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Staline

Staline

Titel: Staline Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Marie,Jean-Jacques
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d’instrument de propagande en représentant des juifs. S’il l’acceptait
pour eux, il faudrait l’accepter pour d’autres dans cet empire de plus de 140 nationalités.
Alors qu’une aspiration dangereuse à des changements démocratiques se fait
sentir en URSS, il ne peut tolérer cette entorse au monopole du Parti.
    La pression policière sur la société est pourtant
considérable. Le NKVD a épuré le Comité central du mouvement des partisans,
trop indépendants. Il passe maintenant au peigne fin les territoires libérés.
Dans un rapport à Staline, Beria note qu’en 1943 les troupes du NKVD chargées
de la protection des arrières de l’Armée rouge ont interpellé 931 549 individus
« dont 80 296 ont été arrêtés comme espions, traîtres, vendus,
bourreaux, déserteurs, maraudeurs et simples criminels ». Beria organise
ensuite, sur ordre de Staline, la déportation de peuples entiers accusés de
trahison, de novembre 1943 à mai 1944, au fur et à mesure de l’avancée
de l’Armée rouge. Les 69 000 Karatchaïs sont déportés en novembre 1943,
les 80 000 Kalmouks en janvier 1944, les 309 000 Tchétchènes
et les 81 000 Ingouches en février, les 37 000 Balkars en
mars, les 200 000 Tatars de Crimée en mai, les 86 000 Meskhètes
en juillet. Ils sont tous déplacés, au cours de voyages meurtriers de quatre à
cinq semaines, vers la Sibérie, la Kirghizie, l’Ouzbékistan et le Kazakhstan,
dans des wagons de marchandises, ces mêmes wagons qui manquent si cruellement
pour acheminer rapidement armes et matériels au front [1234] .
    Staline signe les décrets et suit au jour le jour les
opérations de rafle et de transfert de ces populations essentiellement
composées de vieillards, de femmes et d’enfants, puisque les pères et les maris
sont au front. Il demande à Beria et à ses adjoints des rapports réguliers sur
leur déroulement. Beria, chargé de leur conduite, lui adresse régulièrement des
bulletins de victoire. Les camps de filtrage brassent des dizaines de milliers
de soldats suspects ; entre le 1 er  janvier et le 20 octobre 1944,
ils en ont vu passer entre leurs barbelés 354 590, dont les deux tiers ont
été renvoyés au front, mais près de 12 000 expédiés au Goulag, ainsi qu’une
partie des 51 615 soumis à une « vérification » complémentaire.
À la même date, le NKVD a raflé et déporté 140 000 Ukrainiens,
maquisards nationalistes et civils suspects de sympathiser avec eux. Staline
fait ici preuve d’aveuglement : en envoyant dans les camps des milliers de
sous-officiers et d’officiers qui ont affronté la Wehrmacht et la mort, il y
sème des graines d’insubordination, voire de révolte.
    Il a pour le moment des soucis plus vastes : l’organisation
de l’Europe d’après-guerre. L’offensive soviétique du printemps 1944,
commencée début mars, libère tout le territoire de l’URSS, dégage Leningrad et
conduit l’Armée rouge à la frontière roumaine en avril, en Biélorussie, en
Lituanie et à la frontière polonaise en juillet. Fin juillet, elle entre à
Lublin, où est installé un gouvernement polonais à la botte de Moscou. Le 17 août,
elle touche à la frontière allemande de Prusse-Orientale. Le 8 juillet,
Staline, pour une fois de bonne humeur, reçoit Joukov et Antonov et leur
commente ainsi la situation : « Aujourd’hui, ni Roosevelt ni
Churchill ne feront un arrangement avec Hitler [1235] . »
    À la fin de juillet, les avant-postes soviétiques arrivent
au bord de la Vistule, dans les faubourgs de Varsovie qui s’étend de l’autre
côté de la rive. Le 1 er  août, l’ Armia Krajowa, cette
armée de résistants subordonnée au gouvernement de Londres, soulève Varsovie
contre la Wehrmacht, pour placer l’Armée rouge devant le fait accompli d’un
gouvernement polonais indépendant dans la capitale libérée. Staline, conscient
du calcul, considère avec scepticisme cette insurrection d’habitants, peu et
mal armés, contre les 16 000 hommes de la garnison allemande qui
tiennent Varsovie. Le 3 août, il reçoit au Kremlin une délégation
polonaise dirigée par le chef du gouvernement polonais de Londres, Mikolajczyk.
Ce dernier lui annonce la libération imminente de Varsovie et réclame des
fournitures d’armes aux insurgés. Staline émet des doutes sur leur succès. Dans
la guerre moderne, dit-il, une armée seulement équipée d’un armement léger
insuffisant, sans artillerie,

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