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Staline

Staline

Titel: Staline Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Marie,Jean-Jacques
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contre lui l’appareil, désireux par
nature d’échapper au contrôle de ses mandants, et le poussera à serrer les
rangs derrière un protecteur.
    Le 9, les conjurés, réunis chez Staline, décident de
stigmatiser le « fractionnisme » prétendu de Trotsky et des 46, qui n’animent
pourtant aucun groupe organisé ; en revanche, ils édifient, quant à eux,
une fraction ultrasecrète qui forme à l’intérieur du Parti un réseau parallèle
disposant de son chiffre, toutes décisions qui seront formalisées en août 1924.
Zinoviev leur explique : nous pouvons avoir entre nous des divergences,
nous tromper, nous corriger les uns les autres, mais « devant Trotsky nous
sommes privés de cette possibilité [473]  »,
il faut, face à lui, être tous d’accord sur tout. Staline retiendra la leçon :
demain, il recourra systématiquement à ces deux procédés contre ses alliés d’aujourd’hui.
    Les triumvirs multiplient les mesures disciplinaires :
ils limogent le jeune responsable de la tribune de discussion de la Pravda, démettent quinze responsables du comité central des Jeunesses communistes
envoyés en province, et obtiennent ainsi la majorité dans ce comité central
oppositionnel normalisé, révoquent Antonov-Ovseenko, responsable de l’administration
politique de l’Armée rouge. Staline, dans la Pravda du 15 décembre,
qualifie les opposants de bureaucrates. En une litanie d’allusions vagues,
présentées comme autant d’évidences, il dénonce « Beloborodov, dont le
"démocratisme" reste jusqu’à présent inoubliable chez les ouvriers de
Rostov […], Piatakov, dont le "démocratisme" a fait non pas crier
mais hurler tout le Donetz […] ; Byk, dont le "démocratisme"
fait encore hurler le Khorezm [474]  ».
Il raille le souci qu’exprime Trotsky sur le devenir d’une vieille garde
bolchevique à laquelle il n’a pas appartenu. Il peaufine alors sa méthode
politique : son but n’est pas de démontrer que son adversaire a tort ou se
trompe, mais de le disqualifier et de le discréditer. Et pour y parvenir, il
est prêt à tout.
    Boukharine se jette dans la mêlée avec sa fièvre coutumière
et, par un retournement complet du gauchiste d’hier en philosophe de l’appareil,
il cherche à démontrer que la bataille politique interne mène à de fatales
divisions. Il raconte, début décembre, devant une assemblée des militants, qu’en
mars 1918 les SR de gauche ont proposé aux communistes de gauche hostiles,
comme eux, à Brest-Litovsk d’arrêter et d’emprisonner le gouvernement présidé
par Lénine et d’en nommer un nouveau, présidé par Piatakov ; Boukharine
avait, certes, repoussé la proposition avec indignation, mais elle n’avait pu
lui être faite que parce qu’il s’opposait publiquement à la paix de
Brest-Litovsk. L’opposition de Trotsky peut avoir aujourd’hui les mêmes
conséquences, explique-t-il. Staline utilise aussitôt cette révélation bénie :
« On sait, écrit-il dans la Pravda du 15 décembre, que les
communistes "de gauche" […] discutèrent sérieusement du changement du
Conseil des commissaires du peuple existant par un nouveau formé de gens
nouveaux membres de la fraction des communistes de "gauche". »
Boukharine n’a jamais dit qu’ils en « discutèrent sérieusement ».
Staline ajoute cette invention à l’aveu de Boukharine, qui, loin de rectifier
cette falsification, récidive dans la Pravda du 2 janvier. Ce petit
jeu lui coûtera cher. En 1938, son aveu spontané de 1923 permettra de l’accuser
d’avoir comploté en 1918 pour renverser le pouvoir des soviets.
    Staline inaugure la tactique qu’il va utiliser cinq ans
durant. Terré au cœur de l’appareil, il pousse en avant des hommes pourvus des
qualités qui lui manquent. À cette époque, il propulse l’orateur Zinoviev et le
théoricien Kamenev, se tient en retrait derrière eux, les use dans cette
bataille, sape leurs positions et commence à promouvoir les figures de proue du
combat ultérieur : Tomski, le secrétaire des syndicats depuis 1919, Rykov,
le président du Conseil des commissaires du peuple après Lénine, et surtout
Boukharine, dont les talents d’orateur et de théoricien font merveille. Il
propulsera ces trois hommes à la fin de 1925 contre Zinoviev, Kamenev et
Trotsky, puis s’en débarrassera en 1929 après avoir lentement miné leur
position. Il apparaîtra alors soudainement sur le devant d’une scène
débarrassée de

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