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Sépulcre

Sépulcre

Titel: Sépulcre Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Kate Mosse
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gilet noir sur chemise blanche évoluaient entre les clients avec une vélocité stupéfiante.
    Meredith prit la dernière table libre qui restait en terrasse. Elle commanda un petit déjeuner complet, puis sortit son carnet, une réplique des fameux blocs-notes en moleskine d’Hemingway. En prévision de ce voyage, elle en avait acheté un paquet de six, en promotion chez Barnes & Noble, et en était déjà à son troisième. Tout y passait, des détails essentiels aux plus insignifiants. Ensuite, elle transférait les notes qu’elle jugeait importantes sur son ordinateur.
    Son programme était de passer la journée à visiter les lieux privés qui avaient compté pour Debussy, par opposition aux lieux publics ou salles de concerts. Il serait toujours temps d’en changer si, en cours de route, son itinéraire se révélait décevant. Elle prendrait quelques photos, et verrait bien jusqu’où ce jeu de piste la mènerait.
    Debussy était né à Saint-Germain-en-Laye le 22 août 1862, là où s’étendait maintenant la grande banlieue. Mais c’était un vrai Parisien, car il avait passé pratiquement ses cinquante-cinq années d’existence dans la capitale, de la demeure de son enfance rue de Berlin à celle sise au 80 avenue du Bois de Boulogne, où il était mort le 25 mars 1918, quatre jours après le début des bombardements allemands sur Paris. La dernière étape de son itinéraire, peut-être à son retour à la fin de la semaine, serait le cimetière de Passy, dans le 16 e arrondissement, où le compositeur était enterré.
    Meredith inspira profondément. Elle se sentait chez elle ici, dans la ville de Debussy. Les événements s’étaient tellement précipités jusqu’à son départ qu’elle avait encore du mal à y croire. Pourtant elle était là, en plein cœur de Paris. Elle resta un moment à jouir de cette sensation et à contempler le décor qui l’entourait. Puis elle sortit sa carte multicolore, déjà bien écornée, l’étala sur la table devant elle, et ramena derrière son oreille une mèche de cheveux rebelle. La première adresse de sa liste était la rue de Berlin, où Debussy avait vécu avec ses parents et frères et sœurs du début des années 1860 jusqu’à l’âge de vingt-neuf ans. Juste au coin de la rue se trouvait l’appartement de Mallarmé. Il y donnait ses fameux salons du mardi après-midi, que Debussy avait fréquentés. Après la Première Guerre mondiale, tout comme beaucoup d’autres rues françaises qui portaient des noms allemands, elle avait été rebaptisée et s’appelait maintenant la rue de Liège.
    Meredith suivit du doigt le trajet qui menait jusqu’à la rue de Londres, où Debussy s’était installé dans un meublé avec sa maîtresse, Gaby Dupont, en janvier 1892. Ensuite ils avaient habité rue Gustave-Doré, dans le 17 e , puis avaient emménagé juste au coin de la rue Cardinet, dans un appartement où ils avaient vécu jusqu’à ce que Gaby le quitte au jour de l’an 1899. Debussy avait demeuré à la même adresse les cinq années suivantes avec Lilly, sa première épouse, avant leur rupture.
    Paris se prêtait bien à ce genre de déplacements. Elle pourrait tout faire à pied, d’autant que Debussy avait passé sa vie dans une zone géographique relativement circonscrite, qui formait comme une étoile à quatre branches à partir de la place de l’Europe, à la limite du 8 e et du 9 e arrondissement, en surplomb de la gare Saint-Lazare.
    Au feutre noir, Meredith encercla chaque lieu, réfléchit un instant, puis décida qu’elle commencerait par le point le plus éloigné pour se rapprocher peu à peu de son hôtel.
    Elle remballa ses affaires, s’escrima à rabattre sa carte dans les bons plis, termina son café, chassa les miettes de croissant accrochées à son pull et se lécha les doigts, en résistant à la tentation de commander autre chose. Malgré sa silhouette mince et déliée, Meredith était gourmande. Elle aimait les pâtisseries, le pain, les chocolats, toutes ces bonnes choses qu’on était censé bannir de son alimentation. Elle laissa un billet de dix euros pour régler l’addition plus un peu de monnaie comme pourboire, et se mit en marche.
    Il ne lui fallut qu’un quart d’heure pour atteindre la place de la Concorde. De là elle prit au nord, croisa l’église de la Madeleine, ce curieux édifice aux allures de temple romain, puis longea le boulevard Malesherbes. Cinq minutes plus tard, elle tournait à

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