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Stefan Zweig

Stefan Zweig

Titel: Stefan Zweig Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Dominique Bona
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l’homme, naïf et tendre, ne saurait résister. Il ressort de ses brefs et saisissants récits que des deux sexes, le plus fragile est le masculin. Le féminin est souverain. Il n’y a pas plus fort que la femme, et son ardent désir d’exister.
     
    Obsédé, envoûté par le féminin, Zweig en a peur. Il tient la femme à distance, la sienne d’abord, qu’il occupe sans relâche à toutes sortes de soins concrets et ennuyeux, destinés à canaliser son énergie, épuiser ses forces vitales, mais les autres aussi, qu’il ne laisse pas pénétrer dans le monde protégé où règne tant bien que mal Friderike, et qu’il cantonne à des hôtels de passage. Il ne permet à aucune d’empiéter sur son univers hérissé de défenses. Si présent dans son œuvre, le génie de la femme, avec ses intrigues et ses mystères, sa sensualité et ses armes sournoises, est absent de sa vie. Sans doute Zweig a-t-il plus rêvé la femme que joui de ses immorales capacités. Il a toujours été envers elle d’une prudence extrême. Ses écarts d’exhibitionnisme, s’il les commit vraiment, ne seraient que pitoyables au regard de tout ce qu’il écrit. Ces vertiges, ces cimes, ces abîmes où peut mener cette enfant de l’amour et de Satan, il les a toujours soigneusement évités.
     
    Aussi ne sombre-t-il pas une fois dans la passion. A force de prudence, il vit à l’étroit ; aucune rencontre notoire ne vient égayer son existence, sérieuse, austère, et que quelques incartades sans suite ne peuvent faire basculer dans cette volupté magnifique où se complaît son imaginaire. « Un élément nouveau entrera-t-il jamais dans ma vie ? », se plaint-il dans son journal au mois de décembre 1931. A force d’invoquer les muses, de faire appel dans ses rêves aux démons féminins, elles vont finir par lui répondre mais, comme dans ses livres, elles ne lui porteront ni bonheur ni chance.
     
    1 Erwin Rieger, Stefan Zweig, der Mann und das Werk , Berlin, Spaeth, 1928.
     
    2 Florence, éditions Vallecchi.
     

    L’Autrichienne
     
    Une blonde ravissante, enjouée et coquette, « la statue même de la Beauté » quand elle est debout, et quand elle se meut « la Grâce en personne » selon Horace Walpole, telle est la femme qui entre dans sa vie, « toute caresses et cajolis », Marie-Antoinette, la reine de France, que ses détracteurs nommaient l’Autrichienne.
     
    Zweig, en bon compatriote, ne vient pas à sa rescousse. Fasciné, vaguement amoureux quand il décrit ses charmes infiniment féminins, ses belles épaules, sa lèvre gourmande, son cœur enfantin et sa joie de vivre, il souligne toutefois, comme à plaisir, avec un raffinement sadique, les innombrables défauts de la reine. Dès les premières pages de son livre, il l’oppose à sa mère, l’impératrice Marie-Thérèse, qui fut selon lui « le seul grand souverain de la maison d’Autriche », car elle réussit à maintenir en des temps difficiles l’unité de l’empire contre la Prusse et la Turquie, l’Orient et l’Occident. « Politicienne clairvoyante, presque voyante, qui sait combien est peu solide cet amalgame de nations, composé par le hasard », elle devine que ce qu’elle a si péniblement et avec tant d’énergie réussi à rassembler, et que doit sceller le mariage d’une Habsbourg, sa plus jeune fille, avec le fils régnant des Bourbons, sera un jour morcelé. Elle pressent que son œuvre s’effritera avec ses descendants. A cette souveraine exemplaire dont l’existence entière fut consacrée à la raison d’Etat, Marie-Antoinette ne ressemble nullement. Elle est l’opposé.
     
    C’est par un contrepoint subtil et lumineux, en comparaison avec le sérieux, le dévouement, l’esprit de conquête et de sacrifice de l’impératrice d’Autriche, qu’apparaissent les faiblesses de caractère de la reine de France, sa morale fragile, son goût pour l’écume des jours et les plaisirs des fêtes. Marie-Thérèse est l’intelligence même, la stratégie politique faite femme. Elle s’identifie à son pays. Marie-Antoinette, elle, n’aime pas l’application, ce mot cher à sa mère, elle est la légèreté même, ses dons sont primesautiers, son caractère incapable de se poser, elle ne sait être ni sage ni grave. Elle déteste apprendre, déteste lire, a horreur des sermons. C’est une adolescente exquise, qui n’aimera toujours que la jeunesse, avec sa santé, sa beauté, ses rêves et ses fous rires.

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