Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Si je meurs au combat

Si je meurs au combat

Titel: Si je meurs au combat Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Tim OBrien
Vom Netzwerk:
qu’on explose en mille morceaux sur ses bonnes vieilles mines.
    Au moment de quitter My Lai 5, la compagnie Alpha était lessivée et avait la rage. Encore une fouille inutile d’un village désert, encore un gros échec quand on a posé nos questions aux habitants. En allant vers le nord pour traverser la rivière de Diem Diem, la compagnie n’a pas cessé de se faire tirer dessus par des snipers, et ça s’est même transformé en un violent tonnerre quand on est arrivé à la rivière, devant un pont de soixante-quinze mètres de long, complètement à découvert, la seule manière de traverser. L’un après l’autre, on traçait sur le pont aussi vite que nous le permettaient nos sacs à dos, nos radios et nos mitraillettes. L’unité a traversé le Song Diem Diem pendant que le reste des troupes nous couvrait en les aspergeant de balles, et pendant ce temps on attendait notre tour avec la trouille au ventre. C’était la course. Un lieutenant donnait le départ, accroupi sur la piste de décollage en argile qui menait à la rizière, il gueulait « allez ! » à chacun de nous, et puis il envoyait une rafale pour couvrir le type qui partait. Le capitaine, le premier à avoir gagné la course, était à la ligne d’arrivée. Il faisait le signe V à chaque fois qu’un gars réussissait à traverser. Ça voulait peut-être dire « victoire », ou alors « valeur ». Mais ça ne voulait sûrement pas dire « peace ». Les gars commençaient à s’énerver, d’autant qu’on ne voyait aucun soldat ennemi sur lequel on pouvait tirer en représailles, rien que des haies des buissons et des bosquets d’arbres morts.
    On s’est fait tirer dessus au mortier, cette nuit-là. On a rampé dans des ravins et le long des digues de rizières pour essayer de s’échapper. On voyait les éclats rouges fuser de leurs mortiers, mais personne n’osait leur tirer dessus, parce que ça n’aurait rien fait d’autre qu’indiquer encore plus précisément notre position. Le capitaine m’a donné l’ordre d’appeler le quartier général pour qu’ils nous envoient des hélicoptères, et au milieu de la communication les salves des mortiers se sont mises à tomber encore plus près de nous. Johansen a marmonné qu’ils nous coinçaient, qu’ils balançaient leurs salves des deux côtés, alors on a avancé en avant et en arrière, à quatre pattes, avec mon antenne qui traînait dans la rizière, dans cette nuit toute noire, pour finir par atterrir dans un village de My Lai, où on a passé la nuit. Les sections sont restées dans l’eau des rizières. Les gars avaient peur de bouger.
    Les jours d’après, la pierre de nos briquets Zippo s’est mise à tourner pour un oui ou pour un non. Les toits en paille prennent feu en un rien de temps, et les mauvais jours les hameaux de Pinkville brûlaient – la compagnie Alpha se vengeait par le feu. Ça faisait du bien de s’arracher de Pinkville et de voir les flammes derrière nous. Ça faisait du bien, tout comme la haine à l’état pur peut faire du bien.
    On se dirigeait vers d’autres villages et le 48 e  bataillon fantôme viêt-cong nous suivait comme un petit chien. Quand une série de bombes à fragmentation a envoyé valdinguer dans une haie deux soldats que tout le monde aimait beaucoup, les gars ont commencé à taper sur la gueule des premiers Vietnamiens qu’ils ont pu se mettre sous la main, deux femmes affolées qui vivaient dans ce hameau coupable, et une fois que les gars leur ont réglé leur compte, ils leur ont tailladé des touffes de cheveux noirs et épais. Les gars chialaient en faisant ça. Un officier a utilisé son pistolet pour marteler le crâne d’un prisonnier.
    Les restes de nos potes ont été jetés dans des sacs plastiques. On a fait venir des avions de combat. Le village a été rasé ; ils ont fait ça au napalm. J’ai entendu des hurlements dans les décombres qui brûlaient. J’ai entendu les mitraillettes AK-47 de l’ennemi péter contre les avions, comme des petits pistolets à bouchon impuissants. Il y avait des Viêt-congs dans ce hameau. Et puis il y avait aussi des bébés, des enfants, des personnes qui n’en avaient rien à faire de la guerre. Mais Chip et Tom étaient sur la route des services funéraires, à Chu Lai, ils étaient morts, et c’était pas évident de ressentir une quelconque pitié.
    On a continué à marcher, jour après jour, avec l’argile rouge et brûlante qui

Weitere Kostenlose Bücher