule nuit ne se passe sans alerte. Si bien que l’équipe de jour rentrée vers 21 heures ne se couche guère avant minuit pour se relever à 3 h 15. Et que l’équipe de nuit, qui ne peut que se réfugier sous les établis en cas d’alarme, est doublement pénalisée le dimanche. Debout depuis le samedi à 15 h 15, après les multiples contrôles du dimanche matin et l’appel de 13 heures suivi de la soupe, elle ne retrouve son lit que le lundi matin vers 9 heures…
    Ce régime démentiel n’a pourtant pas raison de Marcel Le Bastard, arrivé à Sachsenhausen et à Heinkel en novembre 1944 avec les rescapés de la forteresse de Sonnenburg. Dans son atelier de Klinker, il se lie d’amitié avec un jeune Russe, soudeur à l’arc, qui officie dans une pièce isolée. Sous son établi, il a aménagé une étroite cachette où Marcel Le Bastard peut venir de temps en temps se reposer et sombrer dans un

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