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Sarah

Sarah

Titel: Sarah Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Halter,Marek
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de l’homme qui devait
bientôt partager sa couche.
    De l’autre côté du paravent, dans la foule
des invités invisibles, le son des flûtes s’éleva. Doux, tremblant, mélodieux.
La musique enveloppa Saraï avec tendresse. Elle s’enroulait autour de son cœur,
montait dans sa poitrine, l’apaisant ainsi qu’une caresse. Toutes les pensées,
qui, depuis le matin, avaient durci son corps s’évanouirent. Les muscles de ses
épaules et son ventre se dénouèrent. Elle se sentit calme, sûre d’elle-même.
Prête à accomplir ce qu’elle devait accomplir.
    Et tout commença. Et tout ne fut pour elle
qu’un seul et même mouvement.
    Les chanteuses, derrière le paravent,
accompagnèrent les flûtes.
    Lorsque pour le taureau sauvage, je me
serai baignée,
    Lorsqu’avec de l’ambre j’aurai enduit ma
bouche
    Ichbi Sum-Usur parcourut l’estrade,
traversant la fumée des copeaux de cèdre, la faisant tournoyer autour de lui.
    Lorsqu’avec du khôl j’aurai peint mes
yeux
    D’une secousse Égimé la poussa vers son
père. Celui-ci la conduisit au cœur de la fumée, faisant face aux ancêtres, les
remerciant, les félicitant, tandis que les chanteuses, accompagnées par les
voix de tous les invités, entamaient le chant nuptial :
    Lorsque je me serai parée pour lui,
Lorsque mes reins auront été modelés entre ses mains
    Ichbi Sum-Usur saisit alors les cordons de
sa ceinture d’épouse et les dénoua. Il tira sur les pans de la toge, les fit
glisser sur ses épaules. Et elle fut nue.
    Lorsqu’avec du lait et de la crème il
aura lissé mes cuisses
    La main sur ses reins, son père la poussa
dans la vasque d’onguents. Il prit un bol de bois qu’une esclave lui tendait.
Puisant dans la vasque, il l’emplit d’eau parfumée. Il leva haut la main
au-dessus de Saraï avant de laisser couler l’eau sur sa poitrine. Elle plia un
peu les genoux alors que l’eau froide coulait sur son ventre et jusqu’à la
fente de son sexe.
    Le chant devenait de plus en plus fervent.
Les tambours maintenant en soulignaient les mots :
    Lorsque sur ma vulve, il aura posé sa
main, Lorsque, comme son bateau noir, il en aura ouvert la crête…
    Elle sut sans même le voir qu’il était là,
derrière elle. Lui, l’époux. Elle vit le bol de bois quitter la main de son
père pour passer dans celle de cet homme, et elle crut que son cœur allait
éclater.
    À son tour, l’époux s’inclina pour remplir
le bol. Son épaule nue frôla la hanche de Saraï. Elle respira l’odeur violente
de sa chevelure huilée de myrte. Les doigts qui allaient la toucher se
reflétèrent dans l’eau parfumée.
    Elle bondit alors hors de la vasque. Toute
dégoulinante d’eau, elle attrapa sa tunique sur le sol et courut jusqu’à
l’extrémité de l’estrade où se tenaient les femmes. Égimé fut la seule à se
mettre en travers de son chemin. Saraï la repoussa sans ménagement. Elle
entendit le bruit d’une chute et des cris. Elle courut à travers une pièce,
puis une autre. Les chants avaient cessé. Elle vit le visage stupéfait d’une
servante et courut encore jusqu’au jardin. Elle savait par où passer : par
les canaux et les bassins. Elle pouvait sauter de l’un à l’autre, atteindre les
rues de la ville sous les murs du palais.
    *
    * *
    Elle allait droit devant elle, sans autre
but que de fuir le plus loin possible. Entre les hauts murs de brique, les rues
étaient étroites et ombreuses, parfois juste assez larges pour laisser passer
trois ou quatre personnes de front ou un âne bâté. Sous le regard ébahi des
passants, elle se glissa sans ralentir sa course entre les sacs et les paniers
des vendeurs ambulants.
    Hors d’haleine, elle parvint enfin au grand
canal qui longeait le mur d’enceinte de la ville royale d’Ur. Par mille
ramifications, il distribuait l’eau de l’Euphrate dans les temples, les palais
royaux et les demeures des Puissants. Rejoignant à l’ouest et au sud les ports
ouverts sur le fleuve, il enlaçait la cité noble comme une île, la séparait et
la purifiait des souillures de la ville basse, où vivait le peuple ordinaire.
    Pressée dans l’ombre d’un mur, Saraï
chercha à reconnaître parmi la foule les serviteurs ou les esclaves que son
père aurait pu lancer à ses trousses. Elle n’en vit aucun. La surprise avait dû
être si grande qu’elle était déjà loin avant que l’on se lance à sa recherche.
    Maintenant elle devait au plus vite
atteindre l’une des portes.

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