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Stefan Zweig

Stefan Zweig

Titel: Stefan Zweig Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Dominique Bona
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toujours pour. Son sens critique le porte à la louange. Verlaine, à ses yeux l’un des plus grands poètes français, est injustement méconnu dans les pays allemands ? Zweig se porte à son secours, traduit son œuvre, présente sa vie, se bat pour défendre son nom et ses livres. Il agira souvent ainsi. Nombre d’auteurs, qui seraient restés dans l’ombre, lui seront redevables de la lumière qu’il portera sur eux, n’hésitant pas à sacrifier le temps que réclame son œuvre personnelle.
     
    Zweig aime dans la vie les valeurs positives. Du clan des constructeurs, il luttera de toute son énergie d’intellectuel contre les forces du néant. Ce qu’il y a de meilleur en lui, et ce qui rassure tellement quand on lit ses livres, c’est cette prédominance du positif, cet enthousiasme, cette fidélité à laquelle la mort ne changera rien : s’oublier soi-même pour admirer et pour aimer. Selon lui, la vie est une affaire d’éclairage, il faut savoir choisir ses lumières. « Tous les buts, écrit-il dans Les Merveilles de la vie , perdus jusqu’alors dans les ténèbres, réapparaissent dans l’avenir, au terme de chemins lumineux. »
     
    L’esprit de ses voyages, qu’anime le démon de la curiosité, n’est pas la conquête – la possession du monde, fût-ce intellectuellement, ne l’intéresse pas –, mais la volonté d’ouverture, le besoin de se comparer et de s’enrichir en se frottant à d’autres cultures. Paysages et monuments l’attirent moins que les êtres. Et parmi eux, ce sont les hommes et les femmes d’exception qu’il rêve de connaître. Il y a en lui, très fort, le sentiment de l’élite : seuls les êtres exceptionnels valent le déplacement et forcent l’admiration. « On ne peut comprendre les caractères les plus secrets, les plus profonds d’une ville, écrira-t-il, qu’à travers l’élite de leurs êtres humains. »
     
    Stefan Zweig, quand il voyage, est un touriste original : il ne suit pas les itinéraires classiques, passe son temps entre flâneries et bibliothèques, à rechercher les gens passionnants. Ses Wanderjahre se comprennent et s’éclairent à la lumière des phares qui les jalonnent. En Allemagne, en Belgique et en France, en Suède, en Italie, il y a toujours un homme ou une femme dignes de l’enthousiasmer. Très jeune, il croit en l’émulation, en l’amitié, et aux échanges fraternels. Il y croira jusqu’au cœur de la guerre, quand la haine sera devenue le moteur de la planète.
     

    Caillou-qui-bique
     
    Dans son tour d’Europe, le premier auteur qu’il rencontre et qui le marque à vie est un poète truculent et tendre, méconnu du grand public français ou allemand. Belge, d’origine flamande, il vit à la campagne, non loin de Bruxelles, dans une maison de paysan au lieu dit Caillou-qui-bique. Il s’appelle Emile Verhaeren. Né en 1855, quand Zweig le rencontre, en 1902 – il est venu spécialement le voir à Bruxelles –, c’est un homme corpulent, avec des cheveux « couleur de rouille » et des yeux « couleur de mer », qui s’avance vers lui, la main tendue, et souriant. Pour Zweig qui associe l’art à l’image élégante et citadine des poètes viennois qu’il fréquente, la rencontre est une bouffée d’air. Comme un courant d’oxygène qui s’engouffre dans un univers clos où il sent qu’il étouffe, le personnage avec son goût de la vie et de la bonne chère, sa force et son pittoresque – à Caillou-qui-bique, il vit en sabots et veste de paysan –, lui donne un vrai coup de fouet.
     
    Il admire ses poèmes, Les Flamandes et Les Moines , Les Villes tentaculaires et Les Villages illusoires . Il les a lus en français, la langue que s’est choisie ce Flamand, dans les revues confidentielles auxquelles il est abonné depuis le lycée, et il a l’intention de les traduire en allemand et d’en faire la réclame, par des articles et des conférences, comme pour Verlaine. Parce qu’il croit en l’amitié par-delà les frontières, parce qu’il croit au partage et à l’échange, il est capable, pour faire aimer la littérature qu’il aime, de déployer une énergie de missionnaire. Avec Verhaeren, la tâche sera à la fois facile et rude. Le personnage est le plus sympathique, le plus cordial des hommes : autour de lui qui a horreur de la solitude, et qui forme avec son épouse, Marthe, un tandem indestructible, gravite une compagnie diverse et cosmopolite que Zweig apprendra à

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