Sachso
hongrois. À Gmünden, nous quittons notre train pour être internés au kommando d’Ebensee, dépendant de Mauthausen. Peu de temps après, des éléments de l’armée Patton nous délivrent. Il était temps… »
Dernière surprise pour Maurice Bonjour : à Ebensee, dans la fièvre de la libération, il retrouve un ancien de Sachsenhausen, un Français que ses camarades croyaient mort. À la suite d’une affaire de sabotage de moteurs, il avait été matraqué et à moitié massacré devant tout le block rassemblé. En réalité, Gauchet, car c’est de lui qu’il s’agit, avait ensuite été transféré à Mauthausen le 25 octobre 1944 (n° 108 431), puis affecté au kommando de Melk, qui, à la fin de la guerre, fut replié sur Ebensee.
LES FEMMES DE SACHSENHAUSEN
Aussi extraordinaire que cela puisse paraître dans le système concentrationnaire nazi où la séparation des sexes est de rigueur, des femmes déportées – et parmi elles des Françaises – sont immatriculées au camp d’hommes d’Oranienburg-Sachsenhausen durant la dernière année de guerre. C’est au printemps de 1944 que, pour leurs besoins croissants de main-d’œuvre dans les usines de la région berlinoise, les nazis commencent à faire appel à des détenues, essentiellement du camp de Ravensbruck.
Elles sont isolées dans des kommandos extérieurs qui sont autant de petits camps à part, près des usines où elles sont condamnées à travailler. Il y en a une quinzaine, tous rattachés administrativement au grand camp d’Oranienburg-Sachsenhausen, où une liste spéciale de numéros matricules est ouverte pour cet effectif féminin, qui est de dix mille environ au début de 1945. Les principaux sont : la fabrique de masques à gaz Auer d’Oranienburg (2 000 femmes), Siemens (1 000 femmes) qui a sa propre cité Siemensstadt à Berlin-Haselhorst, Daimler-Benz (1 100 femmes) à Berlin-Genshagen, A. E. G.(700 femmes) à Berlin-Oberspree, Arado (1200 femmes) à Wittenberg, Krupp (500 femmes) à Berlin-Neukolln, les usines de Berlin-Spandau (1 100 femmes), Argus (800 femmes) à Berlin-Schönholz, Dynamit-A. G. (500 femmes) à Glowen, Pertrix, etc.
Dans ces kommandos, où l’organisation particulière des camps de femmes est maintenue avec les surveillantes S. S. (les Aufseherinnen) et les détenues chefs de blocks (les Blockowas), les Françaises se retrouvent surtout aux usines Siemens et Auer.
Le 26 août 1944, sur les neuf cents déportées de Ravensbruck arrivant à Siemensstadt, soixante-dix Françaises troquent les matricules « 51 000 » de leur premier camp pour des « 1 000 » de Sachsenhausen. Odette Foirest reçoit le numéro 1 095, Renée Dray (alors Renée Sihol) le 1 387, Catherine Ammar le 1 104… Un mois plus tard, le 20 septembre 1944, Denise Manquillet reçoit le numéro 7 126 au kommando Auer d’Oranienburg. Un des matricules les plus élevés attribués à des Françaises de Sachsenhausen est le 14 015 d’Élisabeth Lemble…
Ce sont des résistantes, des patriotes à l’égal des Français déjà emprisonnés et déportés, leurs camarades de combat, leurs frères, leurs maris parfois. Elles ont suivi presque toutes le même itinéraire : une prison de province ou de Paris, le fort de Romainville, le camp de transit de Neue-Bremm près de Sarrebruck, puis Ravensbruck.
CHEZ SIEMENS. Le 26 août 1944, quand Catherine Ammar termine son périple à Siemensstadt, dans la banlieue ouest de Berlin, et découvre le kommando de Gartenfeld, elle ignore que son mari, Raymond Ammar, est depuis un an et demi détenu au Bunker de Sachsenhausen dans la cellule n° 14, qu’il ne quitte qu’en novembre 1944 pour un block du grand camp, puis une Baubrigade et, en février 1945, le camp de Bergen-Belsen, où il meurt. Mais, en ce moment, comme lui, Catherine Ammar (connue dans la Résistance sous le nom de Catherine Le Meur et au camp sous celui de Catherine Duhamel) veut faire face : « Une haie de militaires allemands, hommes et femmes, nous encadre… Des tréteaux sont installés : derrière, des civils sont assis, graves ou goguenards, consultant des listes et nous examinant à tour de rôle. Devant certains, nous déclinons nos titres et qualités ; à d’autres, nous montrons nos mains, nos yeux ou nos dents, selon leur curiosité.
« Nous sommes à la foire, mais il n’y a pas de veaux à deux têtes : nous sommes de belles filles saines de dix-huit à
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