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Sépulcre

Sépulcre

Titel: Sépulcre Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Kate Mosse
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ne me reste plus qu’à continuer vers le bas, se dit-elle.
    Elle descendit donc la calade en trébuchant un peu sur les galets inégaux, les jupes relevées au-dessus des chevilles pour éviter de les tremper dans l’eau qui dévalait la pente, tandis que des bourrasques de vent mouillé lui giflaient les oreilles et le visage en passant sous le bord de son chapeau et s’engouffraient dans son manteau, qui se plaquait et s’entortillait autour de ses jambes.
    Elle ne vit pas les deux hommes qui la guettaient depuis la rambarde, près de la croix de pierre. L’un avait une haute silhouette et une allure distinguée, tandis que l’autre, brun et trapu, disparaissait sous une cape informe. Ils échangèrent quelques mots, puis il y eut une brève lueur dans la pénombre quand des pièces d’argent passèrent d’une main gantée dans les paumes crasseuses du vieux soldat, et les deux hommes se séparèrent. Le soldat s’en retourna vers la cité et disparut.
    Quant à l’autre, il suivit Léonie.
     
    Lorsqu’elle atteignit la place Saint-Gimer, elle était trempée jusqu’aux os.
    Comme il n’y avait alentour aucun endroit public, elle n’eut d’autre choix que de se réfugier dans l’église. Gravissant les marches à la hâte, elle franchit le portail en fer entrouvert accolé aux grilles noires et poussa une porte en bois pour pénétrer à l’intérieur. Des cierges brillaient sur l’autel et dans les chapelles latérales, pourtant elle frissonna, car l’air y était plus froid qu’à l’extérieur, empreint d’une odeur d’encens et de pierre humide. Tapant des pieds pour chasser l’eau restée coincée dans ses bottines, elle hésita à ôter ses gants et son chapeau trempés, puis se décida. Elle risquait de demeurer ici un bon bout de temps, et il valait mieux négliger un peu son apparence que d’attraper froid.
    Tandis que ses yeux s’accoutumaient à la pénombre, Léonie se rendit compte avec soulagement que d’autres avaient aussi trouvé refuge en ces lieux pour échapper à la tempête. C’était en vérité une étrange assemblée. Les gens allaient et venaient en silence dans la nef et les chapelles latérales. Une dame et un monsieur en haut-de-forme et pardessus à l’air pincé étaient assis sur l’un des bancs du milieu, raides comme des piquets. Des habitants du quartier plus négligés, en godasses, mal fagotés, s’étaient accroupis sur les dalles de pierre. Il y avait même un âne et une paysanne, tenant un poulet sous chaque bras.
    — Quel spectacle, dit une voix à son oreille. Mais il est vrai qu’un lieu comme celui-ci est censé accueillir tous ceux qui cherchent asile en son sein.
    Choquée d’être ainsi abordée sans préliminaires, Léonie fit volte-face. L’homme qui s’était adressé à elle était apparemment un monsieur de la bonne société. Tout l’indiquait dans sa tenue, le haut-de-forme gris, la redingote, la canne à pommeau d’argent, les gants en chevreau. Cette élégance un peu conventionnelle faisait paraître ses yeux bleus d’autant plus frappants. Un instant, Léonie crut l’avoir déjà vu. Puis elle se rendit compte que, bien qu’il fut plus corpulent, il avait quelque ressemblance avec son frère, dans les traits et la carnation.
    Autre chose aussi dans son regard direct et son profil aigu provoqua en elle un tumulte inattendu, et son cœur se mit à battre plus fort tandis qu’une chaleur l’envahissait, sous ses vêtements trempés. Troublée, elle baissa les yeux en rougissant.
    — Pardonnez-moi, je ne voulais pas vous offenser, dit-il. D’ordinaire, je ne me serais pas adressé à une dame sans lui avoir été présenté, cela va de soi. Même en un lieu comme celui-ci. Mais les circonstances sont un peu exceptionnelles, n’est-ce pas ? ajouta-t-il en souriant.
    — En effet, admit-elle en relevant la tête, rassurée par son attitude courtoise.
    — Entre compagnons d’infortune, les règles de bienséance ne sont plus tout à fait de mise. Du moins ai-je cru que nous pouvions y déroger, alors que la tempête fait rage et que nous voici condamnés à rester ici quelque temps.
    Il souleva son chapeau, révélant un front haut et des cheveux luisants, coupés bien net juste au-dessus du faux col.
    — Permettez-moi donc de me présenter. Ou serait-ce abuser de la situation ?
    — Non, faites, je vous en prie. Il se peut en effet que nous devions demeurer ici un certain temps, répondit Léonie sans

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