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Sachso

Sachso

Titel: Sachso Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Amicale D'Oranienburg-Sachsenhausen
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qui déteste la soupe de rutabagas, n’en mange jamais. Il la distribue autour de lui. À ce régime, il ne risque pas de tenir longtemps. Atteint de dysenterie, il est conduit au Revier, où il est placé près d’une fenêtre. Tous les soirs, après la sortie de l’usine, nous allons le voir et, par signes, au travers de la vitre, nous conversons. Dans sa courte agonie, Morel ne sera jamais seul. Tout autour de lui, il y aura ce magnifique parterre de fleurs qui lui fait garder son beau sourire. Chaque jour qui passe l’épuise davantage ; bientôt seule sa tête peut bouger. Un soir, le lit est vide. Morel est mort… »
    Force est bien d’admettre que les Morel relèvent de l’exception qui force à la fois l’admiration et la tendresse. La démarche commune, observée partout, celle imposée par les viscères, c’est de s’ingénier à calmer la faim, alors que la faim est omniprésente et que les moyens de la réduire, pratiquement inexistants, sont convoités par le plus grand nombre.
    Dans les groupes de Français, la chasse est pourtant faite aux « mangeurs de pluches » qui pensent se sustenter en ingurgitant les épluchures de pommes de terre mendiées autour d’eux ou récupérées dans les déchets. Ne savent-ils pas que ces peaux contiennent une matière toxique ? Par contre, il est recommandé de mastiquer des feuilles de bouleau en cas d’œdème, du bois brûlé en cas de dysenterie, mais il faut beaucoup de conviction pour faire partager aux étrangers, aux Russes notamment, notre goût pour les pissenlits trouvés parfois en dehors du camp.
    L’appât d’une ration supplémentaire, d’un « extra », est enfin utilisé par les S. S. et les industriels pour tenter d’obtenir un meilleur rendement de la main-d’œuvre déportée. Des cantines fonctionnent. Avec les Prämienschein, sortes de bons points distribués par les Vorarbeiter et marqués en pfennigs et en marks, il est possible de se procurer diverses choses.
    Il y a de la bière très légère, caramélisée, de la Kartoffel-salat (morceaux de pommes de terre et de betterave rouge assaisonnés d’un ersatz de vinaigrette), du fromage blanc ayant la consistance du plâtre, de la moutarde atrocement salée qu’on étale en confiture sur le pain ou encore une matière indéfinissable contenue dans un tube en papier… Il y a du tabac, principalement du makorka venant de Pologne et de la Russie occupées. Empaqueté dans un grossier papier d’emballage, il s’agit, non pas des feuilles, mais des tiges du tabac coupées en petits morceaux ! Pour le rouler, pas de papier spécial ; tout est bon, du journal aux pages de cahier et au papier rugueux des sacs de ciment. Quelquefois sont mises en ventes des cigarettes, le plus souvent yougoslaves (les « briga » et les « rama »), que les Russes appellent indifféremment des « papiross » car il n’y a que peu de tabac au bout d’un tube en carton.
     
     
LETTRES ET COLIS DE FRANCE
    Les richesses, si l’on peut dire, de la cantine sont loin de valoir celles qui parviennent épisodiquement de France sous forme de lettres et de colis. Dans un but sans doute plus utilitaire qu’humanitaire, car une grande partie des colis sera détournée par les S. S., les déportés des pays occupés (à l’exclusion des Russes) ont l’autorisation d’écrire à leurs proches parents : sur une carte-lettre spéciale de seize lignes d’un format de 13,5 cm sur 21 cm.
    Sous l’emplacement réservé à la date, toujours apposée par l’administration du camp, figure le texte suivant, imprimé en gothique : « Le jour de la libération ne peut encore être fixé ; les visites au camp sont interdites ; toute question sur ces objets est inutile. » Puis vient en en-tête sur toute la largeur de la page un extrait du règlement du camp :
    « Il est permis à chaque détenu d’envoyer ou de recevoir deux lettres ou cartes postales par mois. Chaque lettre sera soigneusement examinée par la censure et ne doit pas comporter plus de quatre pages de quinze lignes de présentation claire et lisible. Les envois d’argent ne sont admis que sous forme de mandat-poste portant seulement l’adresse du destinataire : nom, prénoms, date de naissance et matricule de détention à l’exclusion de toute autre communication. L’introduction d’argent, de photos ou d’images dans les lettres est interdite. Les réclamations doivent être adressées par voie postale et ne

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