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Staline

Staline

Titel: Staline Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Marie,Jean-Jacques
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aux troupes soviétiques d’« attaquer de toutes
leurs forces les armées ennemies et de les anéantir là où elles ont franchi les
frontières soviétiques », mais « de ne pas franchir la frontière
allemande », et invite l’aviation soviétique, pilonnée, à « porter
ses coups à l’intérieur du territoire allemand sur une distance de 100 à 150 kilomètres »
ainsi qu’à « bombarder Koenigsberg et Memel [1093]  ». Staline
laisse la responsabilité de ce coup de bluff aux autres. Joukov a peine à le
comprendre. « Il espérait manifestement encore éviter la guerre [1094]  »,
écrira-t-il. Paralysé par l’attaque de la Wehrmacht, Staline croit-il vraiment
que sa passivité pourrait faire reculer Hitler ? S’acharne-t-il à
poursuivre, au-delà du rationnel, la politique qu’il mène depuis deux ans et
dont il voudrait nier l’échec ? Celui que Pilniak appelait « l’homme
au dos raide » n’a jamais su réagir rapidement à un changement brutal de
situation. Cette raideur est celle de l’appareil tout entier qu’il
incarne : le chargé d’affaires de l’ambassade soviétique à Paris, Ivanov,
l’expérimente à ses dépens. Rappelé à Moscou en décembre 1940, il est
arrêté peu après pour « activités antiallemandes ». Ce crime, lors de
son procès, en septembre 1941, lui vaut cinq ans de Goulag.
    Au Kremlin, les civils et les militaires réunis proposent à
Staline de s’adresser au peuple par la radio : « Je n’ai rien à dire
au peuple, grommelle-t-il. Que Molotov prenne la parole [1095]  ! »
Comment ? s’exclame l’entourage, le peuple ne comprendra pas pourquoi, à
un moment aussi grave, le chef de l’État et du Parti ne s’adresse pas au peuple
pour l’inviter à se dresser face à l’envahisseur ! Rien n’y fait. Staline
se dérobe. Dimitrov, arrivé au Kremlin à sept heures du matin, le trouve
placide, ferme, sûr de lui, bien qu’il se contente de lui déclarer : « Ils
nous ont attaqués, sans nous présenter aucune réclamation, sans chercher aucune
négociation, ils nous ont attaqués lâchement comme des bandits [1096] . » Il
énumère les villes bombardées, et l’informe que la Roumanie et la Finlande se
joignent à l’Allemagne. C’est le calme de l’abattement. Nul ne pense à
organiser des manifestations populaires patriotiques.
    Lorsqu’en 1947 Staline recevra les épreuves de sa biographie
autorisée, il en corrigera avec un soin tout particulier le chapitre onze
consacré à la guerre, qui accueillera un quart de ses 300 amendements. Les
auteurs avaient, de façon rituelle, présenté le début de la guerre comme une « une
agression perfide contre l’Union soviétique ». Staline précisera : « L’Allemagne
viola grossièrement le pacte de non-agression » et qualifiera l’attaque d’« inattendue [1097]  ». Nul ne
pouvant la prévoir, la sagesse du Chef reste intacte…
    La guerre le plonge dans une situation totalement nouvelle.
Absorbé depuis vingt ans dans les intrigues d’appareil, il s’est habitué à
préparer minutieusement et lentement ses coups, à engluer ses adversaires dans
un tissu serré de manœuvres et de provocations qui exigent de la patience, de
la ruse et du temps. Le voici soudain confronté par surprise à une Blitzkrieg qui exige des réactions rapides, voire immédiates. L’expérience de la guerre
civile, de ses coups de main, de ses raids de cavalerie, de ses soulèvements de
paysans armés de fourches, de haches et de fusils, ne lui sert à rien. Pendant
des mois, il est éperdu, constamment en retard sur les événements, et compense
ce décalage permanent par des éclats de rage furieuse, des décisions absurdes
et des mesures brutales.
    Staline réagit à la guerre et aux premières défaites en
accumulant les mesures de police : une vague de condamnations à mort et d’exécutions
décime les prisons dès les premières semaines de la guerre. Après la
proclamation de la loi martiale dans les camps pour les détenus et les gardes,
un décret suspend la libération des détenus libérables, les maintient au Goulag sine die, et interdit de relâcher avant la fin de la guerre tout
condamné politique. La crainte secoue son appareil. Les commandants de camp
épurent le personnel et la garde de leurs éléments jugés incertains, arrêtent
des détenus accusés de menées antisoviétiques, commandent en urgence du fil de
fer barbelé, suppriment toute

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