Spartacus
pour chef un Syrien nommé Eunus. Ce meneur d’hommes prétend être inspiré par une déesse syrienne qui appelle les esclaves à la révolte. Selon Florus 90 , le prophète de la liberté dissimule en fait dans sa bouche une noix remplie de soufre allumé, sur laquelle il souffle légèrement. Il jette ainsi des flammes en parlant, preuve de son inspiration divine. Ce prodige lui permet de rassembler rapidement 2 000 esclaves. Les armes à la main, ils brisent les portes des prisons, pillent les villes d’Henna, Taormina et Heraclea, ainsi que de nombreux domaines ruraux. Devenu roi, Eunus constitue une armée de plus de 60 000 hommes et bat les légions que Rome envoie contre lui. Comme pour Spartacus, les premiers succès des esclaves sont favorisés par le fait que les Romains sont alors en difficulté en Espagne, où ils doivent concentrer leurs meilleures troupes. Il faut des années et plusieurs armées consulaires pour vaincre les esclaves. En 132, le consul Publius Rupilius parvient à les assiéger dans la ville d’Henna où ils périssent par la famine et la peste. Eunus, capturé, meurt en prison tandis que les esclaves survivants sont mis en croix. Plus près encore de Spartacus, en 104 av. J.-C., une nouvelle révolte embrase la grande île. Comme lors de la première guerre servile, la puissance de Rome est menacée sur un autre théâtre d’opérations. Cette fois, ce sont deux peuples germaniques, les Cimbres et les Teutons, qui menacent l’Italie. Dans ce contexte, le Sénat de Rome tente de s’assurer des alliés en Asie et pour ce faire décide que tout homme libre originaire d’un pays allié retenu injustement dans l’esclavage sera déclaré affranchi. A l’annonce de cette loi imprudente, 800 esclaves se présentent au préteur de Sicile et sont affranchis. Aussitôt, une foule d’esclaves tentent de les imiter mais sont renvoyés à leurs maîtres. Déçus et furieux, ils se révoltent. Cette fois, un Cilicien nommé Salvius prend la tête de la révolte. Il rassemble 20 000 combattants et 2 000 cavaliers et, comme Eunus trente ans plus tôt, se fait proclamer roi sous le nom de Tryphon. Comme son prédécesseur il pille et torture les propriétaires d’esclaves et n’hésite pas à affronter les troupes romaines stationnées en Sicile ; lui aussi réussit à battre des armées prétoriennes et à s’emparer du camp des préteurs Servilius et Lucullus. A la mort du roi Tryphon, le berger Athénion lui succède et continue la lutte contre le préteur Servilius. Suite à ses échecs, ce dernier est révoqué et condamné à l’exil. En 101, après la victoire de Marius sur les Cimbres et les Teutons, le Sénat peut envoyer une armée consulaire en Sicile. Comme son prédécesseur Publius Rupilius, le consul Marius Aquilius Nepos vient à bout de la révolte. Après avoir tué Athénion, il disperse le reste de ses troupes, en capturant un petit nombre qu’il envoie à Rome pour être livrés aux bêtes.
Trente ans après la mort des derniers rebelles, il ne doit plus rester beaucoup de témoins de cette guerre parmi les esclaves de Sicile. Pourtant, le souvenir des rois Eunus et Tryphon s’est certainement perpétué, se confondant en une seule et même tradition orale, merveilleuse pour les esclaves, terrifiante pour les maîtres. Il est également probable que les récits magnifiés de la révolte de Spartacus courent aussi de bouche à oreille parmi les milliers d’esclaves exploités sur les grands domaines de l’île. Eux aussi doivent espérer que Spartacus vienne un jour les délivrer. Ils brûlent sans doute de se joindre à son armée afin de prendre leur revanche sur leurs maîtres. En tournant les pas de ses soldats vers la Sicile, Spartacus ne commet donc pas d’erreur stratégique, bien au contraire. La question se pose néanmoins de savoir s’il veut transférer toute son armée au-delà des détroits ? Plutarque ne parle que de la volonté de Spartacus « d’y jeter deux mille hommes ; pour y rallumer la guerre des esclaves, éteinte depuis peu, qui n’avait besoin que de la plus légère étincelle ». Ce choix a l’avantage de nécessiter un faible nombre de bateaux pour effectuer la traversée du détroit. Une trentaine suffiraient pour transporter 2 000 soldats et les pirates peuvent facilement les réunir. Ce plan comporte cependant plusieurs inconvénients. En divisant ses forces, Spartacus retombe dans un travers qui lui a
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