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Sépulcre

Sépulcre

Titel: Sépulcre Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Kate Mosse
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gentiment moqueur. Tout en admirant la loyauté de son frère envers son ami, elle savait qu’il ne faisait que répéter mot pour mot ce qu’il avait précédemment entendu de la bouche d’Achille. Et, malgré tout le feu de sa plaidoirie en faveur de l’œuvre de son ami, elle savait aussi que les goûts d’Anatole le portaient vers Offenbach et l’orchestre des Folies-Bergère plutôt que vers les compositions de Debussy, Dukas, ou d’aucun de leurs amis du conservatoire.
    — Puisque nous en sommes aux échanges de confidences, ajouta-t-il, je confesse que je suis retourné la semaine dernière rue de la Chaussée-d’Antin pour acheter un exemplaire des Cinq Poèmes d’Achille.
    Un éclair de colère passa dans les yeux de Léonie.
    — Anatole, tu avais donné ta parole à maman.
    — Je sais, mais je n’ai pu m’en empêcher, répondit-il d’un air fataliste. Le prix était très abordable, et comme Bailly n’en a tiré que cent cinquante exemplaires, c’est un investissement sûr.
    — Nous devons nous montrer économes. Maman compte sur toi. Nous ne pouvons nous permettre de contracter des dettes supplémentaires… Au fait, combien devons-nous ?
    Ils s’affrontèrent du regard.
    — Voyons, Léonie. Tu n’as pas à te soucier de l’état de nos finances.
    — Mais…
    — Il n’y a pas de mais, dit-il fermement.
    — Tu me traites comme une enfant ! s’exclama-t-elle, boudeuse, en lui tournant le dos, ce qui le fit rire.
    — Quand tu te marieras, tu pourras harceler ton mari en lui demandant des comptes sur le budget du ménage, mais en attendant… Néanmoins, je te donne ma parole qu’à partir de maintenant, je ne dépenserai plus un centime sans ta permission, dit-il d’un air taquin.
    — Et voilà que tu te moques de moi, à présent… Méfie-toi, je te prends au mot ! prévint-elle.
    — Sur mon honneur, assura Anatole en faisant un signe de croix.
    Ils restèrent un moment à se sourire, puis Anatole devint grave et allongea le bras par-dessus la table pour poser sa main sur celle de sa sœur.
    — Plus sérieusement, je m’en veux de t’avoir laissée seule traverser cette épreuve, petite. Me pardonneras-tu ?
    Léonie sourit.
    — C’est déjà oublié.
    — Je ne mérite pas ton indulgence. Et je dois dire que tu t’es comportée avec beaucoup de courage. La plupart des filles de ton âge auraient perdu la tête. Je suis fier de toi, déclara-t-il, avant de se radosser pour allumer une autre cigarette. Mais tu auras peut-être un contrecoup. C’est courant, après ce genre de choc.
    — Je ne suis pas si timorée, assura-t-elle.
    Au contraire, elle se sentait grandie par cette expérience, plus audacieuse, plus proche de son être véritable. Pas le moins du monde perturbée.
    Sur la tablette de la cheminée, la pendule sonna l’heure.
    — Par contre, Anatole, ce n’est pas ton style de manquer le lever du rideau. Je crois bien que ça ne t’est encore jamais arrivé.
    Anatole avala une gorgée de cognac.
    — Il faut une première fois à tout.
    — Qu’est-ce qui t’a retenu ? Pourquoi es-tu arrivé si tard ?
    Il reposa lentement le verre ventru sur la table, puis tira sur les pointes cirées de sa moustache, signe indubitable qu’il s’apprêtait à mentir ou à esquiver.
    — Anatole ? insista Léonie en plissant les yeux.
    — Je m’étais engagé à retrouver un client hors de la ville. Il devait arriver à 18 heures, mais il a pris du retard et il est resté plus longtemps que prévu.
    — Et tu t’étais déjà habillé pour la soirée ? Ou bien es-tu passé par la maison avant de me rejoindre au palais Garnier ?
    — J’avais pris la précaution d’emporter mon habit de soirée au bureau.
    Il se dressa d’un mouvement vif, traversa la pièce et tira sur le cordon de la sonnette, mettant brusquement fin à la conversation. Avant que Léonie puisse le questionner davantage, les serveurs entrèrent pour débarrasser la table, rendant tout échange impossible.
    — Il est temps de te ramener à la maison, dit-il en l’invitant à se lever. Je réglerai la note quand je t’aurai mise dans un fiacre.
    Quelques instants plus tard, ils se retrouvèrent dehors, sur le trottoir.
    — Tu ne rentres pas avec moi ?
    Anatole l’aida à monter dans le fiacre, puis referma la clenche de la portière.
    — Non, j’ai envie d’aller faire un saut chez Frascati. Peut-être jouer aux cartes.
    Léonie eut un frisson

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