Sépulcre
même moment à Rennes-les-Bains.
— Quels événements ? s’enquit Meredith en sentant son ventre se nouer.
— Saunière était un ami de la famille qui possédait le Domaine de la Cade. Or il y eut une série de morts inexpliquées dans la région… dues sans doute à une bête sauvage, loup ou autre. Mais des rumeurs prétendirent qu’une sorte de démon courait la campagne.
Les marques de griffes .
— Même si l’on n’a jamais pu prouver ce qui avait provoqué l’incendie qui détruisit presque toute la maison en 1897, il y a de fortes chances pour qu’il ait été d’origine criminelle. Peut-être afin de débarrasser la région de ce diable dont on croyait qu’il se terrait dans l’enceinte du Domaine. Autre chose était associé au Domaine. Un certain jeu de tarot, auquel l’abbé Saunière aurait également été mêlé.
Le tarot Bousquet.
— Tout ce que je sais, c’est que mon oncle et papa se sont querellés à ce sujet, dit Hal.
— Comment ça ? questionna Meredith en se forçant à garder une voix posée.
— C’est arrivé fin avril, juste avant que mon père ne prenne la décision de venir s’installer ici définitivement. J’étais chez lui, à Londres. En entrant dans la pièce où il se trouvait, j’ai surpris la toute fin de leur conversation. De leur dispute, plutôt. Je n’en ai pas saisi grand-chose : ils parlaient de l’intérieur de l’église de Saunière qui serait une copie d’un tombeau plus ancien.
— Avez-vous demandé à votre père ce qu’il voulait dire par là ?
— Il n’avait pas envie d’en parler. Tout ce qu’il m’a révélé, c’est qu’il avait appris l’existence d’un mausolée wisigoth dans les terres du Domaine, un sépulcre, qui fut détruit quand la maison fut elle-même ravagée par l’incendie. Il n’en reste plus que des ruines…
Un instant, Meredith fut tentée de se confier à Hal. Tout lui dire sur la lecture du tarot à Paris, son cauchemar de la nuit, les cartes, rangées en ce moment même au fond de son placard. Sur la vraie raison de sa venue à Rennes-les-Bains. Mais quelque chose la retint. Hal était en lutte avec ses propres démons. Cela lui rappela le délai de quatre semaines qui avait séparé l’accident de l’enterrement.
— Qu’est-ce qui est arrivé à votre père, Hal ? demanda-t-elle, puis elle s’arrêta, craignant d’être allée trop loin, trop vite. Excusez-moi, c’est malvenu de ma part de…
— Non, ça va, la rassura Hal, puis il baissa la tête. Sa voiture a quitté la route dans le virage précédant l’entrée de Rennes-les-Bains. Elle est tombée par-dessus le parapet dans la rivière en dessous.
Il parlait d’un ton monocorde, dénué de toute émotion.
— La police ne parvient pas à expliquer ce qui a pu se passer. La nuit était claire. Il ne pleuvait pas ni rien. Le pire, c’est que…
— Ne vous sentez pas obligé de me le dire si cela vous bouleverse trop, dit-elle doucement, en posant la main au creux de ses reins.
— C’est arrivé avant le lever du jour, et la voiture n’a été découverte que plusieurs heures après. Il avait essayé d’en sortir, et la portière était restée à moitié ouverte. Mais les animaux l’ont eu en premier. Son corps et son visage étaient lacérés.
Meredith jeta un regard en arrière, vers la statue postée sur le sentier. Elle avait beau faire, elle ne pouvait s’empêcher de lier cet accident tragique survenu en 2007 aux anciennes superstitions qui semblaient hanter la région.
Tous les systèmes de divination, comme la musique elle-même, procèdent à travers des motifs, se dit-elle.
— Je pourrais accepter la situation s’il s’agissait d’un simple accident, poursuivit Hal. Mais dans leur rapport, les inspecteurs ont dit qu’il avait bu, Meredith. Or la seule chose dont je suis sûr, c’est qu’il ne buvait jamais… Jamais. Si je savais pour de bon ce qui s’était passé, ça irait. Enfin, ça n’irait pas, mais je pourrais me faire une raison. Mais c’est de ne pas savoir qui me tue. Qu’est-ce qu’il faisait là, sur cette route, à une heure pareille ? Il faut que je sache.
Meredith pensa au visage brouillé de larmes de sa mère, au sang incrusté sous ses ongles. Elle songea aux photographies sépia, à la partition de musique, au vide intérieur qui l’avait conduite jusqu’à ce coin perdu de France.
— Je ne supporte pas de ne pas savoir, répéta-t-il. Vous
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