Sépulcre
gris, impeccable, le réceptionniste se montra chaleureux et efficace. Apparemment, il la comprenait parfaitement, et Meredith s’en réjouit. Elle n’avait pas pratiqué le français depuis un bon moment et craignait qu’il se fût un peu rouillé.
C’est sûrement bon signe, se dit-elle.
Il lui proposa de lui porter ses bagages, mais elle déclina son offre et nota juste le mot de passe permettant d’accéder à Internet. Après quoi, elle prit le petit ascenseur qui la déposa au troisième étage et avança dans le couloir jusqu’au numéro de porte indiqué sur sa clef.
La chambre était exiguë, mais propre et raffinée, tout en brun, crème et blanc. On avait allumé sa lampe de chevet. Les draps étaient de bonne qualité et il y avait un placard spacieux, dont elle n’aurait d’ailleurs pas l’usage. Elle déposa son sac de voyage, sortit son ordinateur portable, l’installa sur la surface vitrée du bureau et le mit en charge.
Puis elle gagna la fenêtre, tira les rideaux, ouvrit les volets. Le bruit de la circulation s’engouffra dans la pièce. En bas, dans la rue, des promeneurs, jeunes pour la plupart, profitaient de cette soirée d’octobre étonnamment douce. Meredith se pencha. En face, au coin de la rue, il y avait un grand magasin, fermé. Une pâtisserie et une épicerie fine, des cafés et des bars, tous ouverts, d’où s’échappait de la musique. La lueur chaude des réverbères et celle, plus froide, des néons, illuminaient ou dessinaient les pleins et les contours des choses, dans les demi-teintes propres à la nuit.
Les coudes appuyés sur la balustrade en fer forgé, Meredith resta un moment à observer. Elle aurait voulu avoir assez d’énergie pour descendre et se mêler aux badauds. Mais elle s’aperçut alors qu’elle frissonnait et rentra à l’intérieur.
Là, elle défit ses bagages, rangea ses quelques vêtements dans la penderie, puis gagna la salle de bains. Cachée derrière une drôle de porte en accordéon, elle était en céramique blanche, et minimaliste en diable. Meredith prit une douche rapide, puis, enveloppée d’un peignoir et chaussée d’épaisses socquettes en laine bouclée, elle alla puiser dans le minibar de quoi se servir un verre de vin rouge et s’assit pour consulter son courrier électronique.
Elle obtint assez vite la connexion, mais il n’y avait pas grand-chose… un ou deux mots d’amis demandant des nouvelles, un autre de sa mère, Mary, qui voulait savoir si tout allait bien, une annonce pour un concert. Meredith soupira. Toujours rien de son éditeur. La première part de son avance aurait dû être versée sur son compte fin septembre, avant son départ. On était maintenant en octobre et elle commençait à s’impatienter. Elle avait envoyé un ou deux rappels et on lui avait assuré que tout était en bonne voie. Sa situation financière n’était pas trop catastrophique, du moins pour l’instant. Elle avait ses cartes de crédit, et elle pourrait toujours emprunter un peu d’argent à Mary qui la dépannerait bien volontiers, en cas de besoin. Mais elle aurait été soulagée de savoir que ce n’était plus qu’une question de jours.
Meredith éteignit son ordinateur. Elle vida son verre, se brossa les dents et se mit au lit avec un livre pour lui tenir compagnie.
Elle tint environ cinq minutes.
La rumeur de la ville s’estompait. Meredith s’assoupit peu à peu, sans éteindre la lumière, la tête posée près de son vieil exemplaire des nouvelles d’Edgar Allan Poe, abandonné sur l’oreiller.
10.
Samedi 27 octobre 2007
Quand Meredith se réveilla le lendemain matin, la lumière coulait à flots par la fenêtre.
Elle sauta du lit, se brossa les cheveux, se fit une queue-de-cheval et enfila un jean, un pull vert et son blouson. Elle vérifia qu’elle avait tout ce qu’il lui fallait dans son sac, portefeuille, carte, carnet, lunettes de soleil, appareil photo, puis, toute guillerette à l’idée de la journée qui l’attendait, elle quitta la chambre et dévala l’escalier quatre à quatre jusqu’au hall d’entrée.
C’était une merveilleuse journée d’automne, un temps frais, ensoleillé, une belle lumière dorée. Meredith alla prendre son petit déjeuner à la brasserie d’en face. On avait sorti quelques tables de bistrot sur le trottoir, au soleil. Dedans, tout était en bois brun laqué. Un comptoir en zinc faisait toute la longueur de la salle où deux garçons de café en
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