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Survivant d'Auschwitz

Survivant d'Auschwitz

Titel: Survivant d'Auschwitz Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Thomas Gève
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il murmura tout bas : « Je te souhaite bonne chance. » Je regardai son travail, un nombre à six chiffres bien tatoués, un peu trop grands à mon goût. En les additionnant tous, j’arrivais au chiffre 13. Cela me porterait-il chance ?
    Voilà comment un simple nom devenait un simple numéro, un détenu de plus. Un prisonnier, le Schutzhäftling * 1 , remplissait l’inévitable paperasserie. Plus de 100 000 détenus m’avaient précédé, tous en double exemplaire : l’un pour l’administration du camp, l’autre pour la Gestapo.
    « Imbécile ! Ici, tu ne t’appelles plus Israël ! » me dit, en m’engueulant, le détenu-secrétaire, alors que j’étais sur le point d’inscrire mon deuxième prénom, celui qui était assigné à tous les Juifs de sexe masculin depuis 1938. Je continuai de remplir le formulaire : treize ans – Beuthen – Berlin – apprenti jardinier – émigré – déporté – aucun – rubéole – scarlatine – oreillons – aucun – aucun – aucun. En bas, je signai la déclaration, comme quoi j’étais apatride et sans aucun bien. Je n’arrivais pas à comprendre comment une telle farce pouvait faire partie des nombreux documents chargés de maintenir en place le prestige du Troisième Reich. Cela me dépassait.
    Il n’y eut qu’une seule pause, pour la distribution d’une boisson ressemblant vaguement à de la tisane et qu’on nous servit dans un pot en fer-blanc. Puis les ordres hurlés reprirent, cette fois pour trouver des médecins et autres spécialistes. Une douzaine de détenus environ s’avancèrent.
    Mon sens de la provocation se réveilla. Je voulais tenter une fois encore d’échapper à la Gestapo. C’était maintenant ou jamais ! Le plan était désespéré, mais il fallait que j’essaye. J’allai voir l’officier SS, claquai des talons, et essayai d’avoir l’air aussi intelligent que ma pitoyable allure le permettait. « Je vous demande respectueusement de bien vouloir examiner mon transfert. Je n’ai pas encore quatorze ans et je ne me sens pas à ma place ici. » Il fronça les sourcils sous la visière de sa casquette à tête de mort et fémurs croisés en une mimique sardonique, et me dit : « Et où veux-tu donc aller ? – Au camp pour les enfants, répondis-je. – Il n’y a pas de camp pour les enfants, ici », rétorqua-t-il d’un ton sans réplique. Mais je ne lâchai pas : « Alors est-ce que vous pouvez au moins me mettre avec d’autres jeunes ? » Visiblement énervé, il me dit : « Écoute, un jour, tu me remercieras de ne pas l’avoir fait. Maintenant, tu es ici et basta ! Allez, fous le camp ! »
    Quant l’enregistrement fut terminé, il faisait nuit noire. On nous conduisit vers les innombrables baraques du camp d’habitation proprement dit. Toutes, à l’intérieur, étaient divisées par des cloisons, avec des bâtis en bois de 1,80 mètre de long sur 1,80 mètre de large et 75 centimètres de haut. Il y avait trois châlits superposés. Chacun d’eux était recouvert de paille et constituait leur nouvelle demeure pour six détenus. Au milieu du baraquement, une installation de chauffage fabriquée en briques comprenait un poêle d’un côté et une cheminée de l’autre.
    Nous fûmes confiés au doyen du bloc, un détenu de longue date, chargé de surveiller les prisonniers de la baraque, qui, assisté de quelques responsables de chambrée, affecta rapidement les nouveaux arrivants à leur place. À peine avions-nous compris comment dormir sur un châlit, c’est-à-dire serrés comme des sardines en boîte, couchés sur le côté les uns contre les autres, tête-bêche, la tête enserrée entre les pieds de nos deux voisins, qu’un coup de sifflet strident retentit brusquement. Notre nouveau responsable, le doyen de bloc, allait faire un discours, qu’il devait connaître par cœur, depuis le temps…
    « Vous êtes ici au bloc 7a du camp d’hommes de Birkenau. Interdiction d’en sortir ! Vous ne devez quitter vos châlits qu’un par un. Il y des latrines provisoires au milieu du baraquement. Vous devez vous tenir à carreau et obéir très strictement aux ordres du personnel du bloc ou à certains détenus. Nous sommes vos supérieurs hiérarchiques, et c’est nous qui décidons. Vous nous devez totale obéissance. Si vous ne trouvez plus vos chaussures, le matin au réveil, ne venez pas vous plaindre. Gare à celui qui viendra m’importuner avec des broutilles, il ne

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