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Sachso

Sachso

Titel: Sachso Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Amicale D'Oranienburg-Sachsenhausen
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trente-six hommes par wagon, avec des châlits superposés à chaque extrémité, une table, deux bancs, un râtelier pour les gamelles, une tinette et, fort heureusement, un poêle. Les gardiens et leurs chefs disposent, eux, de wagons confortables.
    Maurice Bonjour a vite fait de vérifier que le convoi roule vers l’ouest : « Après deux jours de voyage, nous sommes à Cologne, bombardée et sous la neige. Très rapidement, nous comprenons ce qu’on attend de nous : remettre en état les voies détruites. Il nous faut refaire le ballast en comblant les trous de bombes, prendre des rails en bon état dans le voisinage, récupérer des traverses et les remettre en place, tasser les cailloux, etc., tout cela dans la neige et avec rien dans l’estomac. Le coup est dur mais, à Noël 1944, nous savons que la guerre est dans sa phase finale : il faut tenir et se méfier.
    « Après Cologne, notre train descend vers Mayence. Aux arrêts, il se gare le mieux possible pour ne pas servir de cible aux avions. Mais, par deux fois, nous sommes mitraillés : des wagons brûlent, des camarades meurent. D’autres alertes se passent, des heures durant assis dans la neige ou bien, comme à Bad Munster, attaqué par les avions américains, dans la cave pleine d’eau d’un hôtel. Ce soir-là, je ramène Ammar qui ne peut plus marcher. Avec Émile, le Marseillais, nous le tirons sur la neige durcie avec nos deux pelles croisées transformées en traîneau… »
    Finalement, le train de la Baubrigade n° XII s’immobilise à environ deux kilomètres de Bad Kreuznach, sur la voie ferrée menant à Bingen.
    C’est de là que les équipes sont envoyées sur les lignes des environs, à pied. La durée du travail est irrégulière parce que conditionnée par les raids aériens. Elle peut être de huit, dix, voire vingt-quatre heures d’affilée. Charrier traverses et rails, bourrer le ballast devient de plus en plus éprouvant pour les hommes dont les chances de survie dépendent pour l’essentiel des denrées volées au péril de leur vie pendant les bombardements, alors que les S. S. se mettent à l’abri. Jour après jour, des morts sont enterrés dans une fosse commune creusée dans le talus dominant la voie, à proximité du village de Bretzenheim. Mais la cruauté des S. S. ne se relâche pas. En traversant la gare des marchandises de Bad Kreuznach, un Russe est abattu parce qu’il quitte les rangs pour ramasser une pomme tombée d’un wagon.
    En janvier et février 1945, la Baubrigade n° XII accompagne la retraite des troupes allemandes. Son train se met à « zurucker », comme disent avec satisfaction les détenus en utilisant un mot de l’argot du camp forgé à partir de zuruck (reculer).
    Maurice Bonjour et ses camarades se retrouvent d’abord à Grossen Bussek : « Nous sommes stationnés en pleine gare. Le gros des détenus travaille sur la voie à quelques kilomètres ; un groupe répare les fenêtres et les portes de la gare ; avec deux compagnons, je lave le linge des morts et nous nous “organisons” pour le ravitaillement, objectif n° 1… Un jour, un train de voyageurs à peine arrêté est mitraillé par des Lockheed Lightning… Nous recevons des éclaboussures. Un détenu italien est pendu avec une ceinture pour avoir tenté de s’évader. Blessé d’une balle à la tête, à demi inconscient, il essaie avec ses deux mains de se détacher : c’est épouvantable… Ensuite notre train “zurucke” par Francfort, Erfurt, Leipzig, Dresde, Usté et Pilsen…
    « À Pilsen, la gare de marchandise est dans un état lamentable. Des trous partout, des wagons brûlés, d’autres à peu près en bon état, des débris humains, et nous en train de rétablir une voie de nuit ou de jour suivant les circonstances… Une chance, le “protectorat” de Bohême-Moravie bénéficie d’un ravitaillement exceptionnel. Les wagons regorgent de tout : boîtes de cinquante sardines à l’huile, pains de margarine, sucre, confitures, biscuits, lait en boîte, etc. Malgré la surveillance, on arrive à se ravitailler en prenant de grands risques. Un soir, je ramène sur mon dos un camarade du Havre qui s’est blessé en sautant du haut d’un wagon. Les poches pleines de biscuits, je le porte jusqu’à notre train, stimulé par la bonne odeur qui me monte jusqu’au nez…
    « Au début de mai 1945, nous sommes dirigés sur Linz, tout en travaillant sous la neige en compagnie de prisonniers

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