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Staline

Staline

Titel: Staline Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Marie,Jean-Jacques
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promotion de Maiakovski montre bien qu’il ne s’agit pas d’une
question littéraire. Selon le mot de Pasternak, Staline va promouvoir
Maiakovski comme jadis Catherine II imposa la culture des pommes de terre.
Maiakovski a l’avantage énorme d’être mort, silencieux à jamais, et donc de
pouvoir être utilisé sans risque, sous réserve de coupures éventuelles.
    Staline peaufine en même temps son propre culte. Cette même
année, il confie à Beria la tâche d’écrire une histoire du bolchevisme dans le
Caucase qui le mettrait enfin au premier plan, dès sa naissance. Jusqu’alors,
les révisions de l’histoire étaient effectuées par des professionnels de la
plume, historiens ou publicistes. Pour la première fois, Staline mobilise à
cette fin un simple policier. C’est une indication claire : désormais l’histoire
relève de la police. Mais il faut bien écrire ; l’inculte Beria se
décharge de l’entreprise sur un publiciste, Bedia, dont il contrôle
minutieusement le travail et qu’il fera fusiller deux ans plus tard, une fois
son œuvre achevée, pour la plus grande gloire du Secrétaire général.
    Beria participe pour la seconde fois au repas donné pour l’anniversaire
de Staline, le 21 décembre 1935. Après le dîner, le grassouillet
Jdanov empoigne son accordéon et, malgré quelques fausses notes (« l’accordéon
s’est abîmé plusieurs fois », note Maria Svanidzé !), la compagnie
chante à tue-tête des chansons abkhazes, ukrainiennes, des chansons d’étudiants
et à boire. Postychev prend Molotov par la taille et se lance avec lui dans une
danse endiablée. Staline rit à gorge déployée. Puis on passe dans le vaste
bureau. Staline branche son gramophone. Les danses russes se mêlent au
fox-trot. Les danseurs invitent Staline à se joindre à eux. Il refuse : « Depuis
la mort de Nadia, je ne danse plus. » Mais c’est lui qui met le disque,
toujours le même, et le même que l’année précédente… « Sa nature est
marquée par la constance [795]  »,
note Maria Svanidzé… La fête dure ainsi jusqu’à quatre heures du matin.
    Cette gaieté familiale dissimule aux invités, qui n’ont pas
participé au Comité central réuni quelques jours plus tôt, l’annonce de la nouvelle
saignée décidée par Staline. Après avoir dressé le bilan des exclusions
massives permises par le contrôle des cartes, le Comité central a, par une
résolution spéciale, désigné une nouvelle liste d’adhérents à chasser de ses
rangs : « Les espions des services de renseignements étrangers, qui
se sont glissés dans le Parti communiste russe en prenant l’aspect d’émigrés
politiques et de membres des partis communistes frères. » La menace de l’arrestation,
du camp et de l’exécution pèse désormais sur les milliers d’émigrés politiques,
communistes et parfois socialistes, d’une trentaine de pays du monde,
inconscients du sort qui les attend. Six mois à peine après le septième et
dernier congrès d’une Internationale condamnée à mort par le « socialisme »
national, Staline organise la chasse aux communistes étrangers,
systématiquement accusés d’espionnage [796] .
C’est le revers de l’épuration sanglante qu’il déchaîne contre son parti, dont
la vie a été, depuis 1919, liée à celle l’Internationale. Il est décidé à noyer
dans le sang cette tradition internationaliste.
    En même temps Staline semble vouloir faire un geste vers les
« éléments socialement étrangers » en répondant à un fils de koulak
contrit : « Le fils ne répond pas des actes de son père [797] . »
    Dans son bureau, depuis quelques mois, Iejov achève la
rédaction d’un ouvrage qui doit le hisser du rang d’enquêteur privilégié de
Staline à celui d’exécutant suprême de la politique répressive : Du
fractionnisme à la contre-révolution ouverte. Rien ne correspond mieux aux
désirs de Staline en cette fin d’année.

CHAPITRE XXI
Le maelström
    Le 20 janvier 1936, Staline assiste, dans la loge
gouvernementale, à la première de l’opéra de Chostakovitch : Lady
Macbeth de Mzensk. Au troisième acte, il se lève brusquement et quitte la
loge. Le lendemain, la Pravda dénonce violemment la musique de
Chostakovitch. Les goûts musicaux de Staline, qui adore pousser la
chansonnette, étaient assez primitifs, mais la musique n’a rien à voir à l’affaire.
L’opéra met en scène un mari tyrannique, brutal et

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