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Staline

Staline

Titel: Staline Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Marie,Jean-Jacques
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qu’ils ont mis au point. Ce sont donc des
domestiques de l’Occident. Kouznetsov dénonce aussi un professeur coupable d’avoir
publié dans une revue américaine un article sur la « théorie des foyers octogonaux »,
très important pour la construction des wagons, et un directeur de station
météorologique qui laisse les agents anglais et américains entrer dans la
station et mettre la main sur ses documents météo ultrasecrets. Mieux encore,
un troisième est accusé d’avoir livré à un Occidental de passage à Moscou un
plant de… luzerne vivace et de lui avoir promis l’envoi des graines de luzerne
simple [1343]  !
Tout l’aréopage du Parti est réuni pour entendre ces fadaises et mettre en
accusation deux savants et trois petits fonctionnaires. Ce rapport, que Staline
écoute sans mot dire, donne l’impression d’une sinistre répétition de 1937. Les
deux premiers valets de l’Occident accusés, Klioueva et Roskine, sont, comme
par hasard, deux juifs…
    En 1947, par un jeu de balancier subtil mais rituel, qui
désoriente ses lieutenants et l’appareil, le Guide fait attribuer le prix
Staline de littérature au roman de Victor Nekrassov, Les Tranchées de
Stalingrad, dans lequel jamais les soldats ne partent à l’assaut en poussant le
rare cri mythique : « Pour la Patrie ! Pour Staline ! »
On n’y trouve le nom révéré que deux fois, une fois pour signaler son portrait
dans un QG, une autre fois brièvement au détour d’une conversation entre deux
soldats : « Il a du cran […] Staline. Savoir arrêter deux retraites
comme ça. Tu te rends compte ? En 41 et maintenant. Et réussir à les
repousser de Moscou. Et tenir bon ici […]. Lui il faut qu’il pense à tout […].
Il a tout le front […]. Il nous conduira à la victoire. Tu verras [1344]  ! » C’est
tout… Aucun autre témoignage d’admiration, aucun signe de vénération, aucune
évocation du génie stratégique. En 1948, mieux encore, Staline fera attribuer
son prix au roman de guerre L’Étoile, du romancier juif Emmanuel Kazakievitch,
où son nom n’est pas cité une seule fois.
    Partant se reposer à Sotchi en cet automne 1947, il s’installe
quelque temps dans sa datcha près du lac de Ritza en Abkhazie. Il y convoque un
jour Mikoian, qui n’appartient à aucun des deux clans en lutte pour sa
succession, lui joue la comédie du vieil homme las, à bout de souffle, et lui
susurre une fausse confidence : il envisage que Kouznetsov lui succède
comme Secrétaire général du Parti, et Voznessenski comme président du Conseil
des ministres. La confidence, destinée à être répétée pour allumer les
rivalités, semble confirmée par les récentes promotions des deux hommes. Après
celle de Kouznetsov au Secrétariat du Comité central en mars puis avril 1946,
et la mise à l’écart ultérieure de Malenkov envoyé en province, Staline a nommé
membre titulaire du Bureau politique, le 26 février 1947,
Voznessenski, déjà président du Gosplan et vice-président du Conseil des
ministres. Dans l’ombre de Jdanov, le patron de Leningrad et de l’idéologie,
ces deux hommes apparaissent comme les étoiles montantes.
    Nicolas Voznessenski est une incarnation parfaite du
dignitaire stalinien de la génération de 1937-1938. Ce fils de garde forestier,
né en 1903, orphelin à 13 ans, a vite dû gagner sa vie comme apprenti
serrurier puis comme typographe. Après un passage à l’école des professeurs
rouges, formation terminée en 1931, il a commencé dès 1935 une carrière
fulgurante qui le conduit, en 1938, à la présidence du Gosplan de l’URSS,
fonction qu’il cumule en 1939 avec celle de vice-président du Conseil. Élu au
Comité central en mars 1939, il est nommé suppléant du Bureau politique en
1941, et titulaire en 1947. Alexandre Soloviev a noté dans son journal l’adoration
aveugle et enthousiaste pour Staline de ce promu, qui qualifie le Guide de « plus
grand des génies, organisateur insurpassable, inspirateur du Parti et du
peuple, qui ne fait jamais d’erreur ». Quatre mois plus tard, Voznessenski
vante devant lui « la façon géniale qu’a Staline de diriger la
construction socialiste », la richesse inventive de ses slogans pour
mobiliser les masses. Six mois plus tard, Voznessenski soutient : « Staline
jouit d’un profond amour du peuple comme aucun chef n’en a jamais eu [1345] . » C’est
un fidèle parmi les fidèles de la première génération

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