Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Septentrion

Septentrion

Titel: Septentrion Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Louis Calaferte
Vom Netzwerk:
années. Cadeaux d’amis bienveillants. En les mettant on ne peut s’empêcher de penser à certains détails. Le fond jauni à l’intérieur, l’emplacement des fesses, les auréoles sur la doublure de la braguette. Des broutilles, je sais bien, mais tout de même… Tournez-vous que je vous enfile, Nora. Je paierai une partie de mes dettes. Les plus anciennes. Quelques types que je n’ai pas revus depuis le jour où je les ai tapés et qui n’en reviendront pas. J’ai aussi indiscutablement besoin de chaussettes, d’un veston neuf, d’un froc convenable, de deux ou trois cravates et d’un assortiment de sous-vêtements. Et je n’énumère en ce moment que l’indispensable, comprenez-moi bien. Il y a par ailleurs une liste de livres que je voudrais me procurer depuis longtemps. Tous les Balzac notamment, qu’un écrivain doit avoir auprès de lui. Passez votre jambe sous la mienne, Nota, voilà, ne bougez plus. Je ne dis pas qu’à l’occasion je n’irai pas faire un tour dans ce restaurant grec devant lequel je m’arrête fréquemment pour lire le menu à la porte. Il faut bien en arriver un jour ou l’autre à se faire une opinion sur toutes les cuisines qui se fabriquent en ce monde. Excellent prétexte pour inviter un petit groupe d’amis passionnants triés sur le volet. Ça fait bien trop longtemps que nous ne nous sommes pas réunis autour d’une table, quand j’y songe. Sicelli, Clébert, Niffontov, André et Lucien Lévy, Louis Stols, un écrivain de génie qui, jusqu’à présent, a toujours négligé d’écrire, par pure distraction, Brandès, le peintre Simon Wierne, et Martin, le plus vieux des amis de toujours, et un nouveau venu parmi nous, Adrien Sani, poète des récifs et du corail, et Morillo la tapette, pour n’en citer que quelques-uns. Joyeuse clique d’anormaux ! Tous cinglés et excentriques chacun à sa manière. Savent se conduire comme des porcs en rut pour peu qu’il y ait à boire et à manger et aussi quelques femmes bien roulées dans l’assistance. L’un ou l’autre d’entre eux, après les préliminaires obscènes, vous tiendra facilement en haleine une nuit durant sur un sujet aussi périlleux et peu excitant que Tive-Live ou vous dévoilera un monde d’horizons inédits sur la doctrine hermétique, ce qui lui permettra de vous exposer ensuite ses petits ennuis génitaux et de vous entretenir d’un pittoresque détail de sa queue ou de sa manière de baiser, sans qu’on sache jamais comment il en est arrivé là. Sympathiques, non ? Est-ce que vous me sentez suffisamment, Nora ? Je pense que j’achèterai également un manteau pour l’hiver, doublé et chaud. Autant le faire tout de suite pendant qu’il y a un reliquat. Je verrai sans doute à changer d’hôtel. Ou à prendre une autre chambre, plus décente, mieux exposée. Au soleil levant, c’est ce que j’aimerais. Cela dans l’avenir, rien ne presse. Soulevez-vous légèrement, Nora, j’ai une crampe dans le mollet droit. Je crois que vous n’aurez qu’à vous louer de moi à tous points de vue. J’irai chercher les billets de banque, un à un, comme un chien dressé, dans votre con, avec les dents, la langue, la patte, le nez, avec les doigts ou ma bite, comme vous voudrez. Annoncez. Vous gênez pas. Je connais la vie. Z’en faites pas pour moi. J’exécuterai toujours. N’hésitez jamais à me faire part de vos petits caprices de femelle oisive. Qui mieux que moi en définitive serait susceptible de les comprendre ? Je suis payé rubis sur l’ongle pour les satisfaire, les prévenir, les susciter même. Usez désormais de moi comme d’un objet familier. Comme de votre brosse à dents. De votre vibromasseur. En un mot, je suis votre putain, petite sœur. Avec un peu d’entraînement, j’arriverai peut-être à bander sur commande. J’aime qu’on soit bien servi quand on paie le prix. Toute une hérédité de conscience artisanale derrière moi. Rien n’est assez dégueulasse pour justifier l’argent qu’on vous donne. Chacun l’a compris ainsi depuis qu’il existe et qu’on s’en sert. La seule fausse note dans toute cette hystérie, c’est l’absurde sentiment de pudeur qui accompagne l’étalage de la possession. C’est être foutrement ingrat envers l’argent. Ne trompe pourtant jamais son homme, lui. Glacial. Logique. Efficace. Tant qu’on n’a pas connu l’argent, on est encore pour ainsi dire en dehors de la question. Étonnant que personne n’ait

Weitere Kostenlose Bücher