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Talleyrand, les beautés du diable

Talleyrand, les beautés du diable

Titel: Talleyrand, les beautés du diable Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel de Decker
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charme et son aimable caractère ?
    Et ce fut ainsi que, le 30 novembre de 1779, en l’église parisienne de Saint-Jacques-du-Haut-Pas, Adélaïde Filleul devint comtesse Flahaut de la Billarderie.
    Et tant pis si la fortune du vieux marié était mince puisque l’alliance compensait.
    Le vieux marié ! Cet homme-là, tout comte qu’il fût, pouvait-il un instant s’imaginer que le tendron, craquant autant que spirituel, qui allait désormais porter son nom, lui serait éternellement fidèle ?
    Évidemment, non.
    Mais du moins aurait-il une tendre compagne pour ses vieux jours et « un bel ornement pour son intérieur ».
    Il serait sans doute trompé, soit, mais comme il était plein d’honneur, trop âgé pour se montrer jaloux et que sa politesse était célèbre, il avait décidé de fermer les yeux.
    Et cela valut mieux.
    Surtout à compter du jour où Adélaïde décida de recevoir, de tenir salon une ou deux fois la semaine, d’accueillir chez elle « cette société disparate et faisandée où se côtoyaient grands seigneurs, traitants et gens de lettres ».
    Une société dans laquelle, un jour, se glissa subrepticement sur la pointe du pied, comme il savait si bien le faire, un aimable prélat, un jeune abbé de Périgord qui se nommait Charles Maurice de Talleyrand.
    Et qui n’eut aucune peine à montrer à la maîtresse de maison qu’il était tout de même plus sémillant que son vieux mari goutteux et rhumatisant.
    — Il est vrai que, jeté dans les bras d’une enfant après l’âge de cinquante ans, monsieur de Flahaut comptait au nombre des vieillards, remarque alors Villemarest. Ses yeux étaient desséchés et ternes, ses lèvres grimacières donnaient issue par leur flasque distension à une pointe de langue qu’aucune dent ne retenait plus.
    On a peine à l’imaginer rendant les hommages à sa compagne !
    Pistonnés par le comte d’Angivilliers, propre frère de Flahaut et directeur général de bâtiments du roi, les nouveaux époux, qui n’étaient pas richissimes puisque la pension du « jeune » marié culminait péniblement à 11 000 livres l’an, purent immédiatement disposer d’un appartement dans le palais du Louvre. Dans les greniers pour être exact, c’est-à-dire près du ciel, puisque le méticuleux Charles Maurice observera bientôt qu’il lui fallait gravir cent soixante marches pour accéder au nid d’Adélaïde.
    Elle avait donc trouvé un bon moyen pour faire battre les coeurs !
    Celui de l’agent général du clergé dans un premier temps.
    Et au moins pour dix ans.
    En 1780, et entre deux dîners en ville, Talleyrand avait en effet réussi à se faire nommer agent général de l’Église. Il avait dû cette promotion à son sens évident des affaires, à son entregent et à son « esprit délié » pour reprendre les mots d’un de ses contemporains. Et ce n’était pas rien que d’être agent général ! Il s’agissait ni plus ni moins de superviser tous les droits et revenus de l’Église gallicane. Ce qui entraînait de fréquents contacts avec le contrôleur des finances du royaume, et obligeait aussi à gérer les conflits avec le Parlement s’agissant des taux de pensions, des droits ecclésiastiques, de la perception des dîmes, des acquisitions, des donations, etc.
    Et c’était sans compter sur les déplacements en province qu’il convenait d’effectuer régulièrement pour aller prendre le pouls de ses coreligionnaires. La belle affaire que ces voyages ! Surtout quand Adélaïde acceptait de l’accompagner.
    En route pour la Bretagne, par exemple, un périple lors duquel ils filèrent le parfait amour au vu et au su du clergé breton.
    Ce qui n’empêcha pas Charles Maurice de songer à l’amélioration de la condition des femmes de marins.
    — J’ai remarqué, expliquera-t-il plus tard, qu’il y avait dans le pays une quantité de femmes qui n’étaient ni filles, ni mariées, ni veuves. Elles avaient, à une époque de leur vie, épousé des matelots qui n’étaient pas revenus, et dont la mort n’était pas constatée. La loi s’opposait à ce qu’elles pussent se remarier. Je me servis de toute la théologie, qui, lorsqu’on est un peu entendu, ne manque pas de souplesse, pour établir qu’au bout de tel nombre d’années, suffisant pour qu’il n’y ait pas de désordre social, ces pauvres femmes pouvaient, comme on dit, convoler à de secondes noces. Mon mémoire fut remis à monsieur de Castries,

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